• 25 Jetons et ex-libris de notaires

     

     

     

    Un notaire prospère (dessin de Claude Bils. 1884-1968).

                          1 Un notaire prospère (dessin de Claude Bils. 1884-1968).

     

    - Pourriez-vous chiffrer les bénéfices, Maître ?

    -  Mes bénéfices !!... Ils sont « incalculables » !!...

     

     «  Que maudit soit le bec cornu de notaire qui me fit signer ma ruine », écrivait Molière dans Le Médecin malgré lui (I,1). Cette image parfois accolée à la personne du notaire peut-être illustrée au moyen de deux sortes d’objets, oubliés de tous à l’exception des collectionneurs qui hantent les salles de vente, les brocantes et les vide-greniers : d’une part, les jetons de notaires, d’autre part les ex-libris de notaires. Car, en effet, pendant longtemps, pour gagner de l’argent, le notaire essayait de placer à ses clients une monnaie non officielle, dite jetons de notaires, dont le bénéfice lui permettait de s’offrir une bibliothèque de livres anciens de grande valeur, qu’il ne lisait jamais, à l’exception de son ex-libris apposé à l’intérieur de chacun d’entre eux portant son nom ou ses initiales et exprimant sa réussite sociale !

     

     

     

     

    jeton de notaire à l’effigie du roi Louis XIV, daté 1700.

     

              2 Recto d’un jeton de notaire à l’effigie du roi Louis XIV, daté 1700.

     

    Dans la famille numismatique (qui a rapport aux médailles), voici, tout d’abord, les jetons de notaires. Ils se présentent, le plus souvent, sous forme de rondelles de métal, d’un diamètre de l’ordre de 30 mm, en plomb ou en cuivre et plus rarement en argent (d’où l’expression de tous ceux qui se sont fait gruger en croyant être en possession de métal précieux : « Être faux comme un jeton »), sur lesquelles des symboles sont gravés. Sans être des monnaies officielles, ils ont pu être utilisés comme monnaie de substitution pendant les crises monétaires.

     

     

     

     

    jeton de notaire avec les mots gravés : Conex du Roy et Notaires. 1700

    3 Verso du précédent jeton de notaire, avec les mots gravés : Coners du Roy et Notaires. 1700 (l'ancien mot coner désignait le conseiller).

     

           Les jetons d'hommage dédiés ou à l'effigie de notaires particuliers sont les plus rares. L’un d’entre eux souvent cité est celui frappé aux armes de Jacques Charmolue, notaire du roi et changeur du Trésor sous Louis XII et François Ier. Mais, le plus souvent, sous l’Ancien Régime, les jetons étaient émis par des assemblées ou des compagnies de notaires, devenues chambres de notaires (de villes ou d’arrondissements). Depuis le XXème siècle, ils le sont par des conseils régionaux, des assemblées et des congrès de notaires.

     

     

     

     

     

    Jeton octogonal de la Compagnie des Notaires de Paris à l’effigie du roi Louis Philippe Ier

    4 Jeton octogonal de la Compagnie des Notaires de Paris à l’effigie du roi Louis Philippe Ier.

     

    Les jetons de notaires peuvent aussi être de forme octogonale, donc à huit pans, ce qui permet de ne pas les confondre avec les jetons de caddies des collectionneurs, dits caddiecologues, qui sont toujours ronds.

     

     

     

     

     

    Jeton en argent de la Chambre des notaires du Maine et Loire de l’arrondissement de Saumur

    5 Jeton en argent de la Chambre des notaires du Maine et Loire de l’arrondissement de Saumur.

     

          Pour conclure avec nos jetons de notaires, cette précision selon laquelle ils ont surtout été frappés en Normandie, Picardie et Ile-de-France, ainsi que dans certaines grandes villes comme Toulouse, Montpellier et Marseille.

     

     

     

     

     ex-libris

    6 Collection d'ex-libris d’un collectionneur (celui ou celle qui fait des collections !). « C’est que, collés aux livres, les ex-libris sont vivants, et que, réunis en tas, ils sont morts. » (Henri Bouchot. Les Ex-Libris et les Marques de possession du livre. Paris, Édouard Rouveyre, 1891, p. 17). 

     

         Dans les familles héraldique (qui a rapport aux blasons) et bibliomaniaque (maladie en usage jusqu’à l’ère informatique), voici maintenant l’ex-libris du notaire (du latin ex libris meis : « faisant partie de mes livres »). Il désigne une inscription personnalisée qu’un notaire colle soit sur le contre-plat de livres (à ne pas confondre avec la contre-platine d’un fusil ou d’un pistolet), c’est-à-dire à l’intérieur de la couverture (le plus souvent sur le plat supérieur), soit sur la page de garde de ses livres (feuillet mis au commencement d’un livre), comme marque d’appartenance.

     

    Cette inscription peut être une gravure ou prendre la forme de tampons, de cachets, etc. Elle permet ainsi au notaire de marquer de son empreinte sa précieuse collection de livres.

     

     

     

     

    Ex-libris de Jacques Thibout (1402-1555), seigneur de Quantilly (Cher), notaire et secrétaire du Roi

    7 Ex-libris de Jacques Thibout (1402-1555), seigneur de Quantilly (Cher), notaire et secrétaire du Roi (imprimé au verso du titre d’un livre des coutumes du Berry, publié à Lyon en 1517. Bibliothèque municipale de Bourges).

     

    Cet ex-libris du notaire du roi Jacques Thiboust, gravé sur bois, porte sa devise : « Ley et Regio » ; son nom anagrammatisé (transposition de lettres, qui d'un mot ou d'une phrase fait un autre mot ou une autre phrase) : « Qui voyt s’esbat » ; et ses armes.

     

     

     

     

    Ex-libris aux armes d’Antoine-François Doyen, notaire à Paris (1693-1767)

    8. Ex-libris aux armes d’Antoine-François Doyen, notaire à Paris (1693-1767).

     

     

     

     

    Ex-libris de Desains, notaire à Saint-Quentin (XVIIIème siècle)

             9. Ex-libris de Desains, notaire à Saint-Quentin (XVIIIème siècle).

     

     

     

     

    25 Jetons et ex-libris de notaires

    10. Ex-libris d’E. Aubert, notaire à Langres : « Qui me nomme me rompt ».

     

    L’ex-libris comporte parfois une devise ou une citation chère au propriétaire du livre, accompagnée de son nom et de sa fonction (en l’espèce notaire).

     

     

     

     

    Ex-libris d’André Fournier, notaire à Lille (c. 1924)

                        11. Ex-libris d’André Fournier, notaire à Lille (c. 1924).

     

    Lorsque l’élément graphique principal de l’ex-libris est un dessin allégorique, le propriétaire peut en être lui-même l’auteur. Tel ne paraît pas être le cas de cet ex-libris d’André Fournier sur lequel on identifie difficilement la signature de l’auteur du dessin.

     

     

     

     Ex-libris de Jean Allemes, notaire à Dunkerque (cliché typographique 1913)

    12 Ex-libris de Jean Allemes, notaire à Dunkerque (cliché typographique 1913).

     

    Au contraire, cet ex-libris de Jean Albert Emmanuel Allemes, notaire à Dunkerque, mentionne de manière parfaitement lisible l’auteur de son dessin maritime : Henry-André.

     

     

     

    Ex-libris de Charles-Edmond Mitandier, notaire à Troyes.

                      13 Ex-libris de Charles-Edmond Mitandier, notaire à Troyes.

     

    Plus sobre, mais non moins possessif, l’ex-libris de ce notaire de Troyes en Champagne

     

     

     

     

    Ex-libris de Balthazar Picsou, ancien notaire de  France, arrivé en Amérique en 1947 où il fut banquier

    14 Ex-libris de Balthazar Picsou, ancien notaire écossais, arrivé en Amérique en 1947 où il fut banquier (cette information inédite m’a été certifiée par Riri, Fifi et Loulou, hier après-midi sur une plage de la Côte d'Opale alors qu'ils construisaient un château-fort pour se protéger de la montée des eaux).