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    Universités en faillite : suppression de cours

           - Chic, chic, c’est mon premier cours de droit. Je suis un grand maintenant !

     

     

     

    « Les disparus de l’EC 24 48 ». Le décor étant en place et le réseau intranet de l’université partiellement nettoyé, au retour des grandes vacances, Allegro Moderato fut, à sa grande surprise, privé de son premier cours : celui de droit des biens, EC 24 48, du mardi matin. L’enseignant chargé dudit cours avait informé l’université pendant la fermeture estivale qu’il ne l’assurerait plus si on ne lui réglait pas les heures qu’il avait effectuées ces trois dernières années. À la rentrée, personne ne le crut car c’était un avocat et, de toute façon, l’université était sans-le-sou depuis que son président avait utilisé l’argent des heures complémentaires pour rénover son bureau et l’espace d’accueil attenant. Pourtant, notre homme de loi, qui représentait la sagesse et le bon sens, tint parole et, faute de repreneurs bénévoles, le cours de droit des biens fut supprimé. Les étudiants inscrits audit cours furent invités à suivre, à la place, le cours de droit des personnes, EC 23 49, du vendredi matin.

     

    « Le cours EC 23 49 n’est plus disponible ». Seulement, le professeur en charge de ce cours, refusa d’accueillir les naufragés de l’EC 24 48 au motif qu’il avait déjà 711 étudiants dans son amphi Cujas, rebaptisé B2 bis, prévu pour 600 personnes, équipé de 350 sièges en état de les recevoir, avec de vieux extincteurs vides, un micro filaire sans fil, et des gouttes d’eau qui tombaient du plafond sur le deuxième rang. Il déclara dans un tweet rageur que si l’université passait outre, il demanderait sa mutation dans une fac en bon état d’étanchéité, équipée d’extincteurs certifiés NF, de sièges écritoires haute qualité et de micros filaires avec fil.

     

     

    Bien ennuyé, le président de l’université, auteur d’un rapport de 795 pages sur L’universite du XXIe siecle, commandé par l’Agence française de la communication dans les universités (code http : Erreur 404 [page introuvable]), réagit aussitôt à l’événement en twittant : « Solidarité et fraternité dans cette épreuve avec nos amis étudiants innocents de L1 droit, mis à l’écart, de manière discriminatoire et injuste, du cours de droit des personnes ». Et, pour éviter une manifestation des étudiants dont il avait pu convaincre les syndicats représentatifs de voter pour lui aux prochaines élections à la présidence de l’université, il prit un arrêté « pour appliquer un correctif immédiat d’humanité et d’équité à des résultats qui ne pourraient être issus que d’un raisonnement pédagogique et mathématique autistique ». C’est ainsi que tous les étudiants, inscrits ou non au cours de droit des personnes, se virent attribuer la note de 10/20, ce qui provoqua l’amertume des bons étudiants, la jubilation des autres, et la satisfaction du professeur n’ayant plus aucune copie à corriger pendant les vacances de février.


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    La virgule de l’ancien article 1382 du Code civil

     

    Le célèbre article 1382 du Code civil relatif à la responsabilité délictuelle et quasi délictuelle pour faute a été abrogé par l’Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

     

     

     

    La virgule de l’ancien article 1382 du Code civil

     

    Toutefois, il a été repris à l’article 1240 nouveau du Code civil, « à l’identique », nous serinent tous les auteurs et commentateurs de cette réforme, aussi bien universitaires que praticiens.

     

     

    Il en est ainsi, par exemple, des éminents auteurs des annotations du Code civil Dalloz dans son édition de 2018 (p. 2054), et, plus récemment encore, d’un célèbre avocat, Maître Georges Kiejman, qui fut notamment Ministre délégué auprès du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, du 2 octobre 1990 au 15 mai 1991.

    Voici ce qu’il disait en mars-avril 2018 : « Les révolutionnaires de 1789 pensaient que la loi était assez claire pour que l’on se passe de jurisprudence. Il y a quelques textes qui répondent à cet idéal. L’article 1382 du Code civil napoléonien, qui n’a pas changé d’une virgule, est dans ce cas : «Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » (Le Débat, n° 19, mars-avril 2018, Georges Kiejman, Justice pour la justice).  

    Cet homme de lois a mentionné, mot à mot, le texte de l’ancien article 1382 du Code civil, devenu l’article 1240 nouveau du Code civil, en omettant toutes les virgules que l’un et l’autre contenaient. C’est bien dommage car, en comptant bien, dans sa version d’origine issue de la loi du 9 février 1804, l’article 1382 du Code civil contenait trois virgules, et, dans sa version, relookée « à l’identique », en vigueur depuis le 1er octobre de 2016, plus que deux !

     

     

    La virgule de l’ancien article 1382 du Code civil

          Code napoléon, extrait. Edition originale (source: gallica.bnf.fr)

     

    Ancien art. 1382 : «Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »

    Nouv. art. 1240 : « «Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

     

    En somme, notre mémorable article 1382 du Code civil a perdu une virgule en 2016, et, plus encore, trois virgules sous la plume de Maître Georges Kiejman, en 2018, avec un commentaire irrationnel aux termes duquel il n’aurait pas changé d’une virgule, faisant ainsi échos à la citation anonyme : « Ecrivez, il  en restera toujours une virgule », reproduite sur le site Point-Virgule !

     

     

    La virgule de l’ancien article 1382 du Code civil

     

    C’est bien triste car ce tour de passe-passe législatif a été téléguidé par des groupes de pression pour modifier le sens même de cet article ancestral en augmentant, de la sorte, la mesure de la responsabilité des auteurs d’une faute délictuelle et quasi délictuelle. Les grammairiens, qui connaissent bien les règles concernant la ponctuation dans les phrases complexes, ne me contrediront pas.

     

    La virgule de l’ancien article 1382 du Code civil

                                   Anatomie de la virgule

     

    Pour les autres, voici un exemple concret emprunté aux lois mathématiques de l’univers du Big Bang à E = mc2  (Dieu est un mathématicien, enlever une virgule à son chiffre et il n’y aurait jamais eu d’univers. Oscar Consoli). 

     

    Toto achète un pack de six bouteilles d’eau minérale à Carrefour  au prix affiché de 3,24 €. Il passe à la caisse et, à la suite d’une erreur de saisie, la virgule disparaît et le pack de six bouteilles passe à 324 €. La suppression d’une virgule augmente donc par cent le prix initial.

    C'est exactement ce qu'il s'est produit avec la réforme de 2016 !

     

     

     

     

     

     

     


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    Les articles 1382 et 1383 du Code civil en vers alexandrins

     

    1.« Écrit en prose qui veut, mais en vers qui peut » (Voltaire, Lett. St Alambert, 7 mars 1769)

     

     

     

    En octobre 2017, la Chancellerie a annoncé la discussion au Parlement, au cours du second semestre 2018, d’un projet de réforme du droit de la responsabilité civile, qu’elle avait dévoilé en mars 2017, et auquel j’ai déjà consacré un commentaire sur ce blog (La réforme du droit de la responsabilité civile pour 2018).

     

    Adieu donc nos célèbres articles 1382, 1383, 1384, 1385 et 1386 du Code civil de 1804, devenus, à la suite de l’Ordonnance du 2 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les nouveaux articles 1240, 1241, 1242, 1243 et 1244 de notre Code civil, sans aucun changement, si ce n’est l’oubli d’une des trois virgules de l’ancien article 1382 du Code civil, suite à un manque d'intérêt des copistes chargés de la reproduction de cet article.

     

    Adieu à la belle écriture de nos anciens articles 1382 et suivants du Code civil. Les textes étaient simples, cohérents, clairs et bien structurés. Les prochains seront détaillés, complexes et difficiles à comprendre ! 

     

     

     

     

     

     

    Code Napoléon, Mis en Vers par D., ex-législateur. 1811

     

    2 Code Napoléon, Mis en Vers Français, par D., ex-législateur, 1811 (source : Bibliothèque nationale de France. gallica.bnf.fr. Le livre complet y est en accès libre) 

     

     

    Aussi,  pour les nostalgiques du bon français, voici une réécriture des articles 1382 à 1386 du Code civil, en vers, pour la plupart alexandrins, due à un auteur anonyme : D. ex-législateur (en fait, il s’agit de Benoît Michel Decamberousse, un homme politique et juriste sous la Révolution Française et le Premier Empire).

     

    Pour aujourd’hui, les articles 1382 et 1383 du Code civil. Dans deux jours, l’article 1384 du Code civil. Et, pour terminer, deux jours plus tard, les articles 1385 et 1386 du Code civil.  

     

    Prenez votre cahier de poésie et bonne promenade littéraire !

     

     

     

     

     

    Miguel de Cervantes : la leçon de poésie

     

              3. Miguel de Cervantes : la leçon de poésie

     

     

     

              Art .1382 (art. 1240 nouveau).

    Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

     

    Le fait produit par l'homme, et quel que soit ce fait,  

    Lorsqu'il est pour autrui la cause d'un dommage, 

    Met celui dont il est par sa faute l'ouvrage  

    Dans l'obligation d'en réparer les faits. 

     

     

    « Après, il essaiera la poésie ! »

                                    4. « Après, il essaiera la poésie ! »

     

              Art. 1383 (art. 1241 nouveau).

    Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non-seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

     

    Du dommage qu’on peut imputer à son fait,

    Non-seulement chacun demeure responsable,

    Mais encor de celui qui peut être imputable

    A tout défaut de soins qui ne peut s’excuser,

    Ou que son imprudence a pu seule causer.


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    L’article 1384 du Code civil en vers alexandrins

    5. « Tout homme est poète quand il est amoureux » (Eugène Marbeau. Les remarques et pensées. 1901). 

     

     

                                                             Art. 1384 (art. 1242 nouveau).

    On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

    Le père et la mère après le décès du mari sont responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux ;

    Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ;

    Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance.

    La responsabilité ci-dessus a lieu à moins que les père et mère instituteurs et artisans ne prouvent qu’ils n’ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.

     

     

    On doit non-seulement répondre du dommage

    Qui, né de notre fait, est notre propre ouvrage,

    Mais encor de celui que cause l'action

    De tous ceux dont on est garant et caution,

    Ou des choses qui sont sous notre surveillance.

          Ainsi le père, et quand cesse son existence,

    La mère, sont garants des torts dont sont auteurs

    Leurs enfants habitant avec eux et mineurs ;

         Maîtres et commettants, du dommage que causent

    Les gens à leur service et tous ceux qu'ils préposent,

    Encourent à leur tour la satisfaction,

    Quand le dommage naît d'une opération

    Que, sous leur surveillance, ils leur ont confiée.

         Pareille garantie est encore appuyée

    Sur les instituteurs et sur les artisans,

    A raison du dommage et des torts résultants

    Des faits des apprentis et de ceux qu'ils instruisent,

    Et pendant tout le temps que leurs soins les conduisent.

        De ces indemnités, on supporte le poids,

    A moins que les garants ne prouvent, toutefois,

    Qu'ils n'ont pu détourner l'action qui les lie

    A l'obligation de cette garantie.

     

     

    L’article 1384 du Code civil en vers alexandrins

     

    6. « Quelques peuples seulement ont une littérature, tous ont une poésie » (Victor Hugo).


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    Les articles 1385 et 1386 du Code civil en vers alexandrins

                         

                          7. Les plus beaux vers sont ceux qu’on n’écrira jamais,
                              Fleurs de rêves dont l’âme a respiré l’arôme,
                              Lueurs d’un infini, sourires d’un fantôme,
                             Voix de plaine que l’on entend sur les sommets.

                             (Edmond Haraucourt. 1856-1941) 

     

     

                                            Art. 1385 (art. 1243 nouveau).

    Le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé.

     

                     D'un animal, le maître ou celui qui s'en sert,

                     Pendant le temps qu'il est à son usage offert,

                     Répond de tout le tort que cet animal cause,

                     Soit que cet animal, sous sa garde repose,

                     Soit qu'il s'échappe et fuie avec rapidité,

                    Ou bien qu'en s'égarant il erre à volonté.

     

     

     

    Les articles 1385 et 1386 du Code civil en vers alexandrins

          8. Le chien du poète soporifique

     

     

                                       Art. 1386 (art. 1244 nouveau).

    Le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction.

     

                  Lorsque, d'un bâtiment, on est propriétaire,

                  Que la destruction tout-à-coup s'en opère,

                  Et que par sa ruine un dommage est causé,

                  Le maître garantit quiconque en est lésé,

                  Si, faute d'entretien, ou même par le vice

                  De sa construction, s'écroule l'édifice. 

     

     

     

    Les articles 1385 et 1386 du Code civil en vers alexandrins

           8. La poésie dans la forêt

     





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