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    Maîtres et écoliers de Notre-Dame de Paris au XIIIème siècle  

         33. Maîtres et écoliers de Notre-Dame de Paris au XIIIème siècle

     

    Au Moyen Âge, les écoles cathédrales étaient surtout réputées pour leurs enseignements de la théologie et de la dialectique (ou logique). Dans une moindre mesure, on y enseignait également la médecine, les arts libéraux et le droit. Le droit était ainsi professé dans les écoles installées dans le cloître ou sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

     

    V. L’enseignement du droit dans les écoles du cloître.

    34. Juristes dans un fragment d'un manuscrit enluminé du Corpus juris civilis (v. 1330. Université de Bologne).

     

    Guy de Bazoches (v. 1146-1203), dans une lettre de 1190, mentionne l’enseignement du droit civil (decreta leguntur et leges), aussi appelé droit romain, dans les écoles de la cathédrale Notre-Dame (le droit civil désignait les éléments de droit romain, réunis dans le Corpus juris civilis). La bulle Super speculam de 1219 du pape Honorius III en interdira d’ailleurs l’enseignement à Paris : v. rubrique IX : La Faculté de Décret de la Sorbonne). Et, en 1384, le Chapitre de Notre-Dame engagea un procès à la nouvelle Faculté de Décret pour regagner son privilège d’enseigner le droit en l’Île de Notre-Dame « es escoles le chapitre, lieu accoustumé et honneste » (v. rubrique XI : Le Faculté de Décret, Rue Saint-Jean de Beauvais »).

     

    Texte de droit canon (parchemin du VIIIème siècle. Bibliothèque royale de Belgique)

    35. Texte de droit canon (parchemin du VIIIème siècle)

     

    Il va sans dire que le droit canon était encore plus enseigné dans les écoles de Notre-Dame, en raison de son rattachement à l’enseignement de la théologie. Pourtant les chanoines ou les maîtres qui enseignaient le droit canon et le droit civil, sur le parvis de Notre-Dame ou à l’ombre de son cloître, n’ont guère laissé de souvenirs.

     

    Etudiants en droit de l'Université de Bologne

    36. Étudiants en droit de l’Université de Bologne écoutant la leçon de leur Maître (Fragment du monument funéraire L’Arche de Giovanni da Legnano des sculpteurs Pier Paolo delle Masegne et Jacobello da Bologna [Musée civique médiéval de Bologne]. Giovanni da Legnano était un professeur de droit de l’Université de Bologne, mort en 1383.

     

    L’absence de prestige de l’enseignement du droit dans les écoles de Notre-Dame de Paris est d’autant plus attristante que, à la fin du XIème siècle et au XIIème siècle, la renommée de l’Université de Bologne, fondée en 1088, dépendait pour beaucoup de l’enseignement du droit dispensé par de grands maîtres (Notre-Dame a été bâtie à la même époque entre la seconde partie du XIème siècle et le début du XIIIème siècle). Il s’agissait à la fois du droit romain et du droit canon (ou canonique), tous deux réunis sous les termes de droit savant.

     

     

    Irnerius

                      37. Irnerius (Bologne v. 1050 – Bologne v. 1130) 

     

    Le plus célèbre de ces maîtres était Irnerius (aussi appelé Wernerius, Werner ou Garnerius). Ayant ouvert une école de droit romain à Bologne vers 1085, il est l’un des précurseurs de l’Université de Bologne avec Pepo, un énigmatique avocat (causidicus), docteur ès lois (legis doctor). Irnerius et ses élèves, appelés les « Quatre docteurs » (Martinus Gosia, Bulgarus, Jacobus, Hugo), enseignaient le droit en employant la méthode exégétique de la glose, d’où leur nom de glossateurs puis de postglossateurs. C’est ainsi qu’ils lisaient des fragments du Corpus juris civilis (droit civil ou romain) et du Corpus juris canonici (droit canonique), en expliquant chacun des mots, puis en résumant le sens du texte, ajoutant parfois une opinion personnelle. Ces gloses, écrites en marge ou entre les lignes du manuscrit des textes commentés (apparat) ou dans un recueil distinct (somme) étaient alors reprises d’un enseignant à l’autre.

     

    Irnerius (Bologne v. 1050 – Bologne v. 1130)

    38. Guillaume de Champeaux (v. 1070-1121), ainsi nommé du lieu de sa naissance,  maître de l’école cathédrale de Paris

     

    Le rayonnement intellectuel des écoles cathédrales de l’Île de la Cité au XIIème siècle, attaché à la théologie et à la dialectique avec des maîtres comme Guillaume de Champeaux (1070-1121) et son élève rebelle Pierre Abélard (1079-1142), commença à s’estomper avec le développement d’écoles concurrentes sur la Rive gauche de la Seine, berceau de notre Quartier Latin. Parmi celles-ci, plusieurs écoles de droit qui avaient quitté l’Île de Notre-Dame se trouvèrent réunies dans la Faculté de Décret de la nouvelle Université de Paris (v. rubrique IX : La Faculté de Décret de la Sorbonne).

     

    à suivre…


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     39. Plan de Paris de Braun & Hogenberg (1572)

                       39. Plan de Paris de Braun & Hogenberg (1572)

     

     Au début du XIIème siècle, plusieurs écoles de la cathédrale de Paris quittèrent l’Île de la Cité pour s’établir, d’abord, sur le Petit-Pont enjambant un bras de la Seine (sur ce plan de Braun et Hogenberg de 1572, il s’agit du plus haut des deux ponts à droite de l’Île de la Cité), ensuite, sur la Rive gauche, en contrebas de la Montagne Sainte-Geneviève (sur ce même plan, à droite de l’Île de la Cité).

     

     

     

    40. Le Petit-Pont sur le plan de Vassalieu (1609)

                    40. Le Petit-Pont sur le plan de Vassalieu (1609)

     

    Le Petit-Pont, ainsi dénommé car étant le plus petit de tous les ponts de Paris (une centaine de mètres), reliait l’Île de la Cité à la place du Petit-Pont sur la Rive gauche de la Seine où donnaient l’ancienne rue du Marché-Palu (du nom du premier marché existant à Paris sur un terrain humide et boueux), et, aujourd’hui encore, la rue Saint Jacques. D’origine gallo-romaine, il a été plusieurs fois détruit en raison des crues de la Seine et des incendies (il était fait de bois). Il a été reconstruit en pierre, une première fois, en 1409, et, une dernière fois, en 1853. Il est aujourd’hui dénommé Petit-Pont-Cardinal-Lustiger.

     

     

    41 Les maisons du Petit-Pont en 1717

    41. Les maisons du Petit-Pont en 1717 (tableau de Joseph Hubert Hoffbauer).

     

    Si des écoles de droit de la cathédrale Notre-Dame se sont établies sur le Petit-Pont, c’est parce que les maîtres et les écoliers étaient devenus trop nombreux pour rester sur l’Île de la Cité. Les écoles obtinrent donc l’autorisation de l’évêché de s’installer dans des boutiques et des maisons construites sur le Petit-Pont, qui enjambait le plus petit bras de la Seine. Leurs maîtres et écoliers restaient toutefois des clercs soumis au droit, aux tribunaux et aux privilèges de l’Eglise. Pour autant, les écoliers, même tonsurés, ne s’engageaient aucunement à servir dans l’Eglise après leurs études.

     

     

    42. Les églises Saint-Etienne et Sainte-Geneviève au Moyen Âge

         42. Les églises Saint-Etienne et Sainte-Geneviève au Moyen Âge.

     

    Quelques années plus tard, pour échapper, cette fois,  au contrôle épiscopal, des dizaines d’écoles de la cathédrale de Paris quittèrent l’Île de la Cité, voire le Petit-Pont. Elles s’établirent sur la Rive gauche de la Seine en contrebas de la Montagne Sainte-Geneviève (ancien Mons Lucotitus). Au sommet de cette colline, s’élevaient l’église Sainte Etienne et l’abbaye Sainte-Geneviève, à proximité de l’actuelle place du Panthéon et de nos universités présentes Panthéon-Sorbonne Panthéon-Assas, Sorbonne-Nouvelle-Paris III et Paris IV Sorbonne.

     

     

    43. Maître et écoliers au Moyen Âge.

                                 43. Maître et écoliers au Moyen Âge. 

     

    Faute d’argent pour acheter ou construire des locaux, les maîtres des écoles installées sur la Rive gauche de la Seine dispensaient leurs enseignements chez eux, dans des maisons particulières qu’ils louaient à plusieurs, ou même, dans les champs ou dans la rue (ce dessin nous rappelle que les maîtres des écoles de la Montagne Sainte-Geneviève donnaient souvent leurs leçons en plein air).

     

     

    44. La rue du Fouarre sur le plan de Turgot (1739).

                   44. La rue du Fouarre sur le plan de Turgot (1739).

     

    Un exemple authentique de cours en plein air est donné avec la rue des Écoliers ou de l’Escole, renommée, vers 1300, rue du Fouarre (Vicus Stramineus), précisément en raison des bottes de pailles sur lesquelles les écoliers s’asseyaient pour suivre les cours (le mot fouarre ou feurre était synonyme de paille ou fourrage).

     

     

    45. La rue du Fouarre en 1866 (photographie de Charles Marville)

         45. La rue du Fouarre en 1866 (photographie de Charles Marville).

     

    La rue du Fouarre existe encore aujourd’hui, mais les très nombreux collèges qui y étaient installés au Moyen Âge ont disparu comme le collège de la nation de Picardie. En 1304, Dante fréquenta l’un d’entre eux sous la férule du philosophe Siger de Brabant. Dans La Divine Comédie, il écrit : «  C’est l’éclat éternel de Siger, qui jadis, lisant rue au Fouarre, avait syllogisé des vérités d’où vint l’aliment à l’envi ».  Et, de manière plus triviale, Rabelais, dans son Gargantua et Pantagruel, raconte : « Et d’abord, rue du Fouarre, il soutint ses thèses contre tous les professeurs, étudiants et orateurs, et les mit tous le cul par terre ».

     

     

    46. Un maître et ses étudiants au Moyen Âge (gravure de Lara, dessin de Mettais, 1880).

    46. Un maître et ses étudiants au Moyen Âge (gravure de Lara, dessin de Mettais, 1880).

     

    Beaucoup d’écoliers étaient des adolescents, âgés de treize ans ou quatorze ans. Quelques uns étaient encore des enfants de dix ans à peine. Ils étaient logés chez l’habitant moyennant le paiement d’un loyer (le propriétaire sera plus tard soumis à un impôt sur les loyers). Parfois encore, les écoliers étaient hébergés, moyennant argent, chez leurs propres maîtres, lesquels aimaient également accueillir les fils de leurs collègues.

     

     

    47. Le jeune mendiant (gravure Hotelin dessin Pauquet d'aprés Reynolds 1854)

     

    47. Le jeune mendiant (gravure Hotelin dessin Pauquet d'aprés Reynolds 1854)

     

    Quant aux écoliers pauvres, ils durent attendre la fin du  XIIème siècle pour avoir le gite et le couvert dans des hospitia et des collèges du Quartier latin, fondés par de riches particuliers (par exemple, en 1256, le collège de la Sorbonne : v. rubrique IX : La fondation de la Sorbonne). Un contemporain de Philippe-Auguste (1165-1223), a retracé la vie de l’un de ces escholiers démunis illustrant parfaitement les mots de Rabelais : « Faulte d'argent, c'est douleur sans pareille ».

     

     « Je devrais, écrit un de ces pauvres hères, passer mon temps à suivre des cours, mais la pauvreté m'oblige à aller aux portes des ecclésiastiques. J'en suis réduit à crier vingt fois de suite : La charité, mes bons seigneurs! et l'on me répond le plus souvent : Va-t'en avec Dieu ! Je me transporte dans les maisons des laïques : on me repousse avec force cris, et, quand on me dit, par hasard : Attends un peu, je reçois un morceau de pain détestable dont les chiens ne voudraient pas. Les mendiants de profession obtiennent, plus souvent que moi, les mauvais légumes, les peaux et les chairs qu'on ne peut pas mâcher, les boyaux qu'on jette, le vin avarié. La nuit, je cours à travers la ville, tenant d'une main un bâton, et de l'autre une besace et une gourde : le bâton, pour me défendre contre les chiens; la besace, pour recueillir les débris de poisson, de pain et de légumes, et la gourde pour prendre de l'eau. Souvent, il m'arrive de tomber dans la boue, […], et c'est ainsi que je rentre chez moi, tout souillé, pour satisfaire, avec les restes qu'on m'a jetés, un estomac qui aboie. »

     

     

    48. Erasme à Paris : étudiant et répétiteur

                                48. Erasme à Paris : étudiant et répétiteur

     

    Ancêtres de nos étudiants boursiers et salariés, les écoliers sans-le-sou  devaient se débrouiller pour gagner un peu d’argent leur permettant non seulement d’être logés et nourris, mais aussi de rémunérer leurs maîtres notamment pour avoir le droit de passer les examens. Un exemple notoire, bien que plus tardif, en est donné avec Erasme. Parallèlement à ses études de doctorat de théologie à l’Université de la Sorbonne de 1495 à 1499, il devait gagner sa vie comme précepteur au Quartier latin, en plein air. Au fond de cette chromo, le dessinateur a représenté les deux églises qui dominaient à cette époque la montagne Sainte Geneviève : l’église Sainte Etienne et l’abbaye Sainte-Geneviève. Elles sont reconnaissables grâce à la vieille estampe présentée dans cette rubrique sous le n° 42.

     

    49. couverture de Maul Merwart pour une revue publiée à l’occasion de la Mi-Carême 1986

    49. De l’origine du nom Quartier Latin  (couverture de Maul Merwart pour une revue publiée à l’occasion de la Mi-Carême 1986).

     

    Dans ces premières écoles de la Rive gauche, les enseignements étaient donnés exclusivement en latin, la langue courante des maîtres et écoliers, devenue langue officielle jusqu’en 1793. C’est la raison d’être du nom « Quartier Latin » ! Sur ce dessin, un étudiant de la Belle Epoque porte la faluche, coiffe traditionnelle des étudiants qui avait été introduite en France en 1888 en remplacement de la toque doctorale du Moyen Âge. 

     

    50. Un acte notarié en latin au Moyen âge

                            50. Un acte notarié en latin au Moyen âge 

      

    Le latin était également la langue écrite utilisée au XIIème siècle par l’église, les gens de justice dans les actes officiels, et les maîtres des écoles dans leurs écrits consacrés au droit canonique et au droit romain (v. rubrique VII : L’enseignement du droit canonique et du droit romain au XIIème siècle).


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    51. Laurentius de Voltolina: Enricus de Alemania.

    51. Etienne de Tournai, comme de nombreux canonistes des écoles du Quartier Latin, avait étudié le droit à l’université de Bologne. Illustration de Laurentius de Voltolina montrant Enricus de Alemania, un maître de Bologne, exécutant la lectio (lecture) sur sa chaire en présence d’élèves plus ou moins attentifs (Liber ethicorum des Henricus de Alemania, 1350, Berlin/Staatliche).

     

    Au début du XIIème siècle, des dizaines d’écoles s’établirent en contrebas de la Montagne Sainte-Geneviève, sur la Rive gauche de la Seine, pour échapper à la tutelle de l’évêché et à la juridiction du chapitre de Notre-Dame (v. rubrique VI : La naissance du Quartier Latin au XIIème siècle). L’enseignement du droit canonique y fut à l’honneur dans des formes qui nous sont connues grâce aux Sommes (Summae) des maîtres de ces écoles. Il s’agit d’écrits réunissant les décrets et les lois de l’église, complétés de commentaires. La Somme d’Etienne de Tournai (Summa Decreti) serait le plus ancien commentaire complet du Décret de Gratien, rédigé par un maître français. Etienne de Tournai (1128-1203) avait étudié le droit, en Italie, à l’université de Bologne, de 1145 à 1150. Cette université, nous l’avons vu, était célèbre pour les enseignements du droit canonique et du droit civil (ou droit romain) dispensés par Irnerius et plusieurs de ses élèves comme Martinus Gosia, Bulgarus, Jacobu et Hugo (ou Ugo) de Porta Ravennate (v. rubrique V : L’enseignement du droit dans les Écoles du cloître).

     

     

     

    52. Tour Clovis de l'abbaye Sainte-Geneviève

    52. L'église Saint-Etienne-du-Mont (à gauche) et la Tour Clovis (à droite), vestige de l’abbaye Sainte-Geneviève, démolie de 1801 à 1807 pour percer la rue Clovis.

     

    De retour en France, Etienne de Tournai fut maître à Chartres, abbé de Saint-Euverte à Orléans en 1167, abbé de Sainte-Geneviève en 1176, et évêque de Tournais de 1191 à 1203. À Paris, il restaura l’église Sainte-Geneviève qu’il dirigea et au sein de laquelle il rétablit les écoles. Il y enseigna le droit canonique sous la forme exégétique qu’il avait découverte lors de son séjour bolognais.

     

     

     53. Summa Parisiensis

                                                                 53. Summa Parisiensis

     

    À la même époque, d’autres canonistes témoignent de l’excellent niveau des écoles parisiennes du Quartier Latin. En particulier, l’auteur anonyme d’une Summa Parisiensis qui daterait des années 1170 (The Summa Parisiensis on the Decretum Gratiani, édit. T. P. Mc Laughlin, Toronto, institut of Mediaeval Studies, 1952).

     

     

    54. Summa Decretum de Huguccio de Pise

                  54. Summa Decretum de Huguccio de Pise (1140 ?- 1210)

     

    Les écoles de droit du Quartier Latin ont encore été grandement influencées, à la fin du XIIème siècle, par la légendaire Somme du Décret d’Huggucio de Pise, première grande synthèse des écrits de ses exégètes.

     

     

    55. L'Arche de Giovanni da Legnano des sculpteurs Pier Paolo delle Masegne et Jacobello da Bologna

    55. Etudiants en droit à l’Université au bas Moyen Âge (monument funéraire L'Arche de Giovanni da Legnano des sculpteurs Pier Paolo delle Masegne et Jacobello da Bologna. Giovanni da Legnano était professeur de droit à Bologne). 

     

    Quant au droit civil ou romain, il était également enseigné dans les écoles de Paris comme en témoigne Etienne de Tournai dans plusieurs de ses lettres (Jules Desilve, Lettres d’Etienne de Tournai, nouvelle édition 1893, en accès libre : Gallica BNF). Souvent, l’enseignement du droit civil ou romain était mélangé à celui du droit canon, les deux matières étant difficilement dissociables. Il en était ainsi des cours du civiliste Pierre Peverel entre 1209 et 1214 qui, lui aussi, avait été formé à Bologne (Nathalie Gorochov, Les maîtres parisiens et la genèse de l’Université : 1200-1231, en accès libre : https://crm.revues.org/11684). 


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    52. L'Université de Paris au XIIIème siècle

                       56. L’Université de Paris au XIIIème siècle

     

     

     Suite à des conflits opposant les écoles de droit de Paris aux autorités royales, épiscopales et pontificales, le roi Philippe Auguste entreprit de les regrouper en une « Communauté » (appelée « Université », en 1231) et de garantir leur autonomie. Aussi, promulgua-t-il, en l’an 1200, une Charte assimilant les écoliers à des clercs, afin de les placer sous la haute autorité du pape. Les Maîtres et écoliers (au sens d’ « étudiants » en ancien français) bénéficièrent en outre de privilèges comme celui d’être jugés par un tribunal ecclésiastique (justice de l’évêque) et non civil (justice royale). Et, en 1213, un arbitrage pontifical organisa l’enseignement en quatre Facultés (de l'expression latine facultas docendi, « droit d'enseigner ») : Arts libéraux, Théologie, Médecine, et Décret, c’est-à-dire le droit canon (v. rubrique X : La Faculté de Décret de la Sorbonne).

     

     

     53. Premiers statuts de l'Université de Paris, août 1215

                57. Premiers statuts de l'Université de Paris, août 1215

     

    En août 1215, la nouvelle communauté des « Maîtres et écoliers de Paris » reçut ses premiers statuts, octroyés par Robert de Courson, légat du pape Innocent III. Ces statuts définissaient, essentiellement pour les arts libéraux (le droit est passé sous silence), des règles relatives à la durée des études, au programme et aux modalités d’examens. Plus généralement, ils reconnaissaient la communauté des « Maîtres et écoliers de Paris », ainsi que son autonomie garantie par l’autorité pontificale. 

     

     

    54. Sceau de l’Université de Paris au XIIIème siècle

    58. Sceau de l’Université de Paris au XIIIème siècle (au centre la Vierge, encadrée par Saint Nicolas de Myre, patron protecteur des écoliers, et par Sainte Catherine, patronne des écoliers, des nourrices et des notaires). 

     

    Le 13 avril 1231, la Bulle « Parens scientiarum universitas », émanant de la chancellerie du pape Grégoire IX, confirma l’autonomie de cette nouvelle communauté qu’elle désigna sous le mot latin d’ « Universitas » signifiant, à cette époque, compagnie, communauté, corporation, assemblée. Voici, la traduction de cette Bulle écrite en langue latine :

     

    Grégoire Evêque, serviteur des serviteurs de Dieu, A ses chers fils, tous les maîtres et étudiants de Paris, Salut et bénédiction apostolique. Paris, mère des sciences, comme une autre Cariath Sepher, cité des lettres, brille d'un éclat précieux, grande sans doute, elle fait attendre d'elle de plus grandes choses, grâce à ceux qui apprennent et à ceux qui enseignent (...) Aussi n'est-il pas douteux que celui qui, dans la cité susdite, se sera de quelque manière efforcé de troubler une grâce aussi éclatante ou celui qui ne sera pas opposé clairement et avec force à ceux qui la troublent, ne déplaise profondément à Dieu et aux hommes. C'est pourquoi, ayant considéré attentivement les problèmes qu'on nous a soumis à propos de discorde qui est née ici à l'instigation du diable et qui trouble gravement les études, nous avons, assisté du conseil de nos frères, pensé qu'il était préférable de les résoudre par un règlement sage plutôt que par une décision judiciaire. Ainsi, en ce qui concerne le statut des étudiants et des écoles, avons-nous décidé que l'on devra appliquer les règles suivantes: Celui qui sera choisi comme chancelier de Paris devra, lors de son institution, jurer devant l'évêque, ou à son mandement, dans le chapitre de Paris, en présence de deux maîtres convoqués pour cela et représentant de l'Université des étudiants, que pour le groupement de la théologie et des décrets, loyalement et selon sa conscience, il n'accordera la licence d'enseigner qu'à des hommes dignes en fonction du lieu et du moment, selon le statut de la cité, l'honneur et le renom des facultés, et la refusera aux indignes, toute considération de personne ou d'origine étant écarté. Avant d'accorder une licence à qui que ce soit, dans les trois mois à partir de la demande de licence, il devra faire examiner avec diligence tant par tous les maîtres en théologie présents dans la cité que par d'autres personnes honnêtes et cultivées, par lesquelles on peut connaitre la valeur, et ses ambitions et autres choses que l'on examine dans ces circonstances: ayant ainsi examiné ce qu'il convient de faire et ce qu'il parait opportun, en sous âme et conscience il donnera ou refusera au candidat la licence demandée. Quant aux maitres en théologie et en décret, lorsqu'ils commenceront à donner des leçons, ils prêteront serment en public de porter fidèlement témoignage sur les choses susdites. Le chancelier jurera aussi de ne révéler en aucun cas le propos des maîtres à leurs détriments, la liberté et le droit des chanoines de Paris demeurant dans leur vigueur initiale. Pour les médecins, les artistes, et les autres, le chancelier promettra d'examiner loyalement les maîtres et d'admettre les gens dignes à l'exclusion des indignes. Au reste, il est vrai que le mal se glisse facilement là ou règne le désordre, nous vous accordons le pouvoir d'établir de sages constitutions ou règlements sur les méthodes et horaires des leçons, des discussions, sur la tenue souhaitée, sur les cérémonies funéraires, sur les bacheliers: qui doit leur donner des leçons, à quelle heure et quel auteur choisir; sur la taxation des loyers et l'interdiction de certaines maisons; et le pouvoir de châtier comme il faut ceux qui se rebelleront conte ces constitutions ou règlements en les excluant (...). Celui qui aura commis un crime nécessitant l'emprisonnement sera détenu dans la prison de l'évêque, interdiction absolue étant faite au chancelier d'avoir une prison particulière. Nous interdisons en outre qu'un étudiant soit arrêté pour une dette, alors que cela est interdit par des décisions canoniques régulières. Ni l'évêque, ni son official ni le chancelier ne devront prononcer de peine pécuniaire pour relever d'une excommunication ou de quelque autre censure. Le chancelier ne devra exiger des maîtres auxquels il accorde la licence aucun serment, aucune marque de soumission ou autre caution et ne réclamera pour cet accord aucune somme d'argent ou obligation mais se contentera du serment indiqué plus haut. Nous interdisons formellement que les étudiants se déplacent en armes et que l'Université défende ceux qui troublent la paix et l'étude. ceux qui feignent d'être étudiants sans fréquenter les écoles ni avoir de maitres ne devront pas jouir des franchises (libertas) des étudiants (...). Que personne n'enfreigne cette décision, constitution, concession, défense et interdiction ou n'ose s'opposer à elle par une audace téméraire. Et si quelqu'un ose y attenter, qu'il sache qu'il encourra l'indignation de Dieu tout puissant et des bienheureux Pierre et Paul Apôtres. Donné au Latran, aux Ides d'avril, en la cinquième année de notre pontificat. Grégoire IX, Pape. 

     

     

    55. La répression contre les étudiants de 1229

      59. La répression contre les étudiants de 1229.

     

     

    Droit de grève. Les Maîtres et écoliers de l'Université de Paris avaient également obtenu le droit de faire grève. Ainsi, en 1229, des écoliers de l’Université de Paris contestèrent-ils à un cabaretier du faubourg Saint-Marcel le prix de la chope de vin. Celui-ci appela à la rescousse des voisins qui frappèrent les écoliers. Le lendemain, ces derniers revinrent armés de bâtons et frappèrent le tavernier et ses voisins. Le prieur de Saint-Marcel demanda à la régente Blanche de Castille de punir les coupables. Les sergents royaux tuèrent et blessèrent de nombreux étudiants dont certains étrangers à la rixe. Les Maîtres de l'Université exigèrent de la régente réparation, ce qu’elle refusa. Aussi les Maîtres et les écoliers de l’Université de Paris entreprirent-ils une grève mémorable de plusieurs mois. Sous la pression du pape, le jeune roi Louis IX accepta, en définitive, de payer une amende, et il fit jurer aux bourgeois et à l'évêque de ne jamais porter tort aux écoliers de l'Université. Les Maîtres et écoliers cessèrent leur grève et ils reprirent les cours. 


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    Sceau et devise de la Sorbonne

    60. Devise de la Sorbonne : Hic & ubique terrarum. Cette devise latine, du XIIème siècle, se traduit ainsi : Ici et partout sur la terre. Elle exprime l’autorité des Maîtres de l’Université de la Sorbonne (ses docteurs) tant à Paris que dans le monde entier.

     

     

    Rappelons deux événements. D’une part, au XIIème siècle, des écoles de la cathédrale Notre-Dame quittèrent l’Île de la Cité et le Petit-Pont pour s’installer sur la rive gauche de la Seine, au flanc de la montagne Sainte-Geneviève, donnant naissance à notre légendaire Quartier Latin (v. le chapitre VII : L’enseignement du droit à Paris au XIIème siècle). D’autre part, en août 1215, le pouvoir royal regroupa ces écoles parisiennes en une Communauté de Maîtres et écoliers, rebaptisée Université de Paris en 1223 (v. le chapitre VIII : La promulgation des statuts de l’Université de Paris). Dans ce contexte, les écoliers pauvres de Paris, natifs de la capitale ou venus d’ailleurs, devaient demander l’aumône pour survivre et étudier (v. le chapitre VI : La naissance du Quartier Latin au XIIème siècle). Cette situation dramatique incita des personnes généreuses à fonder des collèges destinés à donner le gite et le couvert aux écoliers démunis, originaires d’une même ville, d’un même diocèse ou d’une même province.

     

     

    Le collège de la Sorbonne en 1550 (François Alexandre Pernot)

                     61. Le collège de la Sorbonne en 1550 (François Alexandre Pernot)

     

    C’est ainsi qu’à Paris, sur la rive gauche de la Seine, on dénombrait 11 collèges avant 1300, 38 en 1350 et 46 en 1400. Parmi les plus anciens : le collège des Dix-Huit (1180) ; le collège de Sorbon (vers 1255); le collège des Bons-Enfants (1257) ; le collège d’Harcourt (1280) ; le collège de Cholet (1295) ; le collège du Cardinal Lemoine (1302) ; le collège de Navarre (1305) ; et les collèges de Laon et de Montaigu (1314). Ils ont tous été démolis. Certains d’entre eux ont été rebâtis au même emplacement ou ailleurs, avant d’être de nouveau détruits puis éventuellement rebâtis. Il ne reste le plus souvent de ces collèges que leur nom, leur histoire et, parfois, quelques estampes plus ou moins fidèles.

    À défaut d’avoir pu trouver une gravure des maisons formant le collège de Sorbon à son origine, voici un tableau de François Alexandre Pernot (1793-1865), qui représente le collège de Sorbonne en 1550 avant sa démolition et sa reconstruction entière une première fois en 1635 à la demande du cardinal de Richelieu, puis une seconde fois entre 1883 et 1901 avec les bâtiments dits de la « Nouvelle Sorbonne ». Ces reconstructions ont toujours eu lieu à l’emplacement même où, en 1257, Robert de Sorbon avait accueilli ses premiers écoliers dans l’ancienne rue Coupe-Gueule (rue de la Sorbonne).

     

     

     

     

    Messire Robert Sorbon Fondateur du Collège dit de Sorbone

                       62. « Messire Robert Sorbon Fondateur du Collège dit de Sorbone »

     

     

    Le décor étant en place, partons à la découverte de Robert de Sorbon, qui est à l’origine du collège de la Sorbonne et, de façon indirecte, de l’Université de Paris, communément appelée Université de la Sorbonne. Fils de paysans, il naquit en 1201 dans un village des Ardennes du diocèse de Reims, dont il prit le nom : Sorbon. Sans fortune, recourant à l’aumône, il fit ses études à Paris à la faculté des arts puis en théologie. Reçu maître en théologie vers 1235, il devint chanoine à Cambrais (1250) puis à Notre-Dame de Paris (1258), et clerc du roi Louis IX, plus connu sous le nom de Saint Louis.

     

     

     

     

     Rue Coupe-Gueule

    63. La rue Coupe-Gueule du collège de Sorbon (plan de Paris au XVIème siècle, Dheulland, 1756. Gallica BNF).

     

    Dans les années 1255, Robert de Sorbon, se souvenant de ses années d’écolier pauvre, conçut le projet de fonder un collège pour nourrir et héberger des étudiants démunis, maîtres ès-arts, désireux de suivre des enseignements menant au grade de maître en théologie. À cette fin, il acquit une première maison (il s’agissait d’une grange), en plein quartier des écoles, dans la rue Coupe-Gueule qui descendait de la rue des Poirées à la rue des Mathurins (son nom évoquait les brigandages nocturnes qui y avaient lieu). La rue Coupe-Gueule fut renommée, trois siècles plus tard, rue de la Sorbonne (actuellement, dans le 5ème arrondissement, entre la rue Cujas et la rue des Écoles, elle-même bordée par les bâtiments de l’université Paris Sorbonne).

    Les premiers boursiers purent s’installer en 1257 dans ce collège dont Robert de Sorbon assurait les fonctions de maître-régent et de proviseur. À l’origine, il comprenait des salles communes, une bibliothèque (plus de 1000 volumes en 1290), trente six chambres individuelles (non chauffées et sans vitres), ainsi qu’une chapelle (dès leur réveil, à cinq heures du matin, les écoliers devaient s’y rendre pour entendre la messe). La chapelle fut rebâtie en 1326 et de nouveau en 1347. De style  gothique en croix latine, elle était dédiée, semble-t-il, à Marie, à sainte Ursule et aux Onze Mille Vierges (ses fondations ont été retrouvées lors de la reconstruction de la Sorbonne sous la Troisième République).

     

     

     

     

    Un cours au collège de la Sorbonne

    64. Un cours au collège de la Sorbonne (enluminure du XVème siècle, Bibliothèque de Troyes).

     

    À l’origine, le collège de Robert de Sorbon, comme tous ceux de Paris au XIIIème siècle, se limitait au rôle d’hospitia, autrement dit de gite ou maison de charité, sans dispense de cours. Les écoliers hébergés, appelés boursiers, continuaient de suivre leurs enseignements supérieurs, dans la rue, comme la légendaire rue du Fouarre (v. le chapitre VI : La naissance du Quartier Latin au XIIème siècle), ou au domicile de leurs maîtres, par exemple, dans la rue du Clos-Bruneau, renommée plus tard rue Saint-Jean de Beauvais (v. le chapitre XII à venir : La Faculté de Décret, Rue Saint-Jean de Beauvais). Ce n’est qu’à la fin du XIVème siècle que les collèges se dotèrent de chaires d’enseignement leur permettant de dispenser eux mêmes des leçons à leurs boursiers ou à des écoliers du dehors.

     

     

     

    en 1257, Saint Louis remet à Robert de Sorbon la charte de fondation de la Sorbonne

     

    65. Côté gauche : en 1257, Saint Louis remet à Robert de Sorbon la charte de fondation de la Sorbonne. Côté droit : en 1469, le prieur du collège de la Sorbonne Jean Heynlin et le bibliothécaire du roi Louis XI installent dans les caves de la Sorbonne la première imprimerie de France (journal L’illustration. 30 avril 1887).

     

    Selon l’intitulé du journal L’Illustration du 30 avril 1887, cette peinture de François Flameng (1856-1923), qui décore, aujourd’hui encore, le péristyle du Gand Escalier de la Sorbonne, représente Robert de Sorbon recevant de Saint-Louis « la Charte de fondation de son collège ». Les termes sont impropres. Il s’agit plutôt de l’acte de donation par Saint-Louis de deux maisons au collège de Robert de Sorbon, ledit acte contenant une clause stipulant qu’elles devaient servir pour les écoliers y demeurant (« ad opus scolarium qui inibi moraturi sunt »). La fondation du collège de Sorbon correspond à l’accueil des premiers boursiers, quelques mois plus tard, sans doute, le 1er septembre 1257.

     

     

     

     

    Acte de la donation de Saint-Louis de maisons au collège de Robert de Sorbon

     

    66. Acte de la donation de Saint-Louis de maisons au collège de Robert de Sorbon (1257)

     

    Il n’en demeure pas moins que Saint Louis contribua amplement à l’œuvre de Robert de Sorbon. D’abord, en lui offrant, en février 1257, ces deux maisons qu’il avait récemment acquises dans la rue Coupe-Gueule devant le palais des Thermes (aujourd’hui musée nationale du Moyen Âge, aussi appelé musée de Cluny). Ensuite, en 1258, en permettant à Robert de Sorbon de poser des portes à chaque extrémité de la rue Coupe-Gueule (d’où son autre appellation : rue des Deux-Portes). Et, en 1259, en offrant à Robert de Sorbon un nouveau lot d’une dizaine de maisons qu’il possédait toujours dans la rue Coupe-Gueule. Avec l’aide d’autres généreux donateurs, comme Guillaume de Chartres, Robert de Sorbon put encore acquérir d’autres bâtiments et terrains aux abords de la rue Coupe-Gueule.

     

     

    Réunion des docteurs de l’Université de Paris au Moyen Âge

                67. Réunion des docteurs de l’Université de Paris au Moyen Âge (BNF).

     

    Robert de Sorbon bénéficia également du soutien moral des plus hautes autorités de l’Église désireuses de voir les jeunes maîtres ès arts de Paris poursuivre des études supérieures de théologie sans être arrêtés par leur pauvreté. Ainsi, en août 1259, son collège bénéficia de l’approbation du pape Alexandre IV. Puis, en 1262, le pape Urbain IV le recommanda à la générosité des fidèles en accordant cent jours d’indulgence à tous ceux qui lui viendraient en aide. Et, dans une lettre du 3 mars 1268, le pape Clément IV prit le collège sous sa protection tout en lui octroyant les garanties canoniques.

    Ces lettres papales emploient systématiquement les mots Université de Paris pour évoquer le seul collège de Sorbon alors même que celui-ci n’était que l’un des nombreux collèges formant l’Université des Maîtres et écoliers de Paris (il y aurait eu, au Moyen Âge, 3 000 à 4 000 étudiants accueillis dans les collèges et les écoles de la montagne Sainte-Geneviève, du faubourg Saint-Germain et du Quartier Latin). Il en est ainsi de la lettre du pape Clément IV, adressée en 1268 « aux proviseurs des pauvres maîtres et à ces maîtres eux-mêmes, étudiants à la faculté de théologie et vivant ensemble, en vie commune, dans la rue aux portes, devant le palais des Termes à Paris ». Dans cette lettre, le pape, après avoir rappelé le but poursuivi par Robert de Sorbon et renouvelé ses encouragements et approbations, détermine les relations entre l’autorité papale et l’Université de Paris dans son ensemble, et le fonctionnement de celle-ci. Le pape fixe notamment les modalités de désignation des successeurs de Robert de Sorbon « par un collège électoral composé de l’archidiacre, du chancelier de Paris, des maîtres régents de la faculté de théologie, des doyens de droit et de médecine, du recteur de l’Université et des procureurs des quatre nations ». En somme, dès la constitution du collège de Robert de Sorbon, les mots Sorbon ou Sorbone (Sorbonne plus tardivement) évoquaient la faculté de théologie de Paris et, plus largement encore, l’Université de Paris avec tous ses collèges et les quatre disciplines enseignées : Arts libéraux, Théologie, Médecine, et Décret, c’est-à-dire le droit canon (v. le chapitre X : La Faculté de Décret de la Sorbonne).

    Depuis, cet usage s’est perpétué sans interruption et, aujourd’hui, les universités de Paris s’attachent à intégrer à leur appellation officielle le nom « Sorbonne » connu dans toute l’Europe depuis le Moyen Âge lorsque l’Université de Paris était aussi célèbre que les universités de Bologne, d’Oxford, de Cambridge ou de Salamanque. Ainsi en est-il de l’université Paris I Panthéon Sorbonne et, depuis un décret n° 2017-596 du 21 avril 2017, de l’université Sorbonne Université :

     

    Article 1.  L'université Sorbonne Université est un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel constitué sous la forme d'une université au sens de l'article L. 711-2 du code de l'éducation… Article 2. L'université Sorbonne Université assure l'ensemble des activités exercées par les universités Paris-IV et Paris-VI qu'elle regroupe… Les étudiants inscrits dans les universités Paris-IV et Paris-VI sont inscrits à l'université Sorbonne Université…

     





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