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    XV. Refus de Cujas d’une chaire à l’Université de Paris en 1576

             

           106. Le Corpus Juris Civilis, objet du droit civil ou romain dont l’enseignement fut interdit à Paris de 1219 à 1679. Les amateurs éclairés peuvent consulter et télécharger en PDF le Corpus Juris Civilis, dans sa traduction française, sur le Portail Numérique d’Histoire du Droit : (http://www.histoiredudroit.fr/corpus_iuris_civilis.html). 

     

                       L’enseignement du droit civil, à savoir des éléments de droit romain, réunis, au VIème siècle, à l’initiative de l’empereur Justinien dans le Corpus juris civilis (Codex lustinianus ; Digeste ; Institutes ; Novelles),  avait été interdit à Paris, en 1219, par la décrétale Super speculam d’Honorius III (v. chapitre X: La Faculté de Décret de la Sorbone). Aussi, les jeunes escholiers de l’Université de Paris, qui se destinaient à l’avocature ou désiraient acquérir une charge de juge, devaient-ils étudier le droit civil, aussi appelé droit romain, en province (v. chapitre XI: Les étudiants de Paris à l’Université des Lois d’Orléans), ou à l'étranger (v. chapitre X précité).

     

     

    Jacques Cujas (1522-1590). Gravure ancienne

          107. Jacques Cujas (1522-1590). Gravure ancienne (gallica.bnf.fr)

     

           Au XVIème siècle, Jacques Cujas (son vrai nom était Jacobus Cujaüs), l’un des plus grands jurisconsultes français, surnommé « le prince des romanistes », était un professeur de droit civil ou romain, qui dispensait ses enseignements dans les meilleures universités (Toulouse, Cahors, Bourges, Valence, et Turin). L’Université de Paris lui offrit une chaire de droit après que Parlement eut levé, en sa faveur, l’interdiction d’enseigner le droit civil à Paris. Mais Jacques Cujas refusa cette chaire de droit, ainsi que celle que lui offrait le pape Grégoire XIII à l’Université de Bologne.  

                                                                                                                      Voici l’arrêt du Parlement de Paris du 2 avril 1576 qui leva l’interdiction d’enseigner le droit civil dans la capitale en faveur de Jacques Cujas. Cet arrêt, qui ne se trouve imprimé nulle part, est tiré du Registre du Conseil contenant les arrêts rendus depuis le 27 janvier jusqu’au 18 avril 1676. En saisissant le texte, j’ai conservé l’orthographe de l’époque notamment la lettre « f » à la place de la lettre « s ». Cela donne, par exemple, Univerfité au lieu d’Université. Les pluriels sont aussi étonnants : régent au singulier, régens au pluriel !

     

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                          ARREST DE LA COUR DE PARLEMENT

     

    Qui permet à Jacques Cujas, Docteur-Régent en Droit Civil en l’Univerfité de Bourges, de faire des lectures en Droit Civil en l’Univerfité de Paris, et d’y donner les Degrés avec les Docteurs-Régens en Droit Canon.

     

               Du 2 avril 1576

     

    Extrait des Registres de Parlement

     

    Sur ce que le Procureur Général du Roi a remontré à la Cour que Monsieur Jacques Cujas, Docteur-Régent en Droit Civil en l’Univerfité de Bourges, s’eft depuis peu de tem en ça, en cette ville de Paris, fuivant le commandement du Roi, pour les troubles qui font de préfent audit Bourges, & d’autant que ledit Cujas eft (comme la Cour fçait) Perfonnage de grande & fingulière doctrine et condition, & qu’il y a plufieurs jeunes hommes de bonne Maifon, tant de ceux qui l’ont fuivi de ladite ville de Bourges que autres, lefquels pour le danger du tems & des Chemins n’ofent aller aux autres Univerfités. A ces causes a fupplié la Cour, vû les troubles qui font a préfent en ce Royaume, vouloir permettre audit Cujas la lecture publique en Droit Civil, fuivant même le commandement qu’en fait le Roi audit Cujas, & fans néanmoins que cela puisse être tiré a conféquence pour les autres faculté de cette Ville de Paris, ni aux autres Univerfités de ce Royaume, ou autrement y être pourvu comme la Cour le fçaura faire par fa prudence, la matière mife en délibération, & tout confidéré :

    La dite Cour, Attendu la qualité du tems, & fans tirer à conféquence, à permis et permet audit Cujas faire lecture et profeffion en Droit Civil en l’Univerfité de Paris, à tels jours et heures qu’il fera par lui avifé, avec les Docteurs-Regens en Droit Canon en cette Ville ; permettant audit Cujas & Docteurs donnés les Degrés à ceux qu’ils trouveront avoir fait Cours le tems requis ; & felon que par l’examen ils les auront trouvé capables : validant ce qui aura été fait en cette part, comme fi fait avoir été en l’une des autres Univerfités fameufes de ce Royaume.

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    La cité de Bourges au Moyen Âge

                                    108. La cité de Bourges au Moyen Âge

     

       Jacques Cujas préféra retourner à Bourges, suivi de nombreux de ses étudiants qui le vénéraient. L’Université de Bourges, dont la création avait été décidée en 1463 par le roi Louis XI (lui-même né à Bourges en 1423), puis autorisée, le 12 décembre 1464, par le pape Paul II, fut effective vers 1470. Cette Université était surtout spécialisée dans l’enseignement du droit civil ou romain.

     

     

     

    Portrait d'Andrea Alciato (1492-1550) par Ambrosius Benson

    109. Portrait d'Andrea Alciato (1492-1550) par Ambrosius Benson (musée des Beaux-Arts d'Angers).

     

         C’est notamment sous l’influence d’un professeur de renom, Andrea Alciato ou Alciati, dit Alciat, arrivé à Bourges en 1529, que la Faculté de Droit de l’Université de cette ville avait mis en place une nouvelle manière d’enseigner le droit romain, connue sous le nom d’humanisme juridique (Andrea Alciato fut également professeur de Droit romain à Avignon, Bourges, Milan, Pavie, Bologne et Ferrare). 

     

     

     

    Livre d’Emblèmes d’Andrea Alciato

    110.  Livre d’Emblèmes d’Andrea Alciato (édition italienne, 1549. Bibliothèque municipale de Lyon). Andrea Alciato avait introduit dans ses méthodes d’enseignement les livres d’Emblèmes (Emblematum Liber de Alciato), en vogue depuis le XVème siècle dans la littérature populaire. Chaque emblème se compose, d’une part, d’un titre sous forme d’un proverbe, d’une maxime, d’un adage ou d’une courte règle de droit, d’autre part, d’une image (gravure sur bois ou métal) en relation avec le titre, enfin, d’un texte explicatif où l’auteur décrit l’image en relation avec le titre et donne une leçon (Hum, Hum,…, j’ai quand même l’impression que mon blog « Nos facultés de Droit » en images et cartes postales anciennes est un lointain héritier de ce genre).

     

      La notion d’humanisme juridique est très difficile à comprendre et plus encore à expliquer (surtout pour l’auteur de ces lignes après plusieurs tentatives infructueuses au brouillon !). En peu de mots, il s’agissait d’enseigner les lois romaines en considération de l’évolution historique, en rétablissant pour chacune d’elles leur version d’origine (pour une approche plus sérieuse, je vous invite à lire l’article, consultable et téléchargeable en free access, du professeur Patrick Gilly de l’Université de Montpellier : « Humanisme juridique et science du droit au XVème siècle » : https://www.yumpu.com/fr/document/view/16715528/humanisme-juridique-et-science-du-droit-au-xv-siecle). 

     

     

    XV. Refus de Cujas d’une chaire à l’Université de Paris en 1576

                111. Portrait de Jacques Cujas (peinture anonyme, vers 1564).

     

       Jacques Cujas, souvent présenté comme le plus grand humaniste juridique français, avait déjà enseigné à l’Université de Bourges, en 1556 et 1557, puis de nouveau de 1560 à 1566. C’est donc bien naturellement qu’il refusa le poste de professeur de droit romain que lui offrait l’Université de Paris pour revenir enseigner à Bourges où il termina sa carrière (1575-1590).

        Il fallut attendre le XVIIIème siècle pour que des professeurs de la Faculté de Droit de Paris introduisent, à leur tour, la méthode historique dans leurs enseignements du droit romain. Il s’agissait de Claude-Joseph de Ferrière (1666-1747), Jean Dugono (décédé entre 1722 et 1732), et Mathieu-Antoine Bouchaud (1719-1804).

     

     

    Maison de Jacques Cujas à Bourges, aujourd’hui Musée

    112. La maison de Jacques Cujas à Bourges, devenue Hôtel Cujas, puis aujourd’hui Musée.

     

          De retour à Bourges, en 1575-1576, Jacques Cujas y acheta cette belle maison où il demeura jusqu’à sa mort en 1590. 

     

    à suivre...


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     Collège Royal place Cambrai en 1680

     

    113. Vue du Collège Royal, en 1683, après sa première restauration, place Cambrai. Aujourd’hui, le Collège Royal, devenu Collège de France, se situe, au même endroit que l'ancienne place Cambrai: rue Saint-Jacques, en face de la Sorbonne, et, en façade sur la place Marcelin Berthelot et la rue des Écoles. Le Collège Royal a été bâti en 1610 à l’emplacement de l’ancien collège « des Trois Evêques », rebaptisé collège de Cambrai. Ce dernier avait été construit en 1348 par Guillaume d’Auxonne, évêque de Cambrai, Hugues d’Arcy, évêque de Laon, et Hugues de Pomard, archevêque de Reims, pour sept étudiants originaires de leur diocèse. 

     

       Le 18 septembre 1600 des statuts pour la Faculté de Droit canon de Paris furent publiés par Henri IV, en lieu et place de ceux de l’Université de Paris, proclamés en 1452 par le cardinal d’Estouteville. Ces nouveaux statuts régirent l’Université de Paris pendant 160 ans. Le nombre des professeurs de droit canon y fut fixé à six. Quatre devaient dispenser leurs cours aux écoles de la rue Saint-Jean-de-Beauvais (v. chapitre XII: La Faculté de Décret, rue Saint-Jean de Beauvais). Deux autres au collège de Cambrai qui avait été acheté, en 1610, par la Couronne pour bâtir le Collège Royal.

     

     

    Plan du quartier du Collège Royal et du collège de Cambrai (1700)

    114. Plan du quartier du Collège Royal et du collège de Cambrai (1700).

     

     

     

          Au risque de décevoir le visiteur de ce blog, je n’ai pas trouvé d’images du collège de Cambrai dont il ne subsiste rien des bâtiments ! Quant aux images du Collège Royal reproduites dans ce chapitre, elles sont toutes postérieures à sa première restauration de 1683 (c’est à l’âge de neuf ans, le 28 août 1610, que Louis XIII posa la première pierre du Collège Royal).  

       Tout au plus, voici un plan, en date du 1er janvier 1700, du quartier du Collège Royal et du collège de Cambrai (source : gallica.bnf.fr). L’archiviste de la Bibliothèque Nationale de France a apposé en bas de ce plan les mots : « Collège Royal de Cambrai ».

     

     

     

    Louis XIV. Peinture de Charles Le Brun, vers 1662

    115. Louis XIV, roi de France et de Navarre (1638-1715). Portrait en buste et en cuirasse de Charles Le Brun (1619-1690), vers 1662, Versailles, châteaux de Versailles.

     

     

     

         L’interdiction de l’enseignement du droit civil à Paris par la décrétale Super speculam d’Honorius III de 1219 (v. chapitre X: La Faculté de Décret de la Sorbone), fut levée, en avril 1679, par l’édit de Saint-Germain du roi Louis XIV « portant règlement pour l’estude du Droit canonique et civil ».  L’article premier de cet édit énonce : « Dorénavant, les leçons publiques de droit romain (ou droit civil) seront rétablies dans l’Université de Paris, conjointement avec celles de droit canonique, nonobstant l’article 69 de l’ordonnance de Blois et autres ordonnances, arrêts et règlements à ce contraires, auxquels nous avons dérogé à cet égard ».

     

     

    XVI. La Faculté des Droits au Collège Royal en 1680

     

    XVI. La Faculté des Droits au Collège Royal en 1680

    116 & 117. Édit de Saint-Germain du roi Louis XIV « portant règlement pour l’estude du Droit canonique et civil ».

     

     

     

     

    Un professeur de Faculté de droit sous l'Ancien Régime

       118. Un professeur d'une Faculté de droit (peinture non datée)

     

     

        L’édit de Saint-Germain ne se limite pas à la levée de l’interdiction de l’enseignement du droit civil à Paris. D’autres mesures sont prises concernant l’ensemble des Facultés de droit du royaume. Ainsi le mode de recrutement des professeurs de droit canonique et de droit romain est modifié (recrutement par concours), et leur nouveau statut permet qu’ils accèdent à la magistrature après vingt ans d’enseignement. En outre, un enseignement de droit français, en langue française, est créé dans chaque Faculté au côté des enseignements du droit canonique et du droit romain, qui restent dispensés en langue latine. L’édit de Saint-Germain définit, à cette occasion, le droit français comme celui contenu dans nos ordonnances et coutumes ainsi que dans les principes de la jurisprudence française.

     

     

     

    Pothier (portrait, signé A. Perrodin. 1865)

    119. Un professeur royal de droit français : Robert Joseph Pothier (portrait, signé A. Perrodin, ornant un plafond du Palais de Justice de Cahors, inauguré en 1865).

     

     

        L'enseignement de droit français est confié, dans toutes les Facultés de droit, à des professeurs royaux choisis par le chancelier sur proposition des procureurs généraux parmi les praticiens, avocats ou juges royaux. Cette mesure mécontenta fortement les professeurs de droit canonique et de droit romain désormais recrutés par un concours soumis au contrôle de l’Université.

       Je n’ai pas trouvé d’images anciennes d’un professeur royal de droit français de l’Université de Paris. Peut-être parce que nos plus grands jurisconsultes de l’Ancien Régime sont souvent restés étrangers à l’Université, comme Mathieu Molé, Michel de L'Hospital, Henri François d'Aguesseau, Charles Dumoulin, Jacques de Maleville et Merlin. Il est vrai que les rémunérations n'étaient guère alléchantes et qu'ils pouvaient trouver de la part des professeurs de droit canonique et de droit romain recrutés par concours un accueil désagréable (les dotations publiques et le montant des droits d'inscription des étudiants aux examens, sources de la rémunération des professeurs en poste à la Faculté de droit n'étant pas augmentés, la nomination de professeurs de droit français s'accompagnait automatiquement d'une réduction des rémunérations de l'ensemble des professeurs).

        Toutefois, du côté des Facultés de province, il pouvait en être autrement. Christian Chène dans son ouvrage publié en 1982 à la Librairie Droz de Genève: " L'enseignement du droit français en pays de droit écrit de 1679 à 1793", cite plusieurs professeurs de droit français nommés par voie de postulation: Jean-Baptiste Reboul, Antoine de Martres, Henri Casseirol, Guillaume Crozat.

        Mais il convient surtout de citer Robert Joseph Pothier (1699-1772), l'un de nos plus grands jurisconsultes devenu professeur royal. En effet, échevin (magistrat) du présidial (tribunal de justice de l'Ancien régime) de la ville d'Orléans, il obtint de Louis XV, par l'entremise de d'Aguesseau, la chaire de professeur de droit français à l'université d'Orléans.

     

    La Faculté de Décret de l'Université de Paris. Marcel Fournier

    120. De la Faculté de Décret à la Faculté des Droits. Les amateurs éclairés peuvent consulter, en free access sur gallica.bnf.fr, les trois volumes de l’ouvrage, rédigé en grande partie en latin [les annotations sont en langue française], par Marcel Fournier : « La Faculté de Décret de l’Université de Paris au XVème siècle ». 

     

      En application de l’édit de Saint-Germain, la Faculté de Décret de l’Université de Paris, créa des chaires de droit civil, et prit le nom de Faculté des Droits (droit civil, droit romain et droit françois [français]). À la différence d’universités étrangères, ni le droit criminel, ni le droit public, ni le droit des gens ne faisaient l’objet d'enseignements.

     

     

    Le Collège Royal (gravure de Claude Chastillon, datée 1612)

    121. Le Collège Royal (gravure de Claude Chastillon, datée 1612).

     

      

       En 1680, la Faculté des Droits fut logée, à titre provisoire, dans le Collège Royal (actuellement Collège de France), héritier du Collège de Cambrai. Ce privilège dura près d'un siècle jusqu'à ce que Louis XV, par lettres patentes du 16 novembre 1753, ordonne la construction d'un édifice convenable et suffisant pour accueillir les étudiants et leurs professeurs (à cette époque, les professeurs disposaient de logements dans leurs Facultés d'affectation). 

     

     

    Lettres patentes de François Ier

                         122. Lettres patentes de François Ier (1530)

     

       Le Collège de France a connu diverses appellations (Collège Royal, Collège Impérial…). Il doit sa création à François Ier qui nomma, par lettres patentes du 24 mars 1530, les premiers Lecteurs royaux chargés d’enseigner des disciplines non admises à l’Université. Pendant plusieurs années, ces Lecteurs royaux firent cours un peu partout, faute d’un bâtiment dédié. Puis, le roi Henri II (1519-1559) leur assigna la salle commune des collèges de Cambrai et de Tréguier (mitoyen du collège de Cambrai). Ces collèges furent rachetés par la Couronne royale, pour être détruits et permettre la construction, sur leur emplacement, du Collège Royal. 

     

     

    Le Collège de France (dessin du XIXème siècle)

                123. Le Collège de France (dessin du XIXème siècle)

     

        Après le départ de la Faculté des Droits pour le nouveau bâtiment de la place du Panthéon à la fin du XVIIIème siècle, le Collège Royal, devenu Collège de France, connut d’importantes transformations. C’est notamment, sous la Monarchie de juillet (1830-1848), que des décisions majeures furent prises à son égard. D’une part, avec un doublement de son budget annuel. D’autre part, avec la création des chaires emblématiques d’ « Économie politique » (pour Jean-Baptiste-Say), de « Législations comparées » (pour Eugène Lerminier), ou d’ « Archéologie » (pour Jean-François Champollion). Enfin, avec une restauration complète de ses bâtiments (ceux qui veulent en savoir plus peuvent consulter, en free access, sur le site « Livraisons d’Histoire de l’Architecture », l’article d’Olivier Lefranc: « L’agrandissement des installations du collège de France sous la monarchie de juillet » (https://lha.revues.org/410).

     

     

    Affiche d’une conférence avec Madame le Professeur Mireille Delmas-Marty

    124. Affiche d’une conférence avec Madame le Professeur Mireille Delmas-Marty. Jeudi 11 mai 2017.

     

     

      Aujourd’hui, les Lecteurs royaux du Collège sont devenus un corps de 47 professeurs titulaires de chaires dans diverses disciplines scientifiques, littéraires et artistiques. En ce qui concerne le domaine du droit, on notera que Madame Mireille Delmas-Marty, professeur des universités (Lille-II, Paris-XI, Paris-I), fut titulaire au Collège de France de la chaire « Études juridiques comparatives et internationalisation du droit ». Madame Mireille Delmas-Marty est, actuellement, professeure honoraire du Collège de France et membre de l’Académie des sciences morales et politiques (Youtube met en ligne de nombreuses vidéos dédiées à cette universitaire). 

     

     

    à suivre…

     


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    Sceau de Léonis de Gavi, 1864

      125. Sceau : la matrice et l'empreinte sur de la cire  (source : Trésors de cire. Sceaux et actes scellés de la Bibliothèque Nationale de France. https://sceau.hypotheses.org/category/billets).

     

     

    - C’est quoi un sceau ?

     

    - Pour le savoir, il suffit de le demander à un sigillographe.

     

    - J’veux bien, mais c’est quoi un sigillographe ?

     

    - C’est un spécialiste des sceaux.

     

    - Où qu’ça se trouve ?

     

    - Y’en a plein dans le Vocabulaire international de sigillographie, publié en 1990 sous l’égide du Conseil international des Archives. L’un d’entre eux donne même une définition du sceau que je vous rapporte telle qu’elle : « Au sens général du terme, le sceau désigne une empreinte obtenue par l’apposition d’une matrice présentant des signes propres à une autorité ou une personne physique ou morale, en vue de témoigner de la volonté d’intervention du sigillant. De façon courante, il désigne l’empreinte imprimée sur de la cire ou sur une autre matière molle (glaise, papier, etc.), par opposition à la bulle imprimée sur une matière métallique. Par extension, le sceau peut aussi désigner la matrice d’où est tirée cette empreinte ».

     

    - D’accord, mais quel est le rapport du sceau avec un blog dédié aux facs de droit en images et cartes postales anciennes qui n’intéresse personne d’autre que son auteur ?

     

    - Parce que cet auteur est tombé par hasard sur une image du sceau de l’Université de Paris du Moyen Âge et qu’il a voulu la caser quelque part sur son blog pour se faire plaisir. Il a donc rédigé un nouveau chapitre ad hoc de sa monumentale étude imagée de l’histoire de la Faculté de Droit de Paris, qu’il a intitulé : « Sceaux de l’Université et de la Faculté de Droit de Paris. » Quant à ceux que ça n’intéresse pas, je rappellerai les mots de Louis Pergaud dans sa préface de La guerre des boutons : « Personne n’est obligé de me lire ».

     

    - Bon, je commence.

     

    XVII. Sceaux de l’Université et de la Faculté de Droit de Paris

    126. Collection de sceaux (Jules Charvet, Description des collections de sceaux-matrices de M. E. Dongé, Paris, par l’auteur, 1872, 357 p.

     

        Les sceaux étaient très en vogue au Moyen Âge. En nous limitant au domaine juridique, on mentionnera le sceau juridictionnel qui conférait aux contrats une valeur manifeste et définitive, un peu à la manière de la manus publica du notaire méridional (R.-H. Bautier : Origine et diffusion du sceau de juridiction. Comptes-rendus de l’Académie des inscriptions et des belles-lettres, 115ème année, n° 2, 1971, p. 304). Mais on évoquera surtout les sceaux des Universités et de leurs Facultés, puisque c’est l’objet du chapitre !

     

    Premiers statuts, avec un sceau attaché, de l'Université de Paris, octroyés, en août 1215

     127. Premiers statuts, avec un sceau attaché, de l'Université de Paris, octroyés, en août 1215, par Robert de Courson, légat du pape Innocent III.  

     

    Les sceaux des Universités ou des Facultés permettaient de sceller leurs divers actes manuscrits « officiels » en leur conférant certaines valeurs d’authenticité, de validité ou de prestige L’empreinte de la matrice était apposée, d’une part, sur les statuts constitutifs de ces institutions, d’autre part, sur les documents en papier relatifs aux examens, diplômes, soutenances de thèses de doctorat, ou nomination de professeurs, enfin, sur les écrits adressés aux autorités civiles et ecclésiastiques. Souvent, le sceau était « appendu » au manuscrit, c’est-à-dire pendu ou attaché.

     

    Grand sceau de l’Université de Paris, 1292

    128. Grand sceau de l’Université de Paris, 1292 (Bronze florentin, 88 mm. Site marchand).

       

    Au centre la Vierge, encadrée par Saint Nicolas de Myre, patron protecteur des écoliers, et par Sainte Catherine, patronne des écoliers, des nourrices et des notaires. Les Docteurs et étudiants, enseignant ou lisant, représentés en dessous de la Vierge, symbolisent les quatre Facultés (Arts libéraux, Théologie, Médecine, et Décret). Celle de Décret est placée sous la Vierge, en première ligne, du côté droit de l’image.

     

    Grand sceau de l’Université de Paris, 1292 (verso)

             129. Grand sceau de l’Université de Paris, 1292 (verso)

     

     

    Petit sceau de la Faculté de Décret de Paris (1398)

              130. Petit sceau de la Faculté de Décret de Paris (1398)

     

    Chacune des quatre Facultés de l’Université de Paris disposait également d’un sceau qui leur était propre (les institutions pouvaient bénéficier de Grands Sceaux et de Petits Sceaux). Voici le Petit sceau de la Faculté de Décret (enseignement du droit canon) qui deviendra Faculté des Droits avec la levée de l’interdiction de l’enseignement du droit civil ou romain à Paris (v. chapitre XVI : La Faculté des Droits au Collège Royal en 1680).

     

    Sceau de la nation d’Angleterre appendu à un acte daté du 14 juin 1342

    131. Sceau de la nation d’Angleterre appendu à un acte daté du 14 juin 1342.

     

    Au XIIIème siècle, les maîtres et étudiants des universités du royaume étaient regroupés par affinités géographiques en quatre nations. La nation de France dont les membres étaient issus du centre et du sud de la France, de l’Italie et de la péninsule ibérique. La nation Normande qui réunissait les maîtres et étudiants de la province de Rouen et les Bretons (v. chapitre  XIV: Saint Yves, étudiant en droit à Paris et Orléans vers 1270). La nation de Picardie pour ceux du nord et de l’est de la France, ainsi que ceux originaires des Pays-Bas. La nation d’Angleterre pour les membres issus des îles britanniques, des pays scandinaves et du Saint-Empire romain-germanique. 

    Chacune de ces nations, dans leurs universités respectives, tenait des assemblées délibératives (les registres conservés à la bibliothèque de la Sorbonne en gardent la trace), et elles étaient dotées d’un sceau. Voici celui de la nation d’Angleterre. Le sceau de la nation Normande est présenté dans le chapitre XIV précité (image n° 191).

     

     

    à suivre…


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    XVIII. J.-G. Soufflot, l’étudiant en droit devenu architecte

    132. Jacques-Germain Soufflot, l’architecte du Panthéon et de l’École de Droit.

     

     

     

           « Le droit mène à tout… à condition d’en sortir ». Dans leur première jeunesse, des gens de lettres (Molière, Corneille, Boileau, Voltaire, Balzac ...), des artistes peintres (Degas, Bonnard…), des prédicateurs (Lacordaire…), des artistes de variétés (Jean Nohain, Sylvie Joly…), et des hommes politiques (Mitterrand, Sarkozy…), ont étudié le droit, avec ou sans enthousiasme (Le droit mène à tout à condition d'en sortir). Ils ont obtenu leur grade ou diplôme de bachelier en droit, après deux années d’études, et celui de licence en droit après une année supplémentaire. Certains d’entre eux ont prêté serment d’avocat. Quelques uns ont commencé à plaider.

    Mais, dans leur deuxième jeunesse, succombant à d’autres passions, pour le plaisir ou pour la peine, ils ont abandonné leurs codes de lois et leur robe noire d’avocat à trente trois boutons.

    Cette cohorte de gens célèbres, défroqués du droit, peut encore accueillir en son sein un grand architecte du XVIIIème siècle, dont le chef d’œuvre « immortel », au cœur de notre Quartier Latin, reste l’Église Sainte-Geneviève (devenue le Panthéon en 1791), à l’opposé de l’École de droit dont il dessina également les plans. Il s’agit de Jacques-Germain Soufflot (1713-1780). Ses cendres reposent au Panthéon, à proximité de l’École de Droit qu’il acheva de son vivant et dont il fut le seul auteur (il mourut dix ans avant d’avoir pu terminer la construction de la nouvelle église Sainte-Geneviève).

     

     

     

     

    XVIII. J.-G. Soufflot, l’étudiant en droit devenu architecte

    133. De l’assiduité des jeunes étudiants provinciaux aux cours de la Faculté de Droit de Paris (Lettre extraite de l’ouvrage de Louis Rousselet, Nos grandes écoles militaires et civiles. Paris Hachette. 3ème édition. 1892. Le septième chapitre, p. 444 et s., est consacré à l’École de Droit. L’ouvrage est en libre accès sur le site gallica.bnf.fr). 

     

     

     

    Une légende invérifiable attribue à Jacques-Germain Soufflot la qualité d’étudiant en droit. D’abord à Auxerre où il aurait suivi des leçons au domicile d’un docteur en droit selon un usage de l’époque. Puis à Paris, sans doute au Collège Royal qui hébergeait alors la Faculté des Droits (peu assidu aux leçons des droits civil, romain et français, il aurait profité de son séjour dans la capitale pour étudier le dessin et l’architecture).

    Jacques-Germain Soufflot aurait commencé ses études de droit pour faire plaisir à son père, Germain Soufflot (1687-1758). Celui-ci avocat au parlement de Bourgogne et lieutenant au bailliage d’Irancy, près d’Auxerre, souhaitait transmettre cette charge à son fils (le bailliage était un tribunal qui rendait la justice dans l'étendue d'un certain ressort relevant d’un parlement, et sous la présidence d’un officier royal de robe longue, appelé bailli).  

    Mais, passionné d’architecture, Jacques-Germain Soufflot abandonna ses études de droit, déroba à son père un sac comportant plus de 1000 livres, et s’enfuit du domicile familial d’Irancy pour rejoindre l’Italie. Il y étudia, jusqu’en 1738, l’Antiquité romaine et l’architecture moderne.

    De retour en France, Jacques-Germain Soufflot s’installa à Lyon, où il fut architecte municipal, avant de rejoindre, en 1754, Paris, où il devint membre de l’Académie royale d’architecture, contrôleur du département de Paris de la direction des bâtiments du Roi, directeur de la manufacture des Gobelins, et architecte en chef de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris.

    C’est sa charge de contrôleur du département de Paris qui lui valut d’être choisi par le marquis de Marigny, surintendant des bâtiments du Roi, de 1751 à 1773, pour le chantier de la nouvelle église Sainte-Geneviève, financée par le produit d’une loterie royale (en 1744, Louis XV, atteint d’une grave maladie, avait fait le vœu de consacrer à Sainte-Geneviève, patronne de la capitale et de la monarchie, une nouvelle église en cas de guérison. Celle-ci advenue, il tint parole).

    Jacques-Germain Soufflot devait encore aménager devant cette église, une place semi-circulaire s’ouvrant sur une voie percée en son centre et reliant le Jardin du Luxembourg. Cette voie, qui deviendra la rue Soufflot, devait être encadrée de deux édifices, l’un affecté à l’École de Droit, l’autre destiné à accueillir une École de Théologie.

    L’École de Droit fut achevée en 1774 par Jacques-Germain Soufflot lui-même, la nouvelle église Sainte-Geneviève en 1790, dix ans après sa mort, et l’École de Théologie ne vit jamais le jour. 

     

     

     

     

    Pose de la première pierre de l’église Sainte-Geneviève. Pierre-André Demachy

    134. Pose de la première pierre de l’église Sainte-Geneviève (huile sur toile de Pierre-André Demachy, 1764. Paris, musée Carnavalet).

     

     

     

    Le 6 septembre 1764, le roi Louis XV, en présence du dauphin, du marquis de Marigny, et de Jacques-Germain Soufflot, vint poser la première pierre de la nouvelle église Sainte-Geneviève. À cette occasion, avait été édifié sur la place, un trompe-l’œil grandeur nature, en toile et charpente de bois, du porche et du portique de la future église Sainte-Geneviève sans son dôme.

     

     

     

     

    La nouvelle église Sainte-Geneviève (1795)

                        135 La nouvelle église Sainte-Geneviève (1795).

     

     

     

    Ce tableau représente la nouvelle église Sainte-Geneviève (Panthéon), à dôme en forme de croix, dont les travaux, commencés dans les années 1760, ne purent être achevés qu’en 1790, après la mort de Soufflot, par l’ingénieur Jean-Baptiste Rondelet, l’un des collaborateurs de Jacques-Germain Soufflot.

     

    Panthéonisation (le mot Panthéon vient du grec pántheion qui signifie « de tous les dieux »). Sur le fronton de l’édifice on peut lire : « Aux grands hommes la patrie reconnaissante ». Cette inscription faisait suite à un décret du 4 avril 1791 qui avait décidé que l’édifice, non encore consacré comme église, serve de nécropole aux Grands Hommes de France.

     C’est ainsi que sont entrés au Panthéon des gens de lettres (Voltaire, Rousseau, Victor Hugo, Zola, Alexandre Dumas), des scientifiques (Marcelin Berthelot, Marie et Pierre Curie…), des politiques (Sadi Carnot, Jean Jaurès, Simone Veil le 1er juillet 2018…), et des résistants parmi lesquels René Cassin qui fut professeur agrégé de la Faculté de Droit de Paris (Professeur René Cassin).

     

    Dualité des fonctions. Tout au long du XIXème siècle, le Panthéon a oscillé entre deux fonctions : d’une part religieuse comme église catholique, d’autre part laïque en tant que temple civique dédié à la célébration des Grands Hommes (depuis, 1885, année de l’entrée de Victor Hugo au Panthéon, l’église Sainte-Geneviève n’existe plus). Ainsi l’inscription sur son fronton : « Aux grands hommes la patrie reconnaissante », a-t-elle été supprimée puis restituée trois fois dans les trente années qui suivirent la Révolution !

     

     

     

     

     

    La rue Soufflot et le Panthéon

                                    136. La rue Soufflot et le Panthéon

     

     

     

    De gauche à droite. L’École de Droit, l’église Saint-Étienne-du-Mont, le Panthéon, la mairie du Vème arrondissement.

     

    Néo-classicisme. Le projet initial du marquis de Marigny confiait à Jacques-Germain Soufflot le soin de réunir différentes traditions : « la légèreté de l’architecture gothique ; le classicisme français, et la magnificence de l’architecture grecque ». En cela l’église Sainte-Geneviève constitue l’exemple parfait du courant néo-classique architectural français dont Ange-Jacques Gabriel, Jacques-Germain Soufflot et le marquis de Marigny étaient les principaux artisans sous le règne de Louis XV. On y retrouve, d’une part, des éléments et des formes de l’architecture antique grecque (colonnes, frontons, portiques, géométrie du plan, harmonie des proportions), d’autre part, les couvrements des églises modernes que Jacques-Germain Soufflot avait étudiés en Italie.

     

     

     

     

     

     

    L'Ecole de Droit et le Panthéon en 1792

      137. L'Ecole de Droit et le Panthéon en 1792 (Pierre-Antoine de Machy [1723-1807], dessin à la plume et encre de Chine, aquarelle. Bibliothèque nationale de France). 

     

     

    L’auteur de cette illustration a faussé la perspective de l’École de Droit et du Panthéon. Il présente, côte à côte, les façades respectives de ces édifices, alors même que la façade de l’École de Droit est à l’opposé de celle du Panthéon.

     

     

     À très bientôt pour le prochain chapitre de cette rubrique consacrée à la Faculté de Droit de Paris. XIX : L'Ecole de Droit en 1774, place du Panthéon 


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    L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

    138. L’École de Droit, place de la nouvelle église Sainte-Geneviève, devenue place du Panthéon.  

     

     

     

        En 1680, la Faculté de Décret de Paris, renommée Faculté des Droits, avait été logée, à titre provisoire, dans le Collège Royal. Cet arrangement dura près d’un siècle, jusqu’à ce que Louis XV, par lettres patentes du 16 novembre 1753, ordonne la construction, au sommet de la montagne Sainte-Geneviève, d’un édifice convenable et suffisant pour accueillir les étudiants en droit et leurs professeurs. L’honneur en échut à Jacques-Germain Soufflot, architecte et contrôleur des bâtiments du Roi. Construite  de 1771 à 1773, l’École de Droit ouvrit en 1774, et elle fut inaugurée en 1783.

        Cette École de Droit, rebaptisée Faculté de Droit, le 1er janvier 1809, abrite aujourd’hui, au numéro 12 de la place du Panthéon, sous l’appellation Centre Panthéon, les présidences des universités de Paris I Panthéon-Sorbonne et de Paris II Panthéon-Assas, ainsi que l’École de droit de la Sorbonne, l’un des départements de l’université Paris I Panthéon-Sorbonne. 

     

     

     

     

     

    Jacques-Germain Soufflot, architecte de l’École de Droit

    139. Jacques-Germain Soufflot, architecte de l’École de Droit (Gravure fin du XVIIIème siècle tirée de [Œuvres de] Jacques-Germain Soufflot, Chez Bligny, Cour du Manège aux Tuileries, Paris).

     

     

    Jacques-Germain Soufflot, notre étudiant en droit devenu architecte, fut le maître absolu du bâtiment de l’École de Droit qu’il put achever de son vivant, contrairement à la nouvelle église Sainte-Geneviève (Le Panthéon), qui ne put être achevée qu’en 1790, dix ans après sa mort.   

     

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

    140. Plan de la place Sainte-Geneviève (place du Panthéon) levé par Edme Verniquet entre 1785 et 1791.

     

     

     

    Pour donner plus d’étendue à la nouvelle École de Droit, le ministère de la maison du Roi auquel était rattachée l’Université, s’était porté acquéreur de plusieurs maisons voisines de l’église Saint-Étienne-des-Grés également mentionnée sur ce plan dessiné à la fin du XVIIIème siècle. Toutefois, comme le montre ce plan, l’École de Droit n’occupait pas encore tout l’espace compris entre la place du Panthéon et la rue Saint-Jacques (les travaux d’extension de la Faculté de Droit jusqu’à cette rue furent réalisés entre 1876 et 1900).   

    Quant à la célèbre rue Soufflot (sous la Révolution rue du Panthéon-Français), qui, face au Panthéon, se prolonge, aujourd’hui, jusqu’au Jardin du Luxembourg, ce même plan ne la mentionne pas car elle n’était pas encore formée. 

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

    141. La Place du Panthéon vers 1860. La Bibliothèque de Sainte-Geneviève. L’ancienne prison de Montaigu. L’École de Droit.

     

     

     

    Cette gravure, de l’éditeur Weibel (rue Clovis. Paris), témoigne de l’état réel de la Place du Panthéon au milieu du XIXème siècle, entourée d’édifices et de constructions détériorées par le temps.

    La bibliothèque Sainte-Geneviève, qui s’élevait à l’emplacement de l’ancien collège de Montaigu, avait été créée en 1624 pour accueillir les manuscrits précieux de l’ancienne abbaye de Sainte-Geneviève. L’église abbatiale fut détruite en 1807 pour permettre le percement de la rue Clovis. Menaçant ruine, la bibliothèque Sainte-Geneviève sera elle-même démolie et remplacée par la nouvelle bibliothèque Sainte-Geneviève édifiée par l’architecte Laborde entre 1844 et 1850 sur une partie de l’emplacement de l’ancienne prison militaire de Montaigu. L’importante partie antérieure de la prison et des terrains libérés à la suite de la destruction de maisons qui lui étaient contiguës ont permis d’aménager l’espace public entre la façade du Panthéon et celle de  l’École de Droit (la façade de l’École de Droit a longtemps été suivie des maisons délabrées de l’ancienne rue Saint-Étienne). 

     

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

                       142. Vue aérienne de la place du Panthéon en 1909.

     

    Cette vue aérienne prise à la Belle Epoque montre, en partie, l’extension dont la Faculté de Droit a bénéficié entre 1876 et 1900 à l’arrière du bâtiment d’origine jusqu’à la rue Saint-Jacques (non visible sur cette vue), notamment sur les terrains occupés par l’ancienne église Saint-Étienne-des-Grés.

    Je présenterai des photographies de ces travaux d’agrandissement dans le chapitre XXIV : Les travaux d'extension à la fin du XIXème siècle. 

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

               143. L’École de Droit. Vue Panoramique, prise du Panthéon. 

     

     

    La façade incurvée de l’École de Droit est construite dans le style néo-classique, en écho à celui de la nouvelle église Sainte-Geneviève.

    Je présenterai le plan dessiné par Jacques-Germains Soufflot en 1771 et des photographies anciennes de cette façade dans le prochain chapitre (XX. L’École de Droit en 1774 : la façade). 

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

       144. L’École de Droit, la Bibliothèque Sainte-Geneviève et le Panthéon.

     

     

     La bibliothèque Sainte-Geneviève, construite entre 1838 et 1851 par l’architecte Henri Labrouste, a remplacé l’ilot des maisons de l’ancienne rue Saint-Étienne-des Grés et le collège de Montaigu. Son innovation majeure réside dans l’utilisation du métal aussi bien dans la structure, à la place du bois, que dans l’ornementation. 

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

    145. La Mairie du Vème arrondissement (à gauche) et la Faculté de Droit (à droite), place du Panthéon.

     

     

     

    Le projet confié par le marquis de Marigny à Jacques-Germain Soufflot avait pour ambition d’aménager une place semi-circulaire devant la nouvelle église Sainte-Geneviève. Cette place devait s’ouvrir sur une voie percée en son centre et relier le Jardin du Luxembourg. Cette voie, devenue la rue Soufflot, devait être encadrée de deux édifices en quart de cercle symétrique de style néo-classique. Le premier d’entre eux, affecté à l’École de Droit, fut achevé en 1774. Le second, destiné à accueillir une nouvelle École de Théologie, ne vit jamais le jour. Tout au plus, le modèle architectural de la façade incurvée de l’École de Droit a été copié pour la construction, en 1850, de la nouvelle mairie du XIIème arrondissement de Paris (aujourd’hui, Vème arrondissement), par l’architecte Jacques Hittorff. 

     

     

     

     

    Le percement de la rue Soufflot jusqu’au Jardin du Luxembourg (Charles Maleville)

    146. Le percement de la rue Soufflot jusqu’au Jardin du Luxembourg (photographie de Charles Maleville, circa 1850). 

     

     

     

    Les premiers plans de l’église Sainte-Geneviève, dessinés au milieu du XVIIIème siècle, prévoyaient la construction d’une place ouvrant sur une large artère percée en son milieu, entre les nouveaux bâtiments, au nord, de l’École de Droit, et, au sud, de l’École de Théologie (aujourd’hui, mairie du Vème arrondissement). Cette artère devait relier le boulevard Saint-Michel et le Jardin du Luxembourg. 

    Le percement de cette artère a commencé en 1760 avant même la pose de la première pierre de l’église Sainte-Geneviève. Sous la révolution, elle s’est appelée rue du Panthéon-Français, avant d’être renommée rue Soufflot en 1807. Jusqu’au milieu du XIXème siècle, la rue Soufflot s’achevait au niveau de la rue Saint-Jacques, formant une impasse. Son prolongement vers le boulevard Saint-Michel et le Jardin du Luxembourg, prévu depuis 1805, fut réalisé entre 1846 et 1876, en même temps que les travaux de construction de la nouvelle mairie de l’arrondissement, à l’emplacement initialement prévu pour l’École de Théologie.

     

     

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

                          147. Le Panthéon et la Faculté de Droit, rue Soufflot.

     

     

     

     

    Le bâtiment de la Faculté de Droit, après les travaux d’extension de celle-ci jusqu’à la rue Saint-Jacques à la fin du XIXème siècle, est visible à droite du Panthéon (à gauche sur la photographie), au commencement de la rue Soufflot, 

     

     

     

     

     

     XIX. L’École de Droit en 1774, place du Panthéon

     

                                   148. La rue Soufflot et le Panthéon, hier…  

     

     

     

     

    Aujourd’hui, le bassin à jet d’eau situé devant l’entrée du Jardin du Luxembourg dans la perspective de la rue Soufflot et du Panthéon est encadré par un McDonald’s et un Quick, assez éloignés de l’esprit du XVIIIème siècle. Sans doute, les services de l’État ou de la ville de Paris qui ont délivré l’autorisation d’installation de fast foods à l’orée de la rue Soufflot ont-ils voulu intégrer l’art culinaire aux beaux-arts.

     

    Dans la rubrique de ce blog intitulée Au Quartier latin, je consacrerai plusieurs pages à la rue Soufflot, notamment dans sa représentation en peinture et en photographies anciennes, en noir et blanc ou colorisées à la main.

     

     

     

    À très bientôt pour le prochain chapitre de cette rubrique consacrée à la Faculté de Droit de Paris :

    XX. L'École de Droit en 1774 : la façade. 





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