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Juges et avocats dans le journal Le Rire (1/6)
1 Le jury maboul
- Mort, bagne, prison, acquittement… Nous jouons ça à la manille* avant l’audience.
(Le Rire, 1er juin 1912. Dessin de L. M.)
* La manille est un jeu de cartes.
Les numéros du Journal satirique illustré hebdomadaire Le Rire, publié entre 1894 et 1924, et aujourd’hui en accès libre sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France, contiennent quelques dessins de juges, procureurs, avocats, avoués et jurés, accompagnés de légendes souvent « vachardes ». Voici, en six envois (un par jour) ou post (avec ou sans « s » ?), les plus présentables et compréhensibles, sachant que l’humour de ce journal est attaché à l’actualité ainsi qu’aux modes de vie et de pensées de la Belle Époque (les gens de justice, les prêtres et les soldats étaient pour les journaux humoristiques de ces années, des parasites présumés responsables de l'état injuste et inégalitaire de la société).
2 La gaffe
- Mon mari m’a souvent parlé de vous, monsieur, comme d’un avocat d’un très grand avenir !
(Le Rire, 1er octobre 1910. Dessin de H. Dangon).
3 Chez l’avoué
- Mon mari est un c…, une m…, un s… Mais il est inutile de vous parler de lui, n’est-ce pas ?... Je sais que j’emploierais à son égard des termes tout à fait grossiers…
(Le Rire, 14 décembre 1912. Dessin de A. Guillaume).
4 Les ouvriers jurés
- Qu’on m’fiche président à mortier* : j’suis maçon !
(Le Rire, 1er août 1908. Dessin de L. M.)
* Le mortier désignait une sorte de bonnet du chancelier de France, des grands présidents et des présidents des cours de justice pour marquer leur dignité. On les appelait alors présidents à mortier ou au mortier. Le mortier est également un terme de maçonnerie qui provient de ce que le mortier (sable et chaux mélangé pour lier les pierres d’un mur) se pile dans un mortier (vase à parois épaisses, creusé d'une cavité hémisphérique évasée par le haut, et dans lequel on écrase, à l'aide d'un pilon, des matières).
5 Le témoin
- Voyons mon enfant, dîtes nous ce que vous savez ?
- Moi, monsieur, je sais une fable toute entière et une autre à moitié.
(Le Rire, 18 juin 1911. Dessin de A. Névil)
6 L’avocat sans cause*
Un avocat avait
Un vêtement si laid,
Si sale et si pauvret,
Qu’on disait que c’était
Par pause.
Hélas ! on se trompait
Jamais il ne plaidait.
Or, tout le monde sait
Qu’on a point d’effet**
Sans cause.
(Miguel Zamachoïs)
(Le Rire, 28 septembre 1895)
* Dans le langage judiciaire, la cause désigne un procès ou une affaire qui se plaide. L’avocat sans cause est donc un avocat pauvre parce qu’il n’a aucun client.
** Le mot effet, dans les lois et la jurisprudence, est synonyme de conséquence ou application (La loi n’a point d’effet rétroactif). En terme courant, il désigne aussi bien un vêtement (La servante qui prend les effets de son maître, Bossuet, médit.1), qu’une impression morale (faire un bon ou un mauvais effet).