• Les étudiants de Paris de Gavarni (4/6)

     

     

     

    Les étudiants de Paris de Gavarni (4/6)

    Première de couverture de l’ALBUM COMIQUE PAR GAVARNI publié en 1839-1840. 

     

         Selon Paul-André Lesmoine (1875-1964), conservateur en Chef à  la Bibliothèque nationale de France et membre de l’Académie des Beaux-arts, qui épousa la petite fille de Paul Gavarni, une première série de lithographies des ÉTUDIANTS de Gavarni (au nombre de 60), avait été déposée le 20 août 1839. Ces lithographies provenaient pour la plupart du quotidien satirique Le Charivari auquel collaborait Gavarni depuis son lancement en 1832. Les décennies suivantes, plusieurs recueils comprenant ces lithographies, parfois revues, corrigées et reclassées par Gavarni lui-même, furent publiés sous un chapitre intitulé LES ÉTUDIANTS DE PARIS (1845 ; 1846-1848 ; 1853 ; 1869…).

     

       Mais, dès 1839-1840, parut un album de plusieurs de ces lithographie sous le titre, en première de couverture, ALBUM COMIQUE PAR GAVARNI, complété des mentions : En vente au bureau du JOURNAL AMUSANT, 20 rue Bergère, et au bureau du CHARIVARI, 16, rue du Croissant. Paris, Lithographie Destouches, Paris. Je rappelle, à cet égard, que la diffusion de cet album comique de Gavarni dût être limitée car il contenait, non pas de simples gravures en noir et blanc ou en couleur qui auraient été facilement tirées à plusieurs milliers d'exemplaires à faible coût, mais trente lithographies numérotées de 1 à 30, tirées sur blanc* (en l'espèce du beau papier vélin), une par une, à l'aquarelle, et rehaussées de gomme arabique, par les « petites mains » de jeunes femmes (les hommes moins habiles étaient exclus de ce travail) travaillant habituellement chez elles (la technique en est fort bien expliquée dans divers sites Internet). Puis ces trente lithographies furent réunies (en fait cousues) dans cet ALBUM COMIQUE, édité en quelques dizaines d’exemplaires vendus aux amateurs d’estampes, très cher (avec ou sans « s » ? : dure, dure l’orthographe française !).

     

    *Les épreuves d’une lithographie dîtes sur blanc désignent celles qui, une fois la pierre dessinée, sont tirées sur du papier blanc épais et écoulées à la pièce ou réunies en séries, avant qu’il ne soit procédé aux tirages de presse pour les journaux ou les livres.  

     

           Je vous propose donc de découvrir ces trente lithographies d’étudiants (en Droit et en Médecine selon certaines de leur légende) en trois « envois » ou post (avec ou sans « s » ??) successifs. J’ai complété certaines d’entre elles de définitions ou d’explications (en retrait).

     

     

     

     

    Les étudiants de Paris de Gavarni (4/6)

                                     1. NON BIS IN IDEM (Axiome de Droit)*

     

     

    *De l’autorité de la chose jugée. L’axiome de droit « non bis in idem », légende originale de ce premier dessin de l’album des Étudiants de Paris de Gavarni est un principe de la procédure pénale, issu de l’ancien droit romain, selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement une seconde fois à raison des mêmes faits. Il est notamment repris par l'article 368 du Code de procédure pénale en ces termes : « aucune personne acquittée légalement ne peut plus être reprise ou accusée à raison des mêmes faits, même sous une qualification différente ».  

     

    Droit et Médecine. Cette légende « juridique » inaugurale nous permet de penser que la version colorisée de l’album de Gavarni était dédiée au premier chef aux étudiants de la Faculté de Droit de Paris, à l’époque dénommée École de Droit ! Mais, d’autres dessins évoquent des étudiants en Médecine (par exemple, le dessin n°18 avec un étudiant qui emploie ses sous pour acheter un cadavre !).

     

    En fait, lorsque l’on consulte la collection de dessins, plus complète, de la réédition par L. Hetzel en 1869, avec les illustrations en noir et blanc, de l’album de Gavarni, on comprend que l’auteur met en scène deux étudiants : l’un en Droit, Félix, l’autre, en médecine, Auguste. Par exemple, avec cette légende : « Eh ! mon cher, ne te plains pas ! tu seras médecin, je serai procureur du roi : quand tu seras obligé d’avoir du talent je serai forcé d’avoir des mœurs. C’est ça qui sera dur ! ». Et, sous le dessin n°28 de cette présente série de dessins colorisés, la légende évoque le Code civil de l’un de ces étudiants, dénommé Félix.

     

    À vous de « juger » !

     

     

     

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    2. - Ma chère, comment peux-tu supporter un homme qui pipe toute la journée dans des horreurs de machines comme ça ?

    - Prends garde ! ça va te manger...  Eh b’en ! ma petite, j'étais comme toi, avant : rien qu’un cigare...  ça me mettait dans tous mes états : mais depuis que je connais Henri,…  ah b’en...  à présent je suis culottée, vois-tu ?

     

     

     

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    3. – Quand on pense que voilà ce qu’est qu’un homme… et que les femmes aiment ça !

     

     

     

    Les étudiants de Paris de Gavarni (4/6)

    4.Qu’est-ce que t’as qui te chiffonne ? Les anglais* veulent de l’argent… Promets-leur en. Ton père n’en veut plus donner. Tire lui une carotte.

    - Ce n’est pas ça… c’est ma femme qui se marre et ça m’embête !

     

    *Anglais. Dans l’argot de la Belle Époque, le mot anglais désignait le créancier, sans doute par référence aux Anglais qui avaient été créanciers des Français après la captivité du roi Jean II, dit « le Bon ». Celui-ci, roi de France de 1350 à 1364, fut battu lors de la bataille de Poitiers contre les Anglais en septembre 1356. Emprisonné en Angleterre, il ne fut libéré que contre le versement d’une énorme rançon payée par la France. Les Anglais étaient donc les créanciers des Français ! De manière ironique, les Anglais sont parfois désignés sous le mot milord, par exemple dans le Pantagruel de Rabelais en 1582, ou dans Un début dans la vie de Balzac : « Sauvez-le, ou Titine te renie pour son milord ».

     

     

     

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                                             5. – DONATION ENTRE VIFS

     

     

     

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    6. – O femme ! Chef d’œuvre de la création ! Reine de l’Humanité ! Mère du genre humain… tire mes bottes.

     

     

     

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    7.Adieu, mon bon homme ! je te laisse ma pipe et ma femme, t’auras bien soin de ma pipe !

     

     

     

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    8.Vois-tu ? Fifme non lanterne tous les deux et ça devient chose*. Faut en finir ! J’te joue ça en trente-six net ! et j’tends rend quatre.

     

    *Dzolé, mais je ne comprends pas cette phrase. Tout au plus, dans l’argot de l’époque, le mot lanterne pouvait-il désigner une vieille, une fenêtre, un œil ou un ventre transparent de maigreur. Si quelqu’un peut m’éclairer, je mettrai son explication en ligne.

     

     

     

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                                    9.Allons souper ! Qu’est-ce qui en joue ?

     

     

     

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    10.T’es bête va ! Pour une queue, une méchante queue qu’on vous fait… la grande affaire !...  Avec ça qu’on manque de femme à Paris, merci !