• Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

     

     

     

      

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

     1 – « Messieurs de la Cour… » (chromo Aux filles du Calvaire, 1-3-5-7-9 rue des Filles du Calvaire, et 96 rue de Turenne, Paris).

     

          Aux filles du Calvaire était, à la Belle Époque, un grand magasin parisien de nouveautés de vêtements pour la gente féminine. Comme la plupart des commerces, ce magasin recourut à la publicité sous forme d’images chromo-lithographiées, dites chromos, remises aux enfants des clientes lors de leur passage en caisse.

     

         Cette jolie chromo (le mot chromo étant aussi bien masculin que féminin, pour cette page d’aujourd’hui dédiée aux femmes, j’emploierai le féminin), représente une femme avocate plaidant lors d’un procès. Cela peut susciter l’étonnement pour au moins deux raisons.

     

         Le Rouge et le Noir. D’abord, la robe de cette avocate est rouge, comme celle de certains magistrats (Cour d’assises…) et non noire comme celle de nos avocats contemporains. Mais c’est normal car, ainsi que je l’ai expliqué dans la précédente page, au Moyen Âge, les avocats portaient deux robes de couleur différente : une rouge lors des cérémonies et des audiences ; une noire dans d’autres circonstances. Par la suite, ils renoncèrent au rouge sous la pression de magistrats qui voulaient être les seuls à porter cette couleur, qui symbolise l’honneur, la puissance, le pouvoir... J’ajouterai qu’il était difficile à ce magasin de vêtements féminins à la mode d’affubler ses « modèles » publicitaires d’une robe noire, couleur généralement associée aux deuils et aux enterrements !

     

       L’année de la femme. Ensuite, à l’époque de l’édition de cette chromo, dans les années 1880 à 1890, les femmes ne pouvaient exercer la profession d’avocat. En effet, c’est une loi du 1er décembre 1900 qui a autorisé l’accès au barreau des premières femmes licenciées en droit. À la suite de celle-ci, Jeanne Chauvin (1862-1926) fut la première femme à plaider comme avocate, en 1901, et à susciter l’intérêt des médias de l’époque, désormais convertis à la prise d’images photographiques (sur la toile, je n’ai trouvé aucun dessin ou portrait photographique de Jeanne Chauvin, tirés en chromolithographie).

     

     Je vous renvoie donc aux pages que j’ai déjà consacrées à l’accès des femmes aux barreaux : 

    http://droiticpa.eklablog.com/droit-et-justice-dans-le-journal-le-sourire-7-7-les-femmes-a180692382 

              

     

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    2 Juges en robe rouge, avocate en robe noire (chromo Chocolat Payraud. Imprimeur-lithographe Baster et Vieillemard, installé à Paris de 1869 à 1886).

     

       Pour cette page d’aujourd’hui, voici quelques chromos dénichées sur la toile, que j’ai rangées en trois catégories :

    I. Les déesses de la justice dans la mythologie ;

    II. Les petites filles en costume d’avocat ou de juge ;

    III. Les femmes accomplies avocates ou juges.

     

     

     

     

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    3 Petite Mythologie Classique : Thémis, Déesse de la Loi Divine (chromo Manufacture Bleu Daloz, ancienne Maison Passier-Roux, fondée en 1812, à Dole dans le Jura).

     

     La mythologie de l’antiquité classique, grecque (puis romaine), comporte une multitude de Dieux et de Déesses. Parmi ces dernières, Thémis (Justicia pour les romains), la Déesse de la Loi Divine (souvent citée comme la Déesse de la Justice). Thémis est la fille d’Ouranos et de Gaïa, de la première génération divine, dite des Titans, qui habitent dans les cieux. Elle est traditionnellement représentée avec deux symboles. D’une part, la balance, dans sa main droite, qui fait référence à l’idée d’équilibre et de mesure, le juge pesant les arguments de chacune des parties. D’autre part, le glaive (ou épée), dans sa main gauche, qui fait référence à la force, à la puissance et à la sanction : le juge devant trancher le conflit et sanctionner (d’où l’expression bras armé de la Justice).

     

         Thémis est parfois confondue avec Dicé, une des Heures (Divinité représentant les saisons), qui, personnifiant la Justice humaine dans ses aspects moraux et pénaux, est ennemie des mensonges et garante d’une bonne marche de la justice. Quant à Astrée, fille de Thémis et de Zeus, elle diffusa parmi les hommes les sentiments de Justice et de Vertu, puis quitta la Terre pour se réfugier au Ciel parmi les constellations (désolé, mais je n’ai trouvé sur la toile aucune chromo représentant Dicé et Astrée !). 

     

     

     

     

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                              4 Petite Mythologie Républicaine (chromo non publicitaire et non datée).

     

        La légende de cette chromo trouvée, par hasard, sur la toile d’Internet, mentionne une image glorifiant La République (sans doute la Troisième République). L’on reconnaît sur la gauche, Thémis, la Déesse grecque de la Loi Divine ou de la Justice, tenant le glaive et la balance. Au centre, se trouve Aléthée (aussi nommée Alatheia), la Déesse grecque de la Vérité (son équivalent romain est Veritas) ; fille de Saturne ou du Temps. Souvent elle est représentée avec un soleil, un livre ouvert et une palme. Quant à la troisième divinité, sur la droite, en partie nue et tenant un miroir dans la main droite, il doit s’agir d’Aphrodite, la Déesse grecque de l’amour de la beauté (son équivalent romain est Vénus).

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    5 Petite Mythologie Humoristique : Thémis, vingt ans après son inscription au Barreau comme avocate (chromo ancienne caricaturale).

     

     

    « Alain Furbury (ancien avocat du Barreau de Toulouse) disait qu’il faut vingt ans pour faire un(e) bon(ne) avocat(e). Il avait raison » (Éric Dupont-Moretti, Ministre de la Justice).

     

       On observera que cette citation contemporaine prend le contrepied d’anciens proverbes anglais (« En fait de médecin, les vieux ; en fait d’avocat, les jeunes »), et birman (« Il faut que le médecin soit vieux et l’avocat jeune »).

     

     

     

    Petite Mythologie Classique : Némésis, Déesse de la Vengeance et de la Justice (chromo

    6 Petite Mythologie Classique : Némésis, Déesse de la Vengeance et de la Justice (chromo Chocolats Guérin-Boutron, série La Mythologie. Imprimeur-lithographe Vallet Minot & Cie, 5, rue Béranger, Paris).

     

      Cette chromo représente Némésis, la Déesse grecque de la Vengeance et de la Justice distributive (à chacun son dû). Némésis personnifie la loi morale qui réprouve toute démesure, ainsi que la jalousie divine des hommes osant se comparer aux Dieux.  

     

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    7 La jeune avocate et les jurés féminins (chromo Au Bon Marché, sans doute issue d’une série perdue à jamais).

     

    N° 1 « Nos fillettes jouent à la jeune avocate qui plaide la cause du malheureux chien, le jury féministe décidera du châtiment ».

     

        Six : « cinq plus un » (dictionnaire de l’Académie française). Sauf erreur, dans la mesure où il est mentionné sur cette chromo « N° 1 », elle doit faire partie d’une série de six ou huit chromos, nombres en usage à la fin du XIXème siècle pour l’édition de chromos remises aux enfants des clientes des grands magasins. Une seule chromo étant « donnée » lors du passage en caisse des clientes, ces dernières étaient obligées de revenir faire des achats dans le même magasin pour permettre à leurs enfants de réunir une série complète ! Je n’ai pu retrouver sur la toile les cinq autres chromos de cette série. Cela est excusable, si j’en crois les commentaires d’un collectionneur de chromos : « De 1895 à 1914, le Au Bon Marché a distribué 50 millions de chromos, chacun (e) avec un tirage compris entre 100 et 400 000 exemplaires. Bien que le tirage de ces images soit relativement important, celles-ci sont aujourd’hui rares, la plupart d’entre elles ayant été détruites au fil des ans. Les collectionneurs de chromos-images du Au Bon Marché ont bien du mal à compléter leurs collections » (http://www.cartolino.com/fr/chromos-bonmarche.html).

     

      Plaidoirie : un substantif toujours féminin. Selon la quatrième édition du dictionnaire de l’Académie française (1762), « la plaidoirie est le discours prononcé à l’audience du tribunal par un avocat » (le terme avocate est introuvable dans les huit premières éditions de ce dictionnaire) pour défendre le droit d’une partie ». Le mot plaidoirie est synonyme de deux mots plus anciens : plaidoier, devenu plaidoyer, et plaid, qui désignait l’audience d’un tribunal (« Tous les jours, le premier aux plaids et le dernier. » Racine, Les Plaideurs, I, 1).

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    8 La jeune avocate en robe noire (chromo Au Bon Marché, issue d’une série consacrée aux costumes féminins).

     

       Devinette. Quelles sont, aujourd’hui, les formules pour s’adresser à une femme avocate : Madame ? Maître ? Maîtresse ? Cher Maître ?  Chère Maître ? Cher(e) Confrère ? Chère Consœur ?

     

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    9 – J’ai si mal défendu mon client qu’on l’a acquitté (chromo. Imprimeur-lithographe H. Sicard, 28 rue Amelot, Paris).

     

     La Parole est à la Défense : « La plaidoirie parfaite produit le même effet qu'une femme trop belle sur papier glacé : aucun. Mieux vaut une petite maladresse de langue qu'un réfrigérant imparfait du subjonctif. » (Maître Michel Konitz, avocat au Barreau de Paris. L’Express, 4 avril 2015 : https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/les-avocats-confient-leur-pire-souvenir-de-plaidoirie_1667130.html). 

     

     

    Il Giudice, Le Yude, The Judge (chromo)

                                                          10 Il Giudice, Le Yude, The Judge (chromo).

     

                                             Le juge, en anglais : The Judge

                                             Le juge en italien : Il Giudice

                                        Quant au second mot : Le Yude, je ne l’ai pas trouvé avec les divers traducteurs en ligne (bienvenu pour un commentaire).

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    11 - C’est clair ! (chromo Chicorée ménagère. Au bas de cette chromo publicitaire tirée d’après une photographie est apposée la marque « L. V. & Cie », de l’imprimerie chromolithographique en nom collectif « Léopold Verger et Cie », fondée en 1895, et dont l’usine était 161 boulevard Ornano à Saint-Denis, et les bureaux 61 Faubourg Poissonnière à Paris).

     

     « Pour peu de faits, souvent grands plaids » (proverbe ancien français).

     

    « En longs plaids, avocats vendangent » (proverbe ancien français).

     

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    12 De l’art de bien plaider (chromo Fer Bravais, un médicament à base de fer contre l’anémie, la chlorose, la débilité et l’épuisement, distribué en pharmacie à la fin du XIXème siècle).

     

    - Oui ! Messieurs, suivez mon conseil, faîtes comme moi, prenez et faîtes prendre tous les jours à vos enfants 20 gouttes de véritable Fer Bravais si vous voulez les rendre forts, robustes, et leur éviter toutes sortes de maladies.

     

     

     

     

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    13 De l’hydratation pendant la plaidoirie (chromo Alcool de Menthe de Ricqles. Remède inventé, en France, en 1838, par Heyman de Ricqlès. Illustrateur Albert Guillaume [1873-1942]). 

     

    - Messieurs de la Cour, Messieurs les Jurés… je ne saurais comment vaincre l’émotion que j’éprouve à parler devant vous, si ce verre d’eau sucrée ne contenait heureusement quelques gouttes d’Alcool de Menthe de Ricqlès.

    Oui ! Messieurs, suivez mon conseil, faîtes comme moi, prenez et faîtes prendre tous les jours à vos enfants 20 gouttes de véritable Fer Bravais si vous voulez les rendre forts, robustes, et leur éviter toutes sortes de maladies.

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

                                          14 Les contrastes : Avocat et Plaideuse (chromo, années 1900)

     

     

       Bientôt 100% de femmes avocats… ou avocates ? L’accès au barreau des premières femmes licenciées en droit, autorisé par une loi du 1er décembre 1900, a soulevé un problème de vocabulaire dans la mesure où le mot masculin avocat n’avait pas encore d’équivalent féminin. Toutefois, il est étonnant qu’aujourd’hui, le mot avocate ne soit pas utilisé dans les règlements de certains barreaux évoquant l’exercice de la profession d’avocat par des femmes, pourtant plus nombreuses que les hommes (au 1er janvier 2016 : 63 923 avocats en France, dont 55,1 % de femmes, contre 48,7% dix ans auparavant).

    http://droiticpa.eklablog.com/bientot-100-de-femmes-avocates-a139158506

     

     

     

     

    Droit et Justice: place aux femmes en chromos 17

    15 Madame la Présidente de la Cour d’assises. Ombre chinoise avec les mains (chromo Restaurant Table d’Hôte Blond, 2, Boulevard Montmartre, Paris).

     

       À très bientôt. La page suivante que je suis en train de préparer sera réservée à une série rarissime de six chromos, intitulée « avocate et mère », éditée en cartes postales en 1905, et dont l’imprimeur lithographe reste une énigme.