• XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

     

     

     

     L’École de Droit (Eugène Atget)

          156. La porte cochère de l’École de Droit (photographie d’Eugène Atget, 1903)

     

     

     

    Dans le précédent chapitre consacré à l’École (ou Faculté) de Droit de Paris édifiée par Jacques-Germain Soufflot, j’ai présenté la façade curviligne de l’édifice donnant sur la place de la nouvelle église Sainte-Geneviève (place du Panthéon). Elle avait pour ambition de mettre en valeur l’église Sainte-Geneviève en cours de construction, en empruntant le style néo classique de son porche et en aménageant devant celui-ci une sorte d’écrin semi circulaire.

     

    Aujourd’hui, je vous invite à franchir la porte de l’entrée principale de cette École de Droit pour en  découvrir, si ce n’est le charme ou l’originalité architecturale, du moins l’intérieur tel qu’il a été conçu par Jacques-Germain Soufflot.

     

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

                                      157. La Cour d’Honneur de l’École de Droit.  

     

     

     

    Passé le portail de forme sphérique de l’École de Droit, on pénètre dans la Cour d’Honneur de forme trapézoïdale et bordée d’arcades sur trois côtés. Signe des temps, contrairement à la Sorbonne, aucune chapelle n’a été édifiée par Jacques-Germain Soufflot (le Collège Royal ou Collège France, et l’Académie de Chirurgie ou École de Médecine, édifiés par d’autres architectes à la même époque, bénéficiaient toutefois d’une petite chapelle).

     

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

                                    158. La Grande galerie de l’École de Droit.

     

     

     

    L’entrée principale de la Cour d’Honneur donne sur la Grande galerie qui menait, à l’origine, à un amphithéâtre et au secrétariat de l’École de Droit. Au pied du bel escalier se trouvait une statue de Cujas.

    Le corps du bâtiment, de forme incurvée (à droite de la photographie), abritait, au premier étage, la Salle des Actes, et, juste au dessus d’elle, au deuxième étage, la première bibliothèque de l’École de Droit.

     

     

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

    159. L’ancien amphithéâtre de l’École de Droit (photographie de Charles Marville. Circa 1860).

     

     

     

    Au rez-de-chaussée, se trouvait le seul amphithéâtre de l’École de Droit qui suffisait pour le nombre de cours dispensés à son ouverture (à peine 5 cours). Obscur et incommode, cet amphithéâtre fut ultérieurement restauré pour être plus clair et favorable aux étudiants (réaménagée, la salle existe encore aujourd'hui). Mais, avec l’augmentation du nombre d’étudiants (500 en 1804, 1100 en 1810)  et du nombre de cours (plus de 26 cours en 1819), l’École de Droit dut emprunter des salles à la Sorbonne, y compris sa célèbre chapelle, pour permettre à ses professeurs de dispenser leurs leçons. Des cours de droit furent également donnés dans l’ancien collège du Plessis, rue Saint Jacques.

    Aussi, pour remédier à ce problème, un second amphithéâtre, désigné sous le nom de nouvel amphithéâtre, fut construit, en 1829, à l’arrière du bâtiment de l’École de Droit (il a été supprimé, suite aux travaux d'extension de l'École de Droit). À la même époque, une des salles de l’ancien bâtiment fut transformée en un amphithéâtre. Plus petit que les deux autres amphithéâtres, il était réservé aux cours de doctorat.

     

     

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

              160. Le plan du premier étage dessiné par Jacques-Germain Soufflot

     

     

     

    À l’origine, se trouvaient au premier étage, des salles d’examens, d’études et de conférences, et le logement du Doyen. S’y trouvaient également, la salle de délibérations de l’École de Droit, appelée Salle des Actes, ainsi qu’une autre salle, connue aujourd’hui sous le  nom de Salle Goullencourt.

     

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

                                        161 La Salle des Actes au premier étage (1)

     

     

     

    Dans la plupart des Facultés de Droit, on trouve une Salle dite des Actes, qui sert en général aux réunions des professeurs (répartition des cours, concours de recrutement de collègues, jurys d’examens, délibérations…), aux soutenances de thèses de doctorat ou de mémoires de Master 1 et 2, ainsi qu’aux conférences et aux cours de faibles effectifs (doctorat autrefois, Master 1 et 2 aujourd’hui).

    À l’origine, la Salle des Actes était nommée de la sorte car on y conservait les actes, nom donné aux disputes publiques (dans le sens de discussions entre plusieurs personnes) de soutenance de thèses de licence et de doctorat.

    C’est ainsi que Jacques-Germain Soufflot dota sa nouvelle École de Droit de Paris d’une Salle des Actes, au premier étage du bâtiment, d’une surface de 40 m².

    Depuis 2011, la nouvelle Salle des Actes de l’Université Panthéon-Assas a été installée au troisième étage du bâtiment du Centre Panthéon (ancienne École de Droit) à l’endroit où se trouvait l’ancienne Salle Collinet de l’Institut de Droit Romain. 

     

     

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

                                   162 La Salle des Actes au premier étage (2)

     

     

      Autrefois, la Salle des Actes était ornée d'une composition de Paul Steck représentant le Droit, la Loi et la  Jurisprudence, et de trois tableaux d'Emile René Ménard (1862-1930), qui ont été confiés, en 1971, au musée d'Orsay. Sur cette photographie ancienne, on distingue encore, dans l'encadrement de la porte, deux de ces tableaux, l'un intitulé l'Âge d'Or, l'autre Crépuscule.

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

                                 163 La Salle Goullencourt au premier étage 

     

     

    Proche de la Salle des Actes, une autre salle mentionnée sur le plan du premier étage de l’École de Droit dessiné par Jacques-Germain Soufflot retient encore l’attention. Il s’agit de la Salle, nommée Goullencourt dans les années 1904-1907, que se partagent aujourd’hui l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne et l’université de Paris 2 Panthéon-Assas pour l’organisation notamment de colloques et de cérémonies de remises de diplômes (Centre Panthéon, 12, place du Panthéon, Cour d'Honneur, Escalier M – 1er étage).

    Henri Goullencourt dont il s’agit était un provincial qui avait suivi, au XIXème siècle, ses études de droit à la Faculté de Droit de Paris où il obtint sa licence et son doctorat. Dans sa retraite de Saugeons (Oise), il aimait lire les ouvrages de jurisprudence pendant ses loisirs. Il revenait parfois à Paris pour suivre comme auditeur libre les cours publics de la Faculté de Droit et acheter les derniers livres de droit parus.

    Par testament, Henri Goullencourt légua à sa mort, survenue en 1902, toute sa fortune à la Faculté de Droit de Paris. Ce testament comportait la disposition suivante bien aimable pour ses Maîtres de la Faculté de droit et détestable pour ses héritiers par le sang : « À la mémoire vénérée de ma mère, j’institue légataire universelle la Faculté de Droit de l’Université de Paris. Je lui dois tout ; je ne dois rien à mes héritiers de la ligne paternelle ou maternelle ; aussi je demande avec insistance que le legs ne subisse aucune réduction ; tel était le vœu constant de ma mère ; qu’il soit respecté ! ».

    C’est ainsi que la Faculté de Droit de Paris reçu avec grande satisfaction les biens mobiliers et immobiliers (ferme du Blanc-Bâton à Haussez en Seine-Maritime), de la succession Goullencourt, évalués à plusieurs centaines de milliers de francs. Ce legs providentiel lui permit notamment d’ouvrir de nouveaux enseignements et de donner une pension à son ancien secrétaire général.

    La Faculté de Droit de Paris témoigna sa reconnaissance à son ancien étudiant Henri Goullencourt en attribuant son nom à l’une de ses salles du premier étage et en créant, en 1907, un prix Goullencourt pour récompenser les meilleures thèses et ouvrages de droit (ce prix est toujours décerné aujourd’hui).

     

     

     

     

     

    XXI. L’École de Droit en 1774 : l’intérieur

                    164 Le plan du deuxième étage dessiné par Jacques-Germain Soufflot

     

     

     

    La bibliothèque. Ce plan du deuxième étage de l’École de Droit mentionne la bibliothèque, située juste au dessus de la salle des actes. Cette pièce rectangulaire, d’une superficie de 40 m², suffisait à l’époque pour contenir tous les livres que possédait l’École de Droit, et elle permettait d’accueillir entre vingt et trente étudiants.

    En raison de l’augmentation du nombre d’étudiants (2500 en 1865), deux autres salles de lecture plus vastes furent construites, entre 1876 et 1878, par Louis-Ernest Lheureux, architecte du Vème arrondissement en charge des bâtiments de la Faculté de Droit. Elles occupaient un espace d’environ 300 m² compris entre le second amphithéâtre et les maisons donnant sur les rues Cujas et Saint-Jacques. Elles furent complétées par quatre vastes salles de lecture construites, entre 1893 et 1897, dans le cadre de la reconfiguration générale de la Faculté de droit suite à ses travaux d’extension jusqu’à la rue Saint-Jacques. 

     

    Les logements des professeurs. Les plans des deuxième et troisième étages de l’École de Droit font également mention de quatre appartements, comptant plusieurs pièces chacun, réservés aux professeurs titulaires, suivant l’ordre de leur ancienneté (la Sorbonne comportait elle-même près de quarante appartements réservés à ses docteurs). Cette dernière pratique prit fin dans le courant du XIXème siècle, à l’exception de celle concernant le logement du Doyen. Les appartements devenus vacants permirent de loger, pendant plusieurs années, les élus municipaux de la nouvelle mairie du XIIème arrondissement, construite juste en face de l’École Droit, et devenue mairie du Vème arrondissement. 

     

    À bientôt pour les prochains chapitres de cette rubrique consacrée à la Faculté de Droit de Paris :     

     

    XXII. Leçon d'Histoire de France

     

    XXIII. Ouverture et fermeture de l'Ecole de Droit (1789-1802)

     

    XXIV. Le maintien des Ecoles privées de Droit sous la Révolution

     

    XXV. Réouverture de la Faculté de Droit de Paris en 1805

     

    XXVI. Les diplômes de la nouvelle Ecole de Droit de Paris

     

    etc.