• Droit et justice : la République des avocats en chromos 20-3

     

     

     

     

    Droit et justice : la République des avocats en chromos

    1 Un jeune avocat de la Troisième République devant le Palais de Justice de Paris (chromo Ad. Godchau, Habillements pour Hommes & Enfants, 75 rue de Rivoli, Paris. Imprimeur-lithographe de la société Gilbert Baster et Pierre Vieillemard, créée en 1869 à Paris, rue des Capucines).  

     

       L’Été 1870, en deux mots… Il y a cent cinquante et un ans, le 4 septembre 1870, la France changea de régime politique pour la huitième fois depuis 1789 (de 1789 à 1870 : trois monarchies, deux républiques et deux empires !). Deux jours auparavant, le 2 septembre 1870, l’armée française avait été vaincue et l’empereur Napoléon III capturé, à Sedan, par les armées prussiennes (la France avait déclaré, le 19 juillet 1870, la guerre à la Prusse, guerre dite franco-allemande ou franco-prussienne).

     

     

     

     

     

     

    Droit et justice : la République des avocats en chromos 20-3

    2 Le 4 Septembre 1870. Proclamation de la République par Léon Gambetta, un avocat-homme politique, entouré de trois de ses confrères : Jules Ferry, Jules Favre, Adolphe Crémieux (lithographie de l’éditeur-imprimeur E. Pichot, installé à Paris, au 72 quai de Jemmapes. Circa 1900). 

     

     

           « La République, c’est l’inévitable et vous devriez l’accepter » (Léon Gambetta, Chambre des députés, 5 août 1874). Le 4 septembre 1870, après une journée d’émeute et l’envahissement de la Chambre des députés par la foule, une multitude de gens s’était rassemblée place de l’Hôtel-de-Ville à Paris. Léon Gambetta, un jeune avocat, élu député du groupe républicain le 24 mai 1869, accompagné d’autres avocats devenus également députés (Jules Ferry, Jules Favre, Adolphe Crémieux…), proclama d’emblée la IIIème République devant la foule en liesse, en ces quelques mots : « Le peuple a devancé la Chambre qui hésitait. Pour sauver la Patrie en danger, il a demandé la République : elle est proclamée, et cette révolution est faite au nom du droit et du salut public. Citoyens, veillez sur la cité qui vous est confiée ; demain, vous serez avec l’armée des vengeurs de la Patrie. »  

     

     

     

     

    Droit et justice : la République des avocats en chromos 20-3

    3 Narcisse : « Hélas ! Hélas ! » (chromo Chicorée extra La Sans Rivale. Un jour, alors qu’il buvait l’eau d’une source, Narcisse, d’une grande beauté, vit son reflet dans l’eau et en tomba amoureux. Il mourut de cette passion qu’il avait pour lui-même).

     

     

     

        La Parole (la tribune), le Droit (la loi) et le Narcissisme (l’amour de soi). Puis au gré des étapes de la mise en place définitive de cette nouvelle République, beaucoup d’avocats, qui étaient au nombre de 3969 en 1872 (4492 en 1900, 5023 en 1913), accédèrent à la vie politique pour des raisons sibyllines au commun des mortels ainsi qu’à Sigmund Freud, le père de la psychanalyse. Les uns comme députés ou sénateurs (plusieurs centaines), d’autres comme ministres (plusieurs dizaines), et les plus cocardiers comme Présidents de la République (Adolphe Tiers, Jules Grévy) ou Présidents du Conseil (Léon Gambetta, Jules Ferry, Jules Dufaure).

     

          La République des Avocats. On comptait ainsi, des années 1880 à 1914, entre 25 et 40% d’avocats à l’Assemblée nationale, et 35% parmi tous les ministres (sources : Laurent Willemez, La République des avocats, in Michel Offerlé, La profession politique XIXème-XXème siècle, Paris, Belin, 1999, p. 201-229). https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01263619/document

     

     

        « Quelque espérance de vous faire élire à la Chambre des députés » (Stendhal, L. Leuwen, t. 2, 1836, p. 50). La Troisième République (1870-1940) fut alors dénommée la République des Avocats (par exemple : Jean-Louis Debré, La justice au XIXème siècle-Les Républiques des Avocats, Librairie académique Perrin, 1984). C’est sans doute la raison pour laquelle, le journal Le Figaro, dans son édition du 17 mai 2021 dernier, a du se rabattre sur un autre aphorisme pour évoquer notre Vème République exemplaire : « L’âge d’or des avocats au temps d’Éric Dupont-Moretti »: https://www.lefigaro.fr/actualite-france/l-age-d-or-des-avocats-au-tem

     

     

    IIIème et Vème Républiques : « M’enfin ! C’est kif-kif ! ». Aujourd’hui, nos avocats, avec ou sans causes, devenus députés ou sénateurs bénéficient de l’indemnité parlementaire de base qui s’élève à 7 239, 91 € (29 avocats sont actuellement députés; 33 sont sénateurs). Ils peuvent recruter jusqu’à cinq copains, comme collaborateurs et assistants tous frais payés, y compris leurs confrères et consœurs (aux termes de l’article 115 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, un avocat ne peut en droit exercer aucune autre profession… à l’exception de certaines dont les « fonctions de collaborateur de député et d’assistant de sénateur ».). Plus encore, les lois du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie publique permettent implicitement à un parlementaire de recruter, comme collaborateurs et assistants, les conjoints, partenaires pacsés ou concubins, enfants ou beaux enfants, et parents ou beaux-parents, d’autres parlementaires, avec ou sans réciprocité. Ceux-ci peuvent alors, aux conditions posées par l’article 98 du décret du 27 novembre 1991, accéder à la profession d’avocat, en étant dispensés de la formation initiale au sein des CRFPA (Centres régionaux de formation professionnelle d’avocats…) et de l’obtention du CAPA (certificat d’aptitude à la profession d’avocat), peu important leur talent. Quant au nombre d'avocats devenus Président de la République ou Premier Ministre sous la Vème République, il n'a rien à envier à celui de la IIIème  République (François Mitterrand, Nicolas Sarkozy, François Hollande quelques mois en 1997, etc.).

     

     

         La République des Avocats en chromos. Pourtant, je n’ai trouvé sur la toile qu’une dizaine de chromos en couleurs d’avocats célèbres de la Troisième République, ayant ou non accédé à la vie politique. Elles ont été éditées entre 1870 et 1890, années de plein essor de ce procédé (plusieurs centaines de millions de chromos ont été éditées par les nouveaux magasins et commerces durant le dernier tiers du XIXème siècle). Je présume que les centaines d’autres avocats renommés de cette époque ont été victimes du déclin progressif du procédé de la chromolithographie, remplacé, dans les années 1900-1910, par celui de la photographie (on trouve sur la toile une multitude de portraits photographiques d’avocats de ces années réalisés par l’atelier de Nadar. Par exemple sur Google image avec ces trois mots : Nadar, avocat, portrait). C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je n’ai pas non plus découvert de chromos de femmes avocates du XIXème siècle (les étudiantes licenciées en droit n’ont été admises à plaider que depuis une loi du 1er décembre 1901.

     

     

    Aristide Briand, Chromo Félix Potin

    4 Aristide Briand, 1862-1932, avocat à Saint-Nazaire puis à Pontoise, onze fois Président du Conseil, et vingt-six fois ministre sous la Troisième République (chromo colorée Félix Potin, tirée d’après une photographie de la seconde collection de 510 personnalités célèbres, lancée en avril 1908). 

     

        « Félix Potin, on y revient ». Mais il ne faut pas en déduire que nos commerces de la Belle Époque auraient négligé de commander aux imprimeurs-lithographes des chromos représentant des avocats illustres, de crainte qu’elles ne puissent passionner les enfants sages de leurs clientes (chromos publicitaires) ou les meilleurs écoliers (chromos didactiques dites Récompenses ou Bon-Point). Au contraire, lorsqu’ils se sont convertis, au début du XXème siècle, aux images photographiques, ils n’ont pas hésité à éditer des portraits d’avocats anciens et contemporains.

     

          Par exemple, la maison Félix Potin a édité, entre 1898 et 1952, quatre collections de portraits photographiques de personnalités de l’époque, en noir et blanc, qu’elle glissait dans ses tablettes de chocolat. On y découvre de nombreux avocats comme Henri Barboux, Edgar Demange, Danet, Henri Robert, Fernand Labori, Alexandre Bétolaud, Félix Decori, Mennesson, Raoul Rousset et Aristide Briand… (je les présenterai plus tard dans la rubrique photothèque). Le portrait photographique d’Aristide Briand, ci-dessus reproduit, a même été tiré en chromo colorée. Il s’agit d’un mélange singulier du procédé de la photographie, tirée en noir et blanc, et de la chromolithographie qui permet de rehausser la photographie de quelques couleurs.

     

         Mode d’emploi. com.   Toujours est-il que je vous invite à apprécier quelques chromos en couleur, éditées sous la Troisième République, qui représentent des avocats ayant accédé à la célébrité, soit par la vie politique, soit par leurs plaidoiries, soit par un mélange des deux genres (les avocats et les hommes politiques sont souvent reconnus pour leur talent oratoire).

     

          Cette ballade juridico-chromolithographique (mot inconnu de nos dictionnaires) débutera dans cette page d’aujourd’hui avec Léon Gambetta qui fut député, ministre, Président de la Chambre des députés et Président du Conseil.

     

             Elle se poursuivra, dans la page suivante, publiée dans le courant de la semaine, avec Adolphe Thiers, Président du Conseil et Président de la République.

     

               Elle sera suivie d'une page consacrée à quatre autres Présidents du Conseil ou de la République: ceux illustrant la République dite des Trois Jules: Jules Grévy, Jules Ferry et Jules Dufaure, rejoints par Aristide Briand.

     

          Elle se terminera, un peu plus plus tard, avec une page réservée à d’autres avocats de la Troisième République, souvent plus connus pour leurs plaidoiries que pour leur engagement politique: Pierre-Antoine Berryer, Fernand Labori, Henri Barboux, Jules Favre, et Adolphe Crémieux.

     

            En effet, je ne peux tous les joindre dans la page de ce jour, car d’une part « I’m not done », d’autre part, mon hébergeur gratuit Eklablog me recommande de ne jamais mettre plus de quinze images ou dossiers par page !  

     

     

     

     

    Léon Gambetta, le Borgne (chromolithographie or. 

    5 Léon Gambetta, le Borgne (chromolithographie or. Les portraits de Gambetta, le représente souvent sous son profil gauche. En effet, à l’âge de onze ans, un éclat d’acier lui avait fait perdre son œil droit, alors qu’il regardait travailler un ouvrier-coutelier).

     

       L’étudiant facétieux, surnommé, au Quartier latin, Torvo Oculo. Léon Michel Gambetta est né à Cahors, le 2 avril 1838. Son père, épicier italien aisé, y tenait le « Bazar génois », face à la cathédrale. Inscrit à l’âge de dix ans au Petit séminaire de Montfaucon, il y bénéficia de cette appréciation délicieuse : « Conduite : dissipé. Application : médiocre. Caractère : très bon, très léger, enjoué, espiègle. Talent : remarquable, intelligence très développée ». Il poursuivit ses études au lycée de Cahors et, après avoir obtenu son baccalauréat ès lettres, il décida de faire du droit au grand désespoir de son père qui voulait lui voir reprendre l’épicerie familiale. Il s’inscrivit en 1857 à la Faculté de Droit de l’Université de Paris, dont le prestige lui permettait d’accueillir près de la moitié des étudiants en droit de France (voir mes précédents articles dans la catégorie Faculté de Droit de Paris de ce blog). En 1859, entre deux leçons endormantes de droit romain et du code Napoléon, il signa la déclaration que la loi prescrivait aux enfants nés en France d’un père étranger, et obtint la nationalité française. L’année suivante, licencié en droit, il put s’inscrire comme avocat au Barreau de Paris.  

     

      L’homme de lois, prince du Quartier latin. Tout jeune avocat, Gambetta fut admis à la Conférence Molé (celle-ci fusionnera avec la Conférence Tocqueville en 1875), un club de rencontre (non échangiste !) et de discussion de questions parlementaires, passage obligé des hommes politiques aspirant à devenir Présidents de la République ou Chefs de gouvernement (par exemple : Adolphe Tiers, Mac Mahon, Jules Grévy, Sadi Carnot, Jean Casimir Perier, Félix Faure, Emile Loubet, Armand Fallières, Raymond Poincaré, Jules Simon, Pierre Waldeck-Rousseau, et… Léon Gambetta !). Il fréquenta également les milieux républicains qui se réunissaient dans divers cafés du Quartier latin (le café Voltaire, place du Panthéon, le café Procope, rue de l’Ancienne Comédie, le café du Palais…). Lors de l’une de ces réunions, en 1867, Jules Favre, gloire du Barreau de Paris, l’embrassa comme le représentant de la jeunesse. Quant à sa carrière proprement dite d’avocat, il rejoignit le cabinet d'Adolphe Crémieux, l’un des plus grands avocats de l’époque, qui avait été ministre de la Justice. en 1848, sous l’éphémère Deuxième République. 

     

     

     

     

    Baudin meurt sur une barricade dressée par des ouvriers qui protestaient contre le coup d’État du 2 décembre 1851 de Louis-Napoléon Bonaparte (lithographie en couleur)

    Baudin meurt sur une barricade dressée par des ouvriers qui protestaient contre le coup d’État du 2 décembre 1851 de Louis-Napoléon Bonaparte (lithographie en couleur d’après une gouache. Source : gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France).

     

         L’avocat de l’affaire Baudin. Mais c’est le 14 novembre 1868 que Gambetta acquit une grande réputation à l’occasion du procès concernant la liberté de la presse et son indépendance, suite à la mort, le 3 décembre 1851, de Jean-Baptiste Alphonse Victor Baudin, dit Alphonse Baudin, atteint d’une balle sur la barricade du faubourg Saint-Antoine aux côtés d’ouvriers manifestant contre le coup d’État de Napoléon III. Plusieurs députés de la Deuxième République, dont Baudin, avaient voulu les rejoindre sur cette barricade, mais ils furent repousser en ces termes : « Croyez-vous que nous allons nous faire tuer pour vous conserver vos 25 francs par jour [montant de l’indemnité des députés]». Baudin aurait répondu aux ouvriers après être monté sur la barricade : «Vous allez voir comment on meurt pour 25 francs ! » (Nul n’a jamais su qui était à l’origine de la balle qui le blessa mortellement !).

     

           « Ce procès me fit entrer par effraction sur la scène du monde » (Gambetta).  Gambetta se distingua au cours de ce procès bien tardif dans la défense de Charles Delescluze, propriétaire du Journal Le Réveil, à qui il était reproché d’avoir ouvert une souscription publique pour ériger un monument à la mémoire de Baudin, prêcheur d’une République authentiquement démocratique et sociale. Il prononça sa plaidoirie sur un ton violent et injurieux contre l’Empire se déclarant même « irréconciliable » avec celui-ci. Certes son client fut condamné à six mois de prison et 2 000 francs d’amende, mais Gambetta fut remarqué par le parti républicain, qui le fit entrer pour toujours dans la vie politique.

     

     

     

     

    Baudin meurt sur une barricade dressée par des ouvriers qui protestaient contre le coup d’État du 2 décembre 1851 de Louis-Napoléon Bonaparte (lithographie en couleur

    Léon Gambetta, un grand personnage de la Troisième République en redingote, aujourd’hui bien oublié* (chromo À La Ville de Saint-Denis).

     

    * voir l’article, publié, en 1961, dans la Revue Suisse d’Histoire, librement accessible en ligne, de Maurice Baumont (1892-1981), spécialiste de la Troisième République française, intitulé « La personnalité et le rôle de Gambetta »: https://www.e-periodica.ch/cntmng?pid=szg-006%3A1961%3A11%3A%3A45

     

      L’homme politique. C’est ainsi que Gambetta fut élu député du groupe républicain, le 24 mai 1869, en même temps dans le quartier populaire parisien de Belleville, et à Marseille (il choisira de représenter Marseille comme député). Il se distingua, le 5 avril 1870, à la tribune du Corps législatif par une diatribe contre un sénatus-consulte de Napoléon III soumis au plébiscite. Puis il fut porté au pouvoir grâce aux émeutes populaires du 4 septembre 1870, qui lui permirent de proclamer la Troisième République devant la foule rassemblée place de l’Hôtel-de-Ville (voir ci-dessus mon baratin sous l’image n°2).

     

     

     

     

    Départ de Gambetta en ballon, le 7 octobre 1870 (chromo didactique Récompense)

                    8 Départ de Gambetta en ballon, le 7 octobre 1870 (chromo didactique Récompense). 

     

            « Le désastre de Sedan a attiré le despotisme d’un seul [Louis-napoléon Bonaparte], mais aussi la défaillance de tous » (Gambetta).  Après le désastre de Sedan, le 2 septembre 1870, et la proclamation de la Troisième République par Gambetta, le 4 septembre suivant, un gouvernement de la Défense nationale fut aussitôt constitué sous l’égide du général Trochu, gouverneur militaire de Paris. Gambetta y fut nommé ministre de l’Intérieur. Mais comme Paris était assiégée par les prussiens depuis le 18 septembre, ce gouvernement chargea Gambetta de quitter la capitale pour tenter de réorganiser la défense de nos armées en province. Pour rejoindre Tours, Gambetta eût alors l’idée d’emprunter une montgolfière qui s’éleva au matin du 7 octobre 1870.

     

     

     

     

    Troisième République-1870. Départ de Gambetta en ballon-1871 (chromo Perles du Japon, rue Antoine Chapu, à Paris).

    Troisième République-1870. Départ de Gambetta en ballon-1871 (chromo Perles du Japon, rue Antoine Chapu, à Paris). 

     

       L’envol agité de Gambetta. Les illustrateurs et imprimeurs de chromolithographies de l’époque se ruèrent sur cet événement peu commun, et les grands commerces et magasins multiplièrent les chromos publicitaires et didactiques à destination des enfants de leurs clientes, présumés être émerveillés par ce vol en ballon. C’est la raison pour laquelle on trouve aujourd’hui sur la toile de très nombreuses chromos en couleurs de la fin du XIXème siècle représentant cet acte de bravoure de Gambetta, notre jeune avocat-homme politique. Toutefois, ces chromos didactiques s’abstiennent de mentionner que l’envol de Gambetta se solda par une déconfiture complète comme le raconte le contributeur du site herodote.net :

     

    « Gonflé au gaz d'éclairage, le ballon de 16 mètres de diamètre s'élève au matin du 7 octobre 1870, de la butte Montmartre avec à son bord l'impétueux ministre et un assistant. Mais le vent le pousse vers le nord et les lignes prussiennes... Les deux voyageurs lâchent du lest pour s'élever et échapper aux tirs ennemis. Leur ballon s'écrase en milieu d'après-midi près de Beauvais, où ils sont recueillis par des paysans. Après trois jours de voyage épique en voiture à cheval et en train, Gambetta arrive enfin à Tours où il rejoint une délégation gouvernementale dirigée par Adolphe Crémieux… » (source : herodote.net. Le media de l’histoire. 7 octobre 1870, Gambetta quitte Paris en ballon). https://www.herodote.net/almanach-ID-1873.php#:~:text=Gonfl%C3%A9%20au%20gaz%20d'%C3%A9clairage,et%20%C3%A9chapper%20aux%20tirs%20ennemis

     

     

     

     

     

    Gambetta (chromo d’une série didactique intitulée Souvenirs historiques nationaux).

                     10 Gambetta (chromo d’une série didactique intitulée Souvenirs historiques nationaux).  

     

      L’homme de guerre infortuné. Ayant quand même pu rejoindre Tours, « Gambetta s’attache à raviver le patriotisme de la délégation gouvernementale dans une proclamation éloquente. Il poursuivit les armements et organise de nouvelles armées qui engageront avec l’ennemi la lutte suprême » (note de J. Boss, au dos d’une chromo didactique). Mais « obligé d’abandonner Tours lorsque les Prussiens eurent pris Orléans et s’avancèrent dans la vallée de la Loire, Gambetta transporta le gouvernement à Bordeaux. Les dernières armées qu’il forma et qu’il compromit en leur imposant une mauvaise direction, furent défaites. Paris capitula à la fin de janvier 1871. Gambetta ne désespéra point encore. Il voulait continuer la guerre à outrance, mais une Assemblée nationale avait été réunie et voulait la paix » (note de G. Ducoudray au dos d’une autre chromo didactique). Un armistice fut alors signé par Jules Favre, au nom du gouvernement français, avec Bismarck, fin janvier 1871, et Gambetta, qui y était défavorable, démissionna du gouvernement le 6 février 1871.  

     

     

     

     

    Gambetta : « Pensons-y toujours, n’en parlons jamais » (chromo didactique).

                     11 Gambetta : « Pensons-y toujours, n’en parlons jamais » (chromo didactique).  

     

       L’homme symbole des républicains. Gambetta ne tarda pas à revenir siéger à l’Assemblée comme député du Bas-Rhin puis de la Seine, et à prendre la direction du parti de l’Union républicaine. Il fut alors l’adversaire le plus redoutable des partis monarchiques, luttant dans la presse (ses journaux : La République française, et La Petite République française), dans les réunions, dans ses voyages à travers la France pour faire triompher la République. Ses discours le rendirent justement célèbre. C’est d’ailleurs en faisant allusion à la prochaine revanche des Français contre les Allemands qui avaient gagné les deux provinces sœurs de l’Alsace et de la Lorraine, qu’il prononça lors des élections de juillet 1871 ces paroles légendaires : « Pensons-y toujours, n’en parlons jamais » (autrement dit la revanche n’est pas pour tout de suite. Elle aura lieu avec la victoire de la guerre de 1914-1918 qui permit la réintégration de l’Alsace-Lorraine à la France). 

     

     

     

     

    Gambetta, Président du Conseil du 14 novembre 1881 au 30 janvier 1882 (chromo Cordonnerie française, 18 rue Turbigo, Paris).

    12 Gambetta, Président du Conseil du 14 novembre 1881 au 30 janvier 1882 (chromo Cordonnerie française, 18 rue Turbigo, Paris).  

     

        « On ne jure que par Gambetta. Il devient légendaire » (Jules Grévy). Gambetta fut encore l’artisan des lois constitutionnelles de 1875 instaurant définitivement la Troisième République (loi du 24 février 1875 sur l’organisation du Sénat ; loi du 25 février 1875 sur l’organisation des pouvoirs publics ; loi du 16 juillet 1875 sur les rapports entre les pouvoirs publics). Réélu plusieurs fois député des Bouches du Rhône, du Bas Rhin ou de Paris de 1875 à 1881, il deviendra, sous la présidence de la République de Jules Grévy, lui aussi un ancien avocat, Président du Conseil et ministre des Affaires Étrangères le 14 novembre 1881. Mais il sera renversé, moins de trois mois après, le 30 janvier 1882.

        

          « Que n’a-t-on pensé qu’il faut vingt années pour former un Gambetta quand on en trouve un, et qu’il ne faut que l’accident d’une seconde pour le perdre » (Jean-Jacques Weiss). Gambetta décédera, la même année, à l’âge de 44 ans, dans la nuit du 31 décembre 1882 au 1er janvier 1883, dans sa propriété des Jardies à Ville d’Avray, des suites d’une pérityphlite*. Sa mort fut un deuil pour tous les patriotes républicains français. Son cercueil enveloppé d’un linceul fut accompagné jusqu’au cimetière du Père Lachaise par plusieurs centaines de milliers de personnes.

     

    * « Le 18 décembre, Gambetta ressent de cruelles douleurs au ventre : l’abdomen graisseux et gonflé présente une sorte d’empâtement : c’est ce que les traités de médecine de l’époque désignent sous le nom de pérityphlite, inflammation greffée sur le cœcum et risquant de provoquer soit la péritonite simple, soit la péritonite par perforation ».— (Alexandre Zévaès, Histoire de la Troisième République 1870 à 1926, Éditions Georges-Anquetil, 1926, p.217). 

     

     

     

    La Troisième République française vue par les allemands amateurs de bouillons cube (chromo Liebig).

    13 La Troisième République française vue par les allemands amateurs de bouillons cube (chromo Liebig).

     

                « À suivre… ». À très bientôt avec cinq autres avocats devenus, sous la Troisième République, Présidents de la République ou du Conseil, en chromos de l’époque : Adolphe Thiers, Jules Grévy, Jules Ferry, Jules Dufaure et Aristide Briand.