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1 Joueurs de Paume au jardin du Luxembourg (gravure en noir et blanc d’après un dessin de Gustave Doré. Le Journal Illustré. 1868)
Avant le tennis, le jeu de Paume. Bien avant le tennis, dont le brevet a été déposé, en 1874, à la chambre des métiers de Londres par le Major Wingfiel, il existait des jeux de balles lancées avec la paume de la main, pour cette raison dénommés jeux de Paume. Ainsi, en 386 après Jésus-Christ, un jeu de Paume aurait été construit à Constantinople par Théodose II, permettant d’envoyer une petite boule contre un mur. Au XIIIème siècle, les moines en soutane jouaient également avec une balle qu’ils lançaient sur le sol et les murs des cloîtres pour bénéficier des bienfaits de l’exercice physique entre deux prières.
« Le roi des jeux et le jeu des rois ». En France, au Moyen Age, le jeu de Paume était fort apprécié non seulement des étudiants, des humanistes, du clergé et des nobles mais encore de nos rois. François Ier, Henri II, Charles IX et Henri IV le pratiquaient avec le plus grand talent dit-on. D’autres rois auraient même perdu la vie à l’occasion de parties (Louis X le Hutin en juin 1316, Charles VIII en avril 1498, Philippe de Castille en 1506).
2 Une salle de Courte Paume
Le jeu de Paume pouvait être pratiqué, en extérieur, sans filet, dans les parcs et les fossés des châteaux, sous le nom de Longue Paume (parfois écrit longue Paume ou longue paume, voire avec un tiret au milieu !).
Le jeu de Paume était également pratiqué, en salle, sur un terrain rectangulaire, pavé ou carrelé, marqué de quatre lignes transversales, appelées « chasses ». Il portait alors le nom de Courte Paume et la salle elle-même était appelée « tripot ». Les joueurs servaient de côté en envoyant la balle contre le mur qui faisait la longueur du court, et au-dessus d'un filet (plus haut que celui de notre tennis actuel et davantage incurvé). Ce jeu en salle eut un succès très vif. Ainsi, en 1596, comptait-on 250 salles de jeu de Paume à Paris dont 6 dans la seule rue Mazarine, pour une population d’à peine 300 000 habitants (le 22 juin 1397, le prévôt de Paris avait interdit la pratique du jeu de Paume sauf le dimanche « parce que plusieurs gens de métier et autres du petit peuple quittaient leur ouvrage et leur famille pendant les jours ouvrables, ce qui était fort préjudiciable pour le bon ordre public »).
Beaucoup de ces salles de Courte Paume faisaient office de maisons de jeux d’argent (le tripot dans son sens péjoratif), grâce aux paris qui y étaient autorisés depuis des lettres patentes du roi François Ier en date du 9 novembre 1527. Telle serait d’ailleurs l’origine de l’expression « paumer son argent ».
3 La Paume en gravure et poésie du XVIIème siècle (Bibliothèque municipale de Lyon).
C’est au XVIème siècle que la petite boule, faite de poiles de chiens serrés ou de bourre de laine et recouverte de cuir, nommée l’esteuf (ancienne orthographe du mot éteuf), fabriquée par les maîtres-paumiers ou paumiers estuviers, prit le nom de balle (du latin balla). Cette balle ne devait plus contenir, comme cela arrivait parfois, de sable ou de chaux la durcissant, afin d’éviter de blesser les joueurs la recevant en plein corps (aujourd’hui, la balle est composée d’une boule de liège recouverte d’un genre de flanelle).
Et, pour frapper cette balle, la paume de la main des joueurs fut remplacée par un gant renforcé avec du cordage, puis par un battoir en bois, enfin par une raquette, venue d’Italie, en forme de guitare avec un long manche et un cordage en boyaux de mouton,
4 Une partie de Longue Paume au jardin du Luxembourg (tableau à partir d’un dessin de Gustave Doré reproduit en 1868 dans Le Journal Illustré en première page de couverture. Voir l’image n° 1 de cette page).
Au XVIIIème siècle, le jeu de Paume tomba en déclin. Les salles de Courte Paume étaient récupérées pour le théâtre comique devenu à la mode. Les terrains extérieurs disparurent également. Ainsi, en 1853, à Paris, la Longue Paume ne se jouait plus qu’aux Champs Élysées. Mais, avec la construction du Palais de l’Industrie (le Grand Palais) aux Champs Élysées pour l’exposition universelle de 1855, l’empereur Napoléon III décida son transfert au jardin du Luxembourg, en plein cœur du Quartier Latin, à deux pas de l’École de Droit de la place du Panthéon.
5 Jeu de Longue Paume du jardin du Luxembourg (j’ignore si ce panneau bien fatigué existe toujours au Luxembourg !).
Les joueurs de Longue Paume du jardin du Luxembourg louèrent aussitôt une petite chambre dans une rue voisine. Ils s’y changeaient, avant de rejoindre leur nouveau terrain de jeu sous le regard amusé des badauds :
« Et le public s'amuse en les voyant passer.
L'un par son gilet blanc prêtant aux ridicules,
Est pris pour le Pierrot qui joue aux funambules ;
L'autre, pour un jockey qui se lance en avant ;
Celui-ci, pour un singe ou pour un chien savant. »6 Le premier chalet du Longue Paume du jardin de Luxembourg (photographie datée 1905).
Fort heureusement, en 1870, les joueurs de Longue Paume du Luxembourg, réunis en un Cercle (aussi appelé Société), furent autorisés à construire un élégant chalet de bois jouxtant leur terrain de jeu pour pouvoir se changer et ranger leur matériel.
Dans les années 1930, ce chalet fut démoli et remplacé par un kiosque en béton, baptisé, en 1948, Pavillon Raynal, du nom du premier président de la Fédération française de Longue Paume (elle-même affiliée, depuis son origine, et aujourd’hui encore, à la Fédération française de tennis).
7 Partie de Longue Paume sur le terrain ad hoc du jardin du Luxembourg en 1900.
En annexe à la grande exposition universelle de Paris de l'année 1900, fut organisé au jardin du Luxembourg, du 14 mai au 25 octobre, un championnat international de Longue Paume mettant aux prises plus d’une trentaine d’équipes. La Société de Longue Paume du Luxembourg (de Paris), remporta trois des quatre épreuves ; celle de Valenciennes la quatrième.
On ajoutera que la Longue Paume était présente aux Jeux Olympiques de 1908.
8 Le nouveau Pavillon Raynal du Jardin du Luxembourg
Le second kiosque des joueurs de Longue Paume du jardin de Luxembourg, qui avait été édifié dans les années 1930, fut lui-même démoli en 1983 et remplacé, l’année suivante, par ce nouveau chalet en bois construit dans une forme presque identique.
9 La Longue Paume au jardin du Luxembourg un dimanche matin
Aujourd’hui, la Longue Paume n’est plus jouée qu’en Picardie et au jardin du Luxembourg sur un terrain rectangulaire de plus de quarante-six mètres de long et de 12 à 14 mètres de large, près des tennis. Dans les parties dites enlevées, la balle doit franchir, à chaque échange, une zone neutre du terrain. En revanche, dans les parties dites terrées, aucun obstacle n’est à franchir, et les joueurs peuvent rabattre la balle au sol.
Si vous voulez mieux comprendre « comment ça marche », chaque dimanche matin, la Société Parisienne de Longue Paume propose aux amateurs et aux curieux d’assister à des matchs et/ou entraînements, et même de prendre des leçons (séances, le dimanche à 10 h. 30).
10 La Coupe annuelle de Paris en Longue Paume au jardin du Luxembourg
Senatus-consulte. Pour libérer les étudiants en droit visiteurs accidentels ou épisodiques de ce blog, et leur permettre de reprendre leurs notes de cours pour préparer leurs exams’ et/ou antisèches, je terminerai cette saga consacrée à La Longue Paume au Quartier Latin avec cette annonce sénatoriale :
Chaque année, le premier dimanche du mois de septembre, est organisée la Coupe de Paris en Longue Paume, aussi appelée Coupe du Sénat, dans les jardins du Palais du Luxembourg (actuelle maison du Sénat pour préretraités aisés de la politique en surcharge pondérale. Chacun des résidents bénéficie d’une vue sur le jardin du Luxembourg et reçoit un honnête pécule allégé d’impôts vulgaires).
11 Le droit de la Longue Paume par le Cercle de la Longue Paume du Luxembourg
A bientôt donc pour ma prochaine saga consacrée, évidemment, au tennis au Luco (J : jardin du Luxembourg dans le jargon estudiantin du siècle passé), héritier (et fossoyeur) du jeu de la Longue Paume auquel il a notamment emprunté son étonnante manière de compter 15, 30, 45[0].
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1 Jardin du Luxembourg. Joueurs de diabolo (CPA 1909. ND)
À partir du printemps 1907, un nouveau jeu fut à la mode dans les tous les parcs, jardins et squares de Paris : le diabolo ou jeu du diable (le diable désignait jusqu’alors une toupie d’Allemagne double, très bruyante, avec laquelle jouaient les jeunes enfants).
2. Partie de diabolo sur la terrasse du Jardin du Luxembourg (chromo Chocolat-Révillon).
À l’aide de deux baguettes réunies par une corde, le joueur faisait rouler sur celle-ci une sorte de petite toupie percée de deux trous, appelée diabolo, puis il la faisait sauter en l’air avant de la rattraper sur la corde et de recommencer le plus grand nombre de fois.
Le 22 septembre 1907, le jeune Alfred Meunier, âgé de treize ans, lança son diabolo 3.258 fois, sans un seul arrêt, en à peine 1 heure et 35 minutes !
3. Le Jeu du Diable (Publicité La Belle Jardinière).
Ce jeu, venu d’Angleterre, était d’origine française puisque, sous le règne du roi Louis XIV, au XVIIIe siècle, les dames de la cour y jouaient sous le nom de jeu du diable. Mais à cette époque, le petit diable n’était pas en celluloïd, élastique ou caoutchouc : il était en bois, en métal voire en cristal !
4. Partie de diabolo dite de « bris de glace ».
Sous l’Empire, le diabolo se pratiquait encore dans les salons de la bourgeoisie. Dans la mesure où ce jeu occasionnait des bris de vitres, de glaces et de vases, les joueurs furent bientôt invités à « aller jouer dehors ». Malheureusement pour eux, le préfet de police de Paris, Louis Lépine, classa le diabolo parmi les jeux dangereux et l’interdit en conséquence dans les rues de la capitale. Aussi les joueurs, enfants et adultes, s’invitèrent-ils dans les parcs et jardins parisiens, en particulier le Jardin du Luxembourg.
5. Protestation d’un promeneur paisible du Jardin du Luxembourg (chromo n.d.).
En dépit des lettres de protestation de paisibles promeneurs du Jardin du Luxembourg, les questeurs du Sénat chargés de l’administration de ce Jardin (le Jardin du Luxembourg appartient au Sénat) autorisèrent le diabolo dans l’allée de l’Observatoire (les boules, le jeu de paume, le tennis et le croquet furent également autorisés par la Questure. L'entraînement « en tenue de course à pied » était, quant à lui, accepté depuis 1899 sous réserve « de ne pas nuire au bon ordre du jardin »).
On joue à ce jeu charmant
Lorsqu'on est aimable.
Vieillard en vain s'y mettant,
Envoie tout, en murmurant,
Au diable! au diable !
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« C’est aujourd’hui que les premières courses des Vélocipèdes ou Draisiennes auront lieu au jardin du Luxembourg » (Journal de Paris, 5 avril 1818, n° 95).
Le vélocipède (du latin velox, velocis, rapide, véloce, et du suffixe pède, aux pieds rapides), doté de deux roues et d’un guidon, est l’ancêtre bicentenaire de nos vélos enrichis, au fil des ans, de pédales, pneumatiques et dérailleur.
Il a été inventé par le baron allemand Karl Drais qui en déposa le brevet d’invention en France, le 17 février 1818, avec cette définition : « le vélocipède est une machine inventée dans la vue de faire marcher une personne avec une grande vitesse, en rendant sa marche très légère et peu fatigante par l'effet du siège qui supporte le poids du corps qui est fixé sur deux roues qui cèdent avec facilité au mouvement des pieds ».
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Comme beaucoup d’monde j’ai fait mon droit,
Mais vraiment je m’ souviens pas d’tout !
Et pourtant j’ai beaucoup de mémoire.
Mais y’a des trucs que j’retiens,
et des trucs que j’retiens pas !
Je n’ sais plus la date de la promulgation du Code civil,
Mais je m’souviens de ce jour où je t’ai vue pour la première fois à la fac.
Je n’sais plus si une présomption simple c’est mieux ou moins bien qu’une présomption irréfragable,
Mais je m’souviens, parfaitement bien, de ton sourire.
Je n’sais plus si le droit de propriété c’est un droit réel ou un droit personnel,
Mais j’me souviens, joliment bien, de la robe que tu portais ce jour là.
Je n’sais plus ce que ça veut dire ab intestat,
Mais j’me souviens de ce p’tit coin du Luxembourg où nous allions après les cours.
J’sais plus si on écrit un contrat « innommé » ou un « contrat innomé »,
Mais j’me souviens des mots que tu as murmuré quand je t’ai pris la main.
J’me rappelle plus du prénom de Domat,
Mais toi tu t’appelais Isabelle !
Je m’ souviens pas si c’est le droit objectif qui a mangé le droit subjectif, ou si c’est le droit subjectif qui a mangé le droit objectif,
Mais je m’rappelle des jours où l’on s’asseyait à la même table au Resto’ U.
Je n’me souviens pas très bien des conditions légales du mariage,
Mais je m’rappelle des paroles de la chanson que je te fredonnais timidement : « Isabelle, Isabelle, je t’aime ».
Je n’sais plus très bien ce que racontait la prof’ de droit de la famille à cause des grèves,
Mais je m’souviens, parfaitement bien, qu’on s’était juré de ne jamais se séparer, d’avoir une maison, un beau jardin, des bébés et de vivre heureux pour une longue éternité…
Je n’sais plus très bien si y’a encore des recours ou non après un arrêt de rejet de la Cour de cassation,
Mais je m’souviens, parfaitement bien, avoir effleuré tes lèvres de ma bouche affolée.
Je m’ souviens pas très bien quand la loi est impérative et quand elle l’est pas,
Mais je m’souviens, parfaitement bien, que je n’avais que toi au monde et que rien ne pouvait nous séparer.
Je m’souviens pas très bien pourquoi les créanciers chirographaires étaient malheureux,
Mais je m’souviens, parfaitement bien, que pour être heureux il fallait passer par ton cœur.
Je m’souviens pas très bien pourquoi y’a des arrêts qui commencent par « Attendu que… », et d’autres par « Considérant que… »,
Mais je m’souviens bien, parfaitement bien, que je t’aimais tous les jours, même les jours fériés.
Je m'souviens plus très bien si j'ai rendu tous mes livres à la BU quand on a quitté la fac.
Mais je m' souviens bien, parfaitement bien, de ce jour où tu es partie pour l'étranger.
Peut-être que tu m'as oublié, moi je ne t'ai jamais oubliée.
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Elle a passé, la jeune fille
Vive et preste comme un oiseau
À la main une fleur qui brille,
À la bouche un refrain nouveau.C'est peut-être la seule au monde
Dont le cœur au mien répondrait,
Qui venant dans ma nuit profonde
D'un seul regard l'éclaircirait !(Gérard de Nerval. Une allée du Luxembourg)
Chers visiteurs, vous trouverez de merveilleuses cartes postales colorisées à la main dans les années 1900, du Jardin du Luxembourg, dans la rubrique "Au Quartier Latin".
Mais comme l'écrivait Raymond Peynet (1908-1999) au dessus de son dessin des Amoureux, il y a bien d'autres jardins et squares à Paris pour accueillir les premiers amours de nos jeunes étudiants!
En voici quelques uns :
1 Le Parc Monceau. Les ruines
2 Le Parc Monceau. Le pont
3 Le Parc des Buttes Chaumont
4 Le Parc Montsouris. Le lac
5 Le Parc Montsouris. Le kiosque
6/7 Le Jardin des Tuileries
8 Les Jardins du Trocadéro
9 Le Square d'Anvers
10 Le Square de Cluny
11 Le Square des Arts et Métiers
12 Le Square des Batignolles
13 Le Square des Batignolles. Le kiosque
14 Le Square du Temple
15 Le Square Parmentier