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    Une école épiscopale au Moyen-Âge

    25. Scène d’enseignement dans une école épiscopale au Moyen Âge. Le maître exécute la lectio (lecture) sur sa chaire, appelée cathédrale (enluminure du XIVème siècle).

     

    D'autres ordonnances de Charlemagne et des prescriptions de l’Église faisant suite au Concile d’Aix La Chapelle de 816 sur la discipline ecclésiastique demandèrent à chaque cathédrale d’ouvrir une école pour y dispenser des enseignements supérieurs aux jeunes gens qui se destinaient à devenir clercs de l’Église. Plus tard, les écoles cathédrales accueillirent également des jeunes gens étrangers à toute vocation ecclésiastique.

     

     

     

    L'école de la cathédrale de Laon

    26. Au Moyen Âge, l’école de la cathédrale de Laon accueillait des jeunes élèves anglais pour les former à la vie cléricale (Dessin : Tavernier de Jonquières. Gallica-BNF). 

     

    En province, plusieurs écoles cathédrales s’ouvrirent ainsi à l’enseignement supérieur (Lyon, Chartres, Orléans, Reims, Laon, Rouen et Langres). Elles avaient pour point commun de dépendre institutionnellement de leur chapitre respectif (le chapitre désignait un collège de clercs appelés chanoines) et du Chancelier de l’Église. En revanche, il ne semble pas qu’il y ait eu une grande uniformité dans leurs modes de fonctionnement et les études dispensées.

     

     

     

    L'Île Saint-Louis (plan vers 1550)

    27. L’Île Saint-Louis et la cathédrale Notre-Dame de Paris (plan Truschet et Hoyaux, vers 1550).

     

    Pareillement, plusieurs écoles se créèrent dans l’Île de la Cité, au centre de Paris, comme l’École du cloître (escoles du cloistre), aussi appelée École de Paris. Elles connurent leur apogée au XIIème siècle avec des Maîtres de grand renom parmi lesquels Guillaume de Champeaux (v. 1070-1121) et Pierre Abélard (v. 1079-1142). L’université de Paris (ou de la Sorbonne) et sa  Faculté de Droit en sont les héritières lointaines.

     

     

     

    IV. Les Écoles du cloître de Notre-Dame de Paris

    28. Le parvis de la cathédrale Notre-Dame de Paris où étaient installées les écoles

     

    Certaines de ces écoles étaient installées sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame de Paris au côté des étaux de marchands. Voici la légende de cette estampe ancienne, en vieux français : « Vue de la principalle entrée de l’Eglise de Nostre Dame de Paris, Bastie sous le Regne de Philippes Auguste environ l’an 1200. Tout cet édifice eft fondé sur Pilotis et creux par-dessous en plusieurs endroits, la hauteur des Tours ou Clochers eft de 65 Toises. Ce lieu est estimé le plus bas de Paris ».

     

     

    Le cloître Notre-Dame

    29. Le cloître Notre-Dame vu de l’Île Saint-Louis (Nicolas Raguenet, 1753)

     

    D’autres étaient installées dans le cloître (cloistre) de la cathédrale Notre-Dame. Le cloître désignait un ensemble, clos de murs avec quatre portes, d’une cinquantaine de maisons de l’Île de la Cité (les églises Saint-Jean-le-Rond et Saint-Denis-du-Pas étaient situées dans le cloître). Ces maisons étaient habitées par les chanoines de la cathédrale (les écoliers internes étaient fréquemment logés chez les chanoines).

     

     

     

    Rue du Cloître Notre-Dame : la Maison du chanoine Feydeau

      30. Rue du Cloître Notre-Dame (n° 16) : la Maison du chanoine Feydeau

     

    Le cloître Notre-Dame se situait au nord et à l’est de la cathédrale, le long de la Seine (quartier aujourd’hui délimité par la rue du Cloître Notre-Dame qui longe la cathédrale, la rue d’Arcole et le quai aux Fleurs qui borde la Seine). La plupart des maisons des chanoines du Cloître Notre-Dame ont disparu. L’une des seules qui subsistait au siècle dernier, était celle du chanoine Feydeau au numéro 16 de la rue du Cloître Notre-Dame. Elle servit un temps comme presbytère de l’église Saint-Jean-le-Rond. Nul ne sait quand et pourquoi elle a été rebaptisée Maison du Roi Dagobert. J’ignore si elle existe encore.

     

     

    Le parvis de Notre-Dame et l’Hôtel-de-Dieux

               31. Le parvis de Notre-Dame et l’Hôtel-de-Dieux (Hôtel Dieu).

     

    La présence dans le cloître de jeunes écoliers laïcs externes parfois turbulents portait atteinte à la tranquillité des chanoines. Aussi plusieurs écoles du cloître furent-elles transférées au sud de la cathédrale sur un terrain dénommé « le Chantier », entre le « Port-L’Évêque » et l’« Hôtel-de-Dieux ».

     

      

    L'Hôtel Dieu

    32. L’Hôtel-de-Dieux (Hôtel Dieu), à proximité duquel s’établirent plusieurs écoles de la cathédrale.


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    Honoré Daumier. Les gens de justice

    Maître Chapotard lisant dans un journal judiciaire l’éloge de lui-même par lui-même (Honoré Daumier. Les Gens de Justice)

     

     ☺Plaidoirie champêtre. C’est un avocat qui habite un beau pavillon de chasse en Sologne. Son épouse est partie quelques jours chez sa mère souffrante. Il rentre un soir tranquillement chez lui, après avoir plaidé au tribunal.

     

    Et, devinez ce qu’il trouve devant la porte de son pavillon de chasse, transie de froid ? Une toute petite grenouille verte en larmes. Il la ramasse et l’emmène à l’intérieur. Il l’essuie et allume un grand feu de bois dans la cheminée pour la réchauffer. Il lui donne un petit peu à manger. Comme elle a encore froid, il se couche dans son lit avec elle, et il la serre dans ses bras, bien au chaud. Et… miracle : la petite grenouille se transforme en une très jolie jeune fille.

     

    Mais, à cet instant, son épouse revient.

     

    Eh bien !  Elle n’a jamais voulu croire à l’histoire de la petite grenouille verte !

     


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    Le Génie Juridique

                                                                                       Le Bon Prof

     

     

     

    Le génie juridique. Pendant un cours d’histoire de droit, l’éminent professeur Cujas présente à ses étudiants un exemplaire de 1648, poussiéreux et plein d’araignées, des Institutes de Justinien qu’il a découvert dans une malle du grenier de la fac pendant les vacances.

     

     Au moment où il l’ouvre, un génie juridique en sort et dit d’une voix grave:

     

    « Professeur Cujas, pour te récompenser de ton comportement désintéressé et exemplaire, je vais t’accorder un vœu parmi trois propositions. Tu choisiras sans pouvoir revenir en arrière et, ensuite, je disparaîtrai à jamais.

    Voici les trois souhaits que je te propose : une richesse infinie, une sagesse infinie, ou une beauté infinie ».

     

    Le génie laisse au professeur quelques secondes pour réfléchir puis il demande :

     

    « Je t’écoute, quel est ton choix ? »

     

    Sûr de lui et sans l’ombre d’une hésitation, le professeur Cujas répond :

     

     « Je choisis l’infinie sagesse ».

     

    « Eh bien c’est fait ! » répond le génie en s’évanouissant dans un nuage de fumée.

     

    Maintenant, toutes les têtes des étudiants se tournent vers leur professeur dont le visage apparaît auréolé d’un halo de lumière.

     

    « Professeur, dîtes quelque chose » lance quelqu’un.

     

    Et le professeur répond :

     

    « J’ai été nul ! J’aurais dû prendre l’argent ».


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             Une audience du tribunal pour enfants en 1920 (Louis Sabbatier. L'Illustration)

     

                                           

                                          Le miroir brisé

     

    Le petit homme qui chantait sans cesse
    le petit homme qui dansait dans ma tête
    le petit homme de la jeunesse
    a cassé son lacet de soulier
    et toutes les baraques de la fête
    tout d'un coup se sont écroulées
    et dans le silence de cette fête
    dans le désert de cette tête
    j'ai entendu ta voix heureuse

    ta voix déchirée et fragile
    enfantine et désolée
    venant de loin et qui m'appelait
    et j'ai mis ma main sur mon cœur
    où remuaient
    ensanglantés
    les sept éclats de glace de ton rire étoilé.

     

                                   Jacques Prévert, Paroles


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    Charlemagne visitant les écoles

                                                20. Charlemagne visitant les écoles

     

    D’autres types d’écoles apparurent aux Moyen Âge, s’ajoutant aux écoles monastiques. Il en fut ainsi des écoles paroissiales (ou presbytérales), en milieu rural, et des écoles épiscopales (ou cathédrales), en milieu urbain.

     

     

    Une école cathédrale au Moyen-Âge

    21. Scène d’enseignement au Bas Moyen Âge dans une école cathédrale. Le Maître enseigne depuis sa chaire professorale (du grec kathedra [latin : cathedra], dérivé de hedra « siège »). Les élèves sont souvent assis, à même le sol, sur de la paille.

     

    Ce développement des écoles chrétiennes nous ramène à ce « Sacré Charlemagne » de la chanson de France Gall. Son enfance est peu connue et nul ne sait s’il a eu la chance, diraient les premiers de classe, ou la malchance, diraient les joyeux cancres,  d’aller à l’école pour apprendre si ce n’est le droit au moins la lecture (il apprit à écrire à l’âge adulte). Pourtant, c’est bien Charlemagne qui a encouragé la création d’écoles chrétiennes, en dehors des monastères, dans les églises collégiales et cathédrales, sous l’autorité des chanoines.

     

     

    Chapitre 72 de l'Ordonnance Admonitio generalis de Charlemagne

    22. Le chapitre 72 de l’ordonnance de Charlemagne Admonitio generalis (BNF, Manuscrits, Latin 10758, p. 50)

     

    Ainsi son ordonnance impériale ou capitulaire « Admonitio generalis » (exhortation générale), promulguée le 23 mars 789, longue de 82 chapitres (capitula), comporte-t-elle un chapitre 72, spécialement adressé aux prêtres, qui invite les monastères, les presbytères et les évêchés à créer des écoles pour instruire les enfants. Charlemagne y déclare : « Nous voulons que des écoles soient créées pour apprendre à lire aux enfants. Dans tous les monastères, dans tous les évêchés, il faut enseigner les psaumes, les notes, le chant [d’église], le comput [calcul], la grammaire et les livres religieux : parce que souvent, ceux qui souhaitent bien prier Dieu le font mal, à cause de livres non corrigés. Ne permettez pas que vos élèves les altèrent, soit en les lisant, soit en les écrivant. Et s’il faut copier les Évangiles, le psautier ou le missel, que des hommes d’expérience les transcrivent avec le plus grand soin… ».

     

     

    L'enseignement supérieur dans une église épiscopale au Moyen Âge

       23. École épiscopale au Moyen Âge. Les jeunes gens y suivent un enseignement supérieur.

     

    Par la suite, les écoles épiscopales ou cathédrales furent chargées de l’enseignement supérieur des jeunes gens se destinant ou non à devenir clerc. Dans la mesure où les évêchés étaient déjà en charge des tribunaux ecclésiastiques, ils pouvaient fort bien enseigner le droit et la procédure. D’ailleurs, plus tard, ces écoles cathédrales furent à l’origine des premières universités et de nos Facultés de Droit (v. les prochaines rubriques). En extrapolant, on peut donc considérer que la Faculté de Droit de Paris, héritière de la communauté (ou université) des « Maîtres et écoliers de Paris », elle-même descendante de diverses écoles du cloître de la cathédrale Notre-Dame de Paris, qui avaient migré au début du XIIème siècle sur la Rive Gauche de la Seine, doit en partie son existence à notre « Sacré Charlemagne ». L’intitulé de cette rubrique « Charlemagne et l'enseignement du droit dans les écoles cathédrales » n’est ainsi pas tout à fait infidèle !

     

     

    Maîtres et écoliers au Moyen Âge

                                                                         24. Maîtres et écoliers au Moyen Âge