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    Du droit des écoliers à la paresse 1/11

       1 Le bonnet d’âne de l’écolier paresseux (chromolithographie, fin du XIXème siècle).  

     

    La Maîtresse - Cela suffit, on ne rêvasse pas en travaillant. 

    L’Élève - Mais j’peux pas faire deux choses à la fois ! J’travaille pas !

    La Maîtresse – Paresseux et insolent. Vous me copierez cent fois : « Je dors sans motif pendant la classe ».

     L’Élève - Mais c’est pas vrai ! Faut bien qu’y ait un dernier en classe ! 

     

     

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    2 Le respect : l’écolier paresseux y-a-t-il droit ? (chromolithographie, fin XIXème siècle).  

     

     « Au piquet, mains sur la tête ! ». Le bonnet d’âne, en usage dans toutes les écoles de la fin du XVIIème siècle jusqu’au début du XXème siècle, servait à punir les élèves parlant patois, paresseux, chahuteurs ou ayant de mauvaises notes. L’écolier qui était puni, affublé du bonnet, devait rester debout ou se mettre à genoux, dans un coin de la classe ou devant tous ses camarades. Parfois, il restait assis sur un banc au fond de la classe.

        Tout comme les châtiments corporels, le bonnet d’âne est interdit par divers textes depuis les années 1960, et remplacé par d’autres punitions (mauvais point, réprimande, privation de récréation, retenue après la classe…). 

     

     

     

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                                3 La Paresse (chromolithographie fin XIXème siècle).  

     

     « Si tu triples pas ta sixième pour la deuxième fois, t’auras un dico à Noël » (ânerie de parents attentionnés). Dans nos dictionnaires, la paresse est accompagnée de deux genres de définitions : 

     Douce paresse.  Tantôt des définitions plutôt aimables faisant référence à l’Antiquité romaine où l’otium (le temps durant lequel une personne profite du repos pour s’adonner à la méditation, au loisir studieux), était élevé à la hauteur d’une institution. Sans doute ce mode de vie paisible affranchi du travail inspire-t-il cette plaisanterie familière : « Heureux l’étudiant qui, comme la rivière, suit son cours sans sortir de son lit ». 

     Horrible paresse. Tantôt des définitions péjoratives, héritières de l’Église, parfois suivies d’exemples ciblés sur les écoliers : « Cancre (du latin cancer, le crabe), synonyme âne : écolier paresseux et nul » (dictionnaire Larousse).   

     

     

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    4. « Frère Jacques, Frère Jacques, Dormez-vous ? Dormez-vous ? » (chromolithographie publicitaire fin XIXème siècle). 

     

     « Que la paresse soit un des sept péchés capitaux nous fait douter des six autres » (Robert Sabatier - Le livre de la déraison souriante. 1991). En effet, au Moyen Âge, l’Église qui contrôlait la société et la vie de l’homme, imposa une conception défavorable de la paresse. Saint Thomas d’Aquin, dominicain italien et ancien étudiant à l’Université de Paris (de 1245 à 1248), en fit même l’un des sept péchés capitaux conduisant au mal.

      Certes, Saint Thomas d’Aquin faisait référence, non pas à la paresse proprement dite, synonyme d’oisiveté de tout un chacun, mais à sa voisine l’acédie, une affectation spirituelle atteignant les moines qui se manifestait par l’ennui, le dégoût de la prière et le découragement. Mais le mal était fait, et la paresse fut bientôt assimilée à un péché du commun des mortels. Blaise Pascal (1623-1662), tout à la fois mathématicien, philosophe, physicien et théologien, souscrivit à cette thèse:  « Les deux sources de nos péchés sont l'orgueil et la paresse » (Les Pensées. 1670). Il fut bientôt rejoint par Fénelon (1623-1662), homme d'église (évêque de Sarlat), théologien, écrivain et pédagogue: « La paresse, qui est une langueur de l'âme, est une source inépuisable d'ennuis » (Traité de l'éducation des filles. 1687).

     

     

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    5. L’ennui punition du paresseux (couverture d’un cahier scolaire de la série Le Travail, n° 3. Ed. Hachette. 1941).

     

    « Le champ du paresseux est plein de mauvaises herbes » (Proverbe français). C’est ainsi que la paresse fut condamnée non seulement par l’École Catholique, mais également par l’École Laïque de la République dont les maîtres, au début du XXème siècle, écrivaient en haut du tableau noir : « L’ennui est la punition de la paresse » (à rapprocher des dictons japonais : « Si vous êtes occupé, vous êtes heureux », et chinois : « La paresse s'entretient par le repos, le courage s'entretient par la fatigue »). 

          Cette diatribe fut reprise dans la plupart des manuels d’enseignement : « Un paresseux est un sot. Ce qu’on a point commencé d’apprendre étant jeune, on ne l’apprend guère plus tard » (J. Dutilleul et Alexandre Rame : La lecture hebdomadaire commentée et expliquée. Éditeur : André-Guédon/Cours élémentaire et moyen de l’enseignement primaire. 1905). « Les paresseux sont capables d’efforts violents, pourvu qu’ils ne durent pas » (Jules Payot : La morale à l’école. Livre de l’élève. 1908). 

     

     

    Élève Alexandre Dumas : nul, distrait, fugueur, a besoin de cours de rattrapage. « Je hais un mauvais élève, toujours oisif, distrait, inappliqué; il trouve que les heures d'écoulent trop lentement, car le temps mal employé parait long; l'étude l'ennuie, la lecture le fatigue, le travail est une peine pour lui; il trouve tout difficile, et il échoue dans les choses les plus simples; aussi ses camarades le méprisent, son maître le punit; sa mère, qui est malheureuse de sa mauvaise volonté, lui adresse des reproches: ce sera plus tard un ignorant orgueilleux, car l'orgueil est le compagnon ordinaire de l'ignorance, ou, pour nous servir des paroles du Sage : L'orgueil et la sottise marchent toujours de compagnie. Je plains  le sort d'un semblable enfant, et qui ne le plaindrait, si l'on considère qu'une mauvaise éducation est la source du vice et le germe de tous les maux ? » (La lexicologie des écoles. Cours complet de langue française et de style divisé en trois années, rédigé par M. P. Larousse. Deuxième annéePartie du maître. Page 50. Éditeur: Larousse et Boyer, rue saint André des Arts. 1852).

     

    LE PARESSEUX (Louis Ratisbonne [1827-1900], La Comédie enfantine. Michel Lévy frères. 1861) : 

    - Amusons-nous d'abord, dit Léon ; mon devoir, Je le ferai tantôt, je le ferai ce soir.

    Le soir, il bâille et dort ; mais pour faire sa tâche Il va, dit-il, demain réveiller le soleil.

    Le réveiller !  Hélas ! On l'appelle, on se fâche.

    A sept heures encore il dort d'un plein sommeil.

    En classe il est puni ; cela n'est pas merveille : Comment ne pas punir un écolier pareil ?

    Moi, pas si fou : je fais tous mes devoirs la veille.

    Qui toujours remet à demain Trouvera malheur en chemin.

     

     

     

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       6. La tristesse du jeune cancre (chromolithographie, fin du XIXème siècle).

    « Le maître demanda quel était le nom des habitants de la Gaule. L’écolier, les larmes aux yeux, répondit oui ».

     

         Quant à la réponse du maître face à l’élève en difficulté qui essaye de bien faire, elle passa du stade de la punition à celui de l’émulation : 

    « Puisque nous parlons d'émulation, distinguons celle entre les personnes de celle qui est relative aux choses. Dire à l'écolier, un tel a mieux fait que vous, il aura tels avantages, voilà qui lui inspirera de mauvais sentiments, et qui embarrassera son camarade plus intelligent ou plus heureux. L'élève est-il paresseux ? On ne l'excitera pas au travail par ce moyen, et s'il pèche par le défaut d'intelligence, ou par l'incapacité d'attention, on ne parviendra ainsi qu'à lui inspirer le dégoût de l'étude, comme il arrive qu'on se désintéresse d'un travail auquel on s'est appliqué et où l'on n'a pas réussi malgré ses efforts. Il n'y a aucun inconvénient au contraire, à dire à l'enfant : tu as mieux fait ton devoir, tu peux le mieux faire encore…» (Félix Hément. Petit traité des punitions et des récompenses à l’usage des maîtres et des parents. Éditeur : Georges Carré. Paris. 1890). 

     

     

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    7. De la méthode pédagogique magistrale (dans cette méthode, aussi appelée expositive, l’instit’ détient tous les « savoirs », qu’il transmet aux élèves dits les « apprenants »). Chromolithographie publicitaire, fin du XIXème siècle.

     

     « Résultats brillants malgré une faiblesse dans toutes les matières » (Jérôme Duhamel. Le bêtisier des profs. Albin Michel. 2000). Aujourd’hui encore, l’élève paresseux et rêveur retient l’attention des nouveaux profs formatés au correctement parlé : 

    « Cet enfant manifeste un léger déficit de motivation induisant une phase de repos intellectuel qui n’est probablement que temporaire… Il ne présente aucune appétence génétique pour le travail scolaire et se montre réfractaire à toute dépense d’énergie intempestive. » 

     

     

     

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                                                          8. Bienvenu chez les Psy…

                               « J'fais rien, mais j'le fais bien et çam' fait pas mal, M’sieu ».

     

        Quant aux adeptes du psy (psychologues, psychiatres, psychothérapeutes, psychomotriciens, neuropsychologues…), leur sentence n’est pas toujours réconfortante. En effet, ils peuvent diagnostiquer dans la paresse de l’écolier un dysfonctionnement organique ou psychique éventuellement d’origine neurologique (dyspraxie motrice, dyslexie, dysorthographie, TDAH ou troubles de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité…).

     

        Michèle Torr a rendu hommage, avec de simples mots, sans i-grec (y), à ces enfants bien souvent malheureux :

     

    Michèle Torr. Pas bien dans sa vie

     

    C’est un enfant pas bien dans sa vie
    Qui tourne la tête quand on lui sourit
    Un p’tit garçon à côté d’ son lit
    Qui regarde passer les trains dans la nuit

    C’est un enfant qui n’ dit jamais rien
    Qui cherche quelque chose ou quelqu’un
    A qui raconter tous les voyages
    Qu’il a faits dans ses livres d’images…
     

     

       De même, un grand écrivain contemporain, Daniel Pennac, qui a souffert étant enfant de ses grandes difficultés à étudier à l'école (dysorthographie enfantine), a su, plus tard, dans son beau livre Chagrin d'école (éditeur Gallimard, Collection Blanche, 2007. Prix Renaudot), dire combien il en avait secrètement souffert: 

     « La moindre des politesses, pour un cancre, c'est d'être discret: mort-né serait l'idéal »; 

    « L'avenir c'est moi en pire, voilà en gros ce que je traduisais quand mes professeurs m'affirmaient que je ne deviendrais rien »; 

    « Si l'on guérit parfois de la cancrerie, on ne cicatrise jamais tout à fait des blessures qu'elle nous infligea. Pour autant, le cancre tiré d'affaire ne souhaite pas qu'on le plaigne, surtout pas, il veut oublier, c'est tout, ne plus penser à cette honte ».

    « Je ne serai jamais prof, araignée engluée dans sa propre toile, garde-chiourme vissé à son bureau jusqu'à la fin de ses jours. Jamais ! Nous autres, les élèves, nous passons, vous, vous restez ! Nous, nous sommes libres, et vous, vous en avez pris pour la perpète. Nous, les mauvais, nous n'allons nulle part mais au moins nous y allons ! L'estrade ne sera pas l'enclos minable de notre vie ! »

     

     

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    9. Du côté de chez Freud (affiche de la satire tragi-comique sur la psychanalyse jouée au théâtre de Nesle, à Saint-Germain-des-Prés, en 2003-2004).

     

     « La psychanalyse est une maladie qui se prend pour son remède » (Jules Romain. 1885-1972). On ajoutera que, du côté de la psychanalyse conçue par Sigmund Freud (1856-1939), la paresse ne saurait être une simple particularité non pathologique que tout enfant peut présenter. Au contraire, il s’agirait d’un symptôme névrotique qui a pour avantage de justifier les honoraires des consultations et de moduler la relation analytique :

    « La paresse signale tout d’abord un retour à la souveraineté du principe de plaisir ; c’est le bénéfice primaire du symptôme, une régression à un état antérieur du développement qui satisfait le narcissisme à un moment déterminé, à ce stade-là de son existence ». 

     

     

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    10. De Grandes Espérances… (Great Expectations, roman de Charles Dickens. 1861). Chromolithographie publicitaire, fin du XIXème siècle. 

     

      « Rien ne sert de courir, il faut partir à point » (Jean de La Fontaine, Le Lièvre et la Tortue). Mais, en cas d’échec scolaire d’un élève paresseux, amoureux du repos, des rêves, et plein d’imagination, faut-il désespérer ?

     

          François-Marie Arouet, dit Voltaire, ancien brillant élève du collège Louis-le-Grand tenu par les Pères Jésuites, le pensait: « Les paresseux ne font que des gens médiocres, en quelque genre que ce puisse être » (Les Pensées philosophiques. 1862); « Fuyez l'indolente paresse, c'est la rouille attachée aux plus brillants métaux » Stances, XXVIII. 1775).

     

        Henri-Rolland de Villarceaux (1821-1848), un poète-écrivain, bien moins connu que Voltaire, mais dont les aphorismes (belles phrases) de son livre L'écolier (1840) sont, de nos jours, très souvent cités dans les études consacrées à l'enseignement, disait : « La paresse est un fruit savoureux dont certains écoliers se gorgent avec trop de délices »; « La paresse fait de la machine humaine une horloge arrêtée »; « La paresse trouve l'oubli des devoirs dans des distractions frivoles. »

     

           Au contraire, d'autres poètes et écrivains ont su saisir la richesse secrète de la paresse. Par ordre d'entrée en scène: 

     

    « Le repos de la paresse est un baume secret de l’âme, qui suspend soudainement les plus ardentes poursuites… Elle est une béatitude qui nous console de toutes nos pertes et qui nous tient lieu de tous les biens. » (La Rochefoucauld [1613-1680] – Maximes et Réflexions diverses – 1657).

     

    « Les paresseux passent leur vie à ne rien faire, et ne s'ennuient jamais. » (Jean-Jacques Rousseau [1712-1778]. Émile, ou de l'éducation. 1762).

     

    « La paresse est la mère de la perfection » (Oscar Wilde [1854-1900] - Les aphorismes et pensées).

     

     « La paresse m'a toujours paru la seule façon sérieuse de jouir de la vie » (Pierre Drieu la Rochelle [1893-1985] - Sur les écrivains. 1964).

     

    « La paresse c’est se lever à six heures du matin, pour avoir plus de temps à ne rien faire » (Jean Bernard [1907-2006], médecin, écrivain, élu à l’Académie française en 1975).

     

     « Je me suis aperçu que, si le travail bien fait est source de joies puissantes, la paresse savourée en gourmet ne l’est pas moins. Les gens qui ne travaillent pas ne s’ennuient jamais. Les gens qui travaillent s’ennuient quand ils ne travaillent pas » (François Cavanna [1923-2014]. Les Pensées. Ed. Le Cherche-Midi. 2012).

     

    « J'écrirais volontiers un éloge de la paresse et de l'ennui. La paresse, rien de plus clair, est la mère des chefs-d'œuvre. Très loin de l'abrutissement qui naît des grands postes et des hautes fonctions, l'ennui est cet état béni où l'esprit désoccupé aspire à faire sortir du néant quelque chose d'informe et déjà d'idéal qui n'existe pas encore. L'ennui est la marque en creux du talent, le tâtonnement du génie. Dieu s'ennuyait avant de créer le monde. Newton était couché dans l'herbe et bayait aux corneilles quand il a vu tomber de l'arbre sous lequel il s'ennuyait la pomme de la gravitation universelle. Les petits esprits s'énervent au milieu de foules de choses, la plupart du temps inutiles. Les grands esprits ne font rien et s'ennuient comme Descartes enfermé seul dans un poêle en Allemagne avant de découvrir des cieux. Chateaubriand bâillait sa vie avant d'écrire Atala, et René, et les mémoires d'outre-tombe » (Jean d’Ormesson [1925-2017]. Q’ai-je donc fait. Ed. Robert Laffont. 2008). 

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 1/11

    11. Poil de Carotte (page de couverture du roman de Jules Renard, avec des illustrations de Félix Vallotton. Flammarion. 1902). 

     

     « Je me surmène de paresse » (Jules Renard). Quant à l’écrivain Jules Renard (1864-1910), il est le meilleur avocat des enfants paresseux collectionneurs de mauvaises notes. Ses plus belles citations expriment cette paresse qu’il a lui-même vécue et racontée dans son roman autobiographique Poil de Carotte paru en 1894 :

    « Je connais bien ma paresse, je pourrais écrire un traité sur elle, si ce n’était un si long travail ».

    « La paresse n’est rien de plus que l’habitude de se reposer avant d’être fatigué ».

    « Le temps perdu ne se rattrape jamais. Alors, continuons de ne rien faire ».

     « Il ne faut pas croire que la paresse soit inféconde. On y vit intensément comme un livre qui écoute. On y nage dans l’eau, mais on y sent le frôlement des herbes du remords. Il y a dans la paresse un état d’inquiétude qui n’est pas vulgaire, et auquel l’esprit doit peut-être ses plus belles trouvailles ». 

    « La paresse a cela de mortel que, dès qu'on en triomphe,, on la sent déjà qui renaît » (Journal du 20 juin 1900). 

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 1/11

    12. L’École et son Cancre, futur entomologiste (chromolihographie : Baster & Vieillemard. Paris. De 1869 à 1884).

     

          « Petit Homme deviendra Grand » (par extrapolation du vers de la fable de Jean de La Fontaine Le petit Poisson et le Pêcheur : « Petit poisson deviendra grand… »). Plus encore, des adeptes de la paresse ont pu accéder à la célébrité dans les genres les plus divers (, peinture, littérature, sciences, cinéma, poésie…). Parmi eux : Pétrone, Claude Gelée dit le Lorrain, Augustin Fresnel, Gustave Flaubert, Alexandre Dumas, Einstein, Sacha Guitry, Jean Cocteau, Jean Genet, Jacques Prévert, François Truffaut, Daniel Pennac, Alain Souchon, Gérard Depardieu.

     

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 1/11

    13. L’alphabet : P comme Paresse, Pétrone et Jacques Prévert (chromolithographie publicitaire, fin du XIXème siècle).

     

    La suite donc, dans une semaine :

    Du droit des écoliers à la paresse 2/19 (Pétrone et Albert Einstein).  

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 1/11

               14. Paresseux ou Paresseuse ? (chromolithographie, fin du XIXème siècle).

     

      Puis viendront, chacune des semaines suivantes :

    Du droit des écoliers à la paresse 3/19 (Jacques Prévert).

     Du droit des écoliers à la paresse 4/19 (François Truffaut).

    Du droit des écoliers à la paresse 5/19 (peintures anciennes de Jean-Baptiste Greuze, Carl Waltzelhan, William Henry Hunt, Hanne Tartter, Jean Béraud, Harold Copping et Jean Geoffroy dit Géo).

    Du droit des écoliers à la paresse 6/19 (photographies anciennes 1/2).

    Du droit des écoliers à la paresse 7/19 (photographies anciennes 2/2).

    Du droit des écoliers à la paresse 8/19 (L'école buissonnière).

    Du droit des écoliers à la paresse 9/19 (Derniers de classe).

    Du droit des écoliers à la paresse  10/19 (La rentrée des classes)

    Du droit des écoliers à la paresse 11/19 (À bas la rentrée !).

    Du droit des écoliers à la paresse 12/19 (dessins de presse. 1880-1900).

    Du droit des écoliers à la paresse 13/19 (dessins de presse. 1900-1910).

    Du droit des écoliers à la paresse 14/19 (dessins de presse. 1910-1920).

     Du droit des écoliers à la paresse 15/19 (dessins de presse. 1920-1925)

    Du droit des écoliers à la paresse 16/19 (dessins de presse. 1925-1930).

    Du droit des écoliers à la paresse 17/19 (dessins de presse. 1930-1935).

    Du droit des écoliers à la paresse 18/19 (dessins de presse. 1935-1940).

     Du droit des écoliers à la paresse 19/19 (dessins de presse. 1940 et s.).

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 1/11

    15. Un paresseux (illustration fin XIXème siècle. Source : Musée de l’école en Chalonnais. 20 rue Auguste-Martin, 71100 Saint-Rémy. Photo D.C.). 

     


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    Du droit des écoliers à la paresse 2/11 (Pétrone, Einstein)

    16. Petit Paresseux deviendra Grand Artiste (chromolithographie, fin du XIXème siècle).

     

    « Fais de ta vie un rêve, et d’un rêve une réalité » (Antoine de Saint-Exupéry, auteur d’un Petit Prince… si triste de n’avoir pas de copains de classe pour s’amuser). Parfois, des écrivains, des artistes et même des scientifiques, croulant sous les éloges, se plaisent à révéler avoir été des élèves paresseux dans leurs jeunes années: " C'est une mode chez les écrivains ou les artistes que d'affirmer avoir été un cancre " (Jean-Charles, La Foire aux cancres, éd. Calmann-Lévy, coll. Labiche, 1963, p. 39).

     

     

        « Il ne suffit pas d’affirmer les choses, il faut les prouver » (Guillaume Musso. L’appel de l’ange. 2011). Faut-il les croire et cesser de proclamer qu’un écolier oisif n’arrivera jamais à rien. Bien sûr ! Et je vais vous le démontrer avec l’histoire de la vie de quatre célébrités dans les genres les plus divers (littérature, sciences, poésie, cinéma) : Pétrone (environ 14 apr. J-C.-environ 66 apr. J-C.), Albert Einstein (1879-1955), Jacques Prévert (1900-1977), et François Truffaut (1932-1984).

     

     

     

    Pétrone : Le Satyricon (illustrations de Joé Hamman. Editions littéraires de France. Paris 1946).

    17. Pétrone : Le Satyricon (illustrations de Joé Hamman. Editions littéraires de France. Paris 1946).

     

     « Personne ne consent dans sa vieillesse à avouer que ce qu’il a appris dans son enfance était tout de travers. » Pétrone : Satyricon). On ne sait rien de l’enfance de Pétrone, un écrivain latin, vivant sans doute sous le règne de l’empereur Néron (13 octobre 54 - 8 juin 68 apr. J.-C.), et auteur du roman le Satyricon, dans lequel il décrit les aventures d’un jeune étudiant débauché, Encolpe, accompagné d’Ascylte et de Giton.

     

     

     

    Marcus Vinicius chez Pétrone (Quo Vadis, roman historique d’Henryk Sienkiewicz, 1896. Dessin de Mastroianni. Armand Noyer, 1918).

    18. Marcus Vinicius chez Pétrone (Quo Vadis, roman historique d’Henryk Sienkiewicz, 1896. Dessin de Mastroianni. Armand Noyer, 1918). 

     

       « La paresse est utile à cause de l’effort qu’elle demande pour être surmontée » (Tristan Bernard). En revanche, sa vie d’adulte est décrite par l’historien Tacite (né en 58 et mort vers 120 apr. J.-C.), qui glorifie sa paresse et son oisiveté. Plus encore, Tacite rappelle que ce caractère de Pétrone ne l’empêcha aucunement d’accomplir avec perfection les affaires dont il eut la charge comme proconsul et consul de Bithynie.

     

     « Pétrone consacrait les jours au sommeil, la nuit aux soins et aux douceurs de la vie. Où les autres tirent leur réputation du travail, il devait la sienne à la paresse… Il affichait en paroles et dans sa conduite un nonchaloir et une désinvolture qui jouaient la simplicité, ce qui leur donnait un charme de surcroît. Toutefois, proconsul de Bithynie, puis consul, il sut montrer sa vigueur et traiter de plain-pied les affaires de sa charge. »  

     

     

     

     

     Albert Einstein dans sa cinquième année (photographie colorisée circa 1884).

    19. Albert Einstein dans sa cinquième année (photographie colorisée circa 1884). 

     

       E=mc2. Albert Einstein (1879-1955), est sans doute le scientifique le plus célèbre du XXème siècle, auteur de la théorie de la relativité, et prix Nobel de Physique en 1921 pour sa découverte de la loi de l’effet photo-électrique. Pourtant, dans ses jeunes années, il fut un enfant s’exprimant avec des difficultés, puis un écolier étourdi décrit par ses professeurs comme un parfait cancre.

     

        -1 x -1 = 1. En effet, dans ses premières années, Einstein connut des retards et des troubles de la parole et du langage le conduisant à se parler à lui-même ou à garder le silence. Inquiets, ses parents l’emmenèrent consulter des médecins qui ne purent trouver l’origine de son mal. Mais, fort heureusement, à l’occasion de son troisième anniversaire, sur le point de souffler les bougies, il lança à ses parents ces mots sans aucune formulation mathématique : « Le lait est trop chaud » (il devait dépasser les 37°, la température de leur maman que les très jeunes enfants aiment tellement !). Toujours est-il qu’il devint, dès cet instant, loquace, au grand dam de ses parents qui attendirent avec impatience son entrée à l'école pour souffler un peu.

     

     

     

     Albert Einstein, ado’ (photographie 1894).

                                  20. Albert Einstein, ado’ (photographie 1894). 

     

     « L’enseignement devrait être ainsi : celui qui le reçoit le recueille comme un don inestimable mais jamais comme une contrainte pénible » (Einstein). Le p’tit Albert, de six à neuf ans, fréquenta l'école catholique de la paroisse, à Munich. Puis, à l’adolescence, il entra au Luitpold Gymnasium de Munich, en Allemagne. Rebelle au « par cœur », il s’y singularisa pour son manque d’intérêt pour les deux matières principales, le grec et le latin, ainsi que pour les langues et les sciences naturelles, ne montrant de curiosité que pour les mathématiques et la physique.

     

        Son professeur de grec lui disait alors : « Vous êtes assis là au fond de la classe et cela sape le respect dû par une classe à son maître » (cité par Denis Brian dans : Einstein, a life. 1996).

     

      En réponse, le jeune Albert sécha les cours*, contribua à l’école buissonnière, et ne put obtenir son baccalauréat. Il fut renvoyé du collège à l’âge de quinze ans.

     

    *« Sécher les cours ». Cette expression remonte à l’époque où les écoliers écrivaient avec une plume et un encrier incrusté dans leur table. Lorsqu’un écolier décidait de ne plus venir en classe, préférant aller se promener et flâner, l’encre, faute d’être utilisée, commençait à sécher ! 

     

     

     

    Albert Einstein et sa sœur Maria

    21. Albert Einstein et sa sœur Maria (photographie date inconnue).

     

     « L’imagination est plus importante que le savoir » (Einstein). Ses parents l’inscrivirent ensuite dans une école plus libérale à Aarau, non loin de leur nouveau domicile zurichois. Cette école s’inspirait des méthodes de l’éducateur suisse Johann Pestalozzi qui, hostile au « par cœur », insistait sur l’auto-apprentissage par observation, conduisant au développement d’idées et d’intuitions (la forme visuelle de l’intelligence, secret de la créativité). Dans cette atmosphère, le jeune Einstein brilla et obtint de très bonnes notes (sauf en français !).

     

     

    Albert Einstein, jeune étudiant (photographie du 3 octobre 1896).

    22. Albert Einstein, jeune étudiant (photographie du 3 octobre 1896. Source : Wikimedia). 

     

    « Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue » (Einstein). Après avoir obtenu son diplôme de fin de secondaire, Albert Einstein put intégrer, en 1896, à sa seconde tentative, l’école polytechnique fédérale de Zurich (EPZF). En 1900, il en fut diplômé, non sans mal (parmi les derniers), avouant dans son autobiographie avoir été « incapable de suivre les cours, de prendre des notes et de les travailler de façon scolaire ». 

     

     

     

    Albert Einstein dans sa cinquantième année

                              23. Albert Einstein dans sa cinquantième année. 

     

        En 1905, après quelques années de galère, il soutint sa thèse de doctorat sur « une nouvelle détermination des dimensions ». Et, grâce à ses premiers travaux, il obtint bientôt la reconnaissance des plus grands scientifiques et universitaires.

     

     

     

    Albert Einstein dans sa soixante-douzième année (photographie prise par Arthur Sasse le 14 mars 1951).

    24. Albert Einstein dans sa soixante-douzième année (photographie prise par Arthur Sasse le 14 mars 1951). 

     

       « Einstein était un savant connu pour tirer la langue » (Les Perles du Bac de l’année 2015). Rappelons toutefois que notre ancien cancre buissonnier et imaginatif est devenu célèbre, à l’âge adulte, non seulement par ses découvertes scientifiques, mais aussi par cette image prise à Princeton aux États-Unis.

          L’air malicieux, regardant dans l’objectif du photographe, il tirait la langue. À qui ? Lui seul le sait. Peut-être à ses anciens profs’ qui avaient prédit qu’il n’arriverait jamais à rien s’il n’apprenait pas ses leçons « par cœur *» !

     

    *Apprendre par cœur. Cette expression remonterait au Moyen Age et tirerait son origine d’une croyance de la Grèce antique pour qui le cœur était considéré comme l’organe renfermant le courage, les sensations, l’intelligence et la mémoire.

     

     

        Voici deux réflexions d’ordre pédagogique de Jean-Charles (1922-2003), licencié de la Faculté des Lettres de Bordeaux, devenu surveillant et professeur, puis journaliste et écrivain humoriste, auteur notamment du livre La Foire aux cancres (éd. Calmann-Lévy, 1963), vendu à plus de 1,3 millions d’exemplaires, en 24 langues, à l’origine du film éponyme de Louis Daquin que je présenterai dans une des pages suivantes :

    Le dégoût des maths vient souvent d'un manque de connaissances de base. Trop d'élèves possèdent mal la table de multiplication ou les opérations de fractions. C'est pour eux un handicap terrible, face à des professeurs qui ont facilement tendance à ne s'intéresser qu'à l'élite de la classe. 

     

    La limitation des matières d'examen n'est pas tout, il faut aussi enlever au bachot, comme on a d'ailleurs commencé à le faire, son côté exercice de mémoire afin qu'il devienne réellement une épreuve d'intelligence.

     

     

    « La vie, c’est comme une bicyclette. Il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre » (Einstein).

    25. « La vie, c’est comme une bicyclette. Il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre » (Einstein).

     

    - Élève Einstein, que signifie la formule H2SO4 ? 

    - J’m’ souviens plus très bien, J’lai pas apprise par cœur, mais ça va venir, j’lai sur le bout de la langue…

    - Petit malheureux, crachez vite ! C’est de l’acide sulfurique !

     

    La suite, dans une semaine :

    Du droit des écoliers à la paresse 3/19 (Jacques Prévert).


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    Du droit des écoliers à la paresse 3/11 (Jacques Prévert)

    26. L’École de la République des Cancres (photographie d’un dessin sans date ni auteur).

     

    « Qui peut le moins, peut le plus » (proverbe inversé d’Aristote). Après deux paresseux étrangers devenus célèbres, Pétrone et Albert Einstein (voir la précédente page 2/10), je vous invite maintenant à suivre deux Gaulois qui, spécialistes de l’école buissonnière, ont accédé à la notoriété. L’un, Jacques Prévert, dans la poésie (cette page 3/10). L’autre, François Truffaut, dans le cinéma (page suivante 4/10).

     

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 3/11 (Jacques Prévert)

    27. « Je ne veux pas être troublé dans mes réflexions » (chromolithographie publicitaire, fin du XIXème siècle).

    -Élève Têtenlaire, qu’est-ce qui vous a plu l’plus dans l’histoire des Gaulois ?

    -C’qui m’a plulplus, M’sieur, c’est qu’ils n’allaient pas à l’école !

     

     

     

    Jacques, Pierre et Jean Prévert avec leur mère Suzanne au jardin du Luxembourg (photographie originale abîmée. Circa 1908).

    28. Jacques, Pierre et Jean Prévert avec leur mère Suzanne au jardin du Luxembourg (photographie originale abîmée. Circa 1908).

     

    « Le petit homme de la jeunesse a cassé son lacet de soulier et toutes les baraques de la fête tout d’un coup se sont écroulées… » (Prévert, Le miroir brisé, Paroles. Gallimard. 1949). Jacques Prévert, le plus populaire des poètes français, est né en 1900, cette année fameuse dont les maîtres d’école peinent à convaincre leurs élèves qu’elle fait encore partie du XIXème siècle (du 1er janvier 1801 au 31 décembre 1900 !). Dans son enfance, il habitait à Paris (7 rue de Vaugirard, puis rue Férou), à proximité du Quartier Latin et du jardin du Luxembourg.

     

     

    Jacques, Pierre et Jean Prévert enfants

                                             29. Jacques, Pierre et Jean Prévert. 

     

    « Chacun de nous est une lune, avec une face cachée que personne ne voit » (Mark Twain. 1835-1910). Inscrit, en octobre 1908, à l’âge de 8 ans, à l’école de la rue Madame, il la quitta avec son frère aîné Jean (né en 1898, décédé en 1915), en fin d’année, sans jamais en donner les raisons, si ce n’est cette phrase énigmatique : « Mon frère et moi portons plainte contre l’école de la rue Madame » (Œuvres complètes de Jacques Prévert, Tome II. Notes d’Enfance. La Pléiade. 1996).

         Son père, André Prévert, anticlérical avéré, l’inscrivit alors à l’école privée libre André Hamon (aujourd’hui collège et lycée privés Saint Sulpice), au 68 rue d’Assas, non loin de la Faculté de Droit (aujourd’hui Université-Paris-Panthéon-Assas). Il y restera jusqu’en 1914, adoptant un genre ambivalent : mi studieux, mi oisif. En effet, d’un côté, il obtint d’excellentes notes : premier au tableau d’honneur en 1908, obtention du certificat d’études en 1911 (9,5/10 en dictée, 7/10 en rédaction, 8/10 en lecture, 7/10 en rédaction, 4/10 en calcul). Mais, de l’autre, il manifesta un certain désintérêt pour la plupart des matières, à l’exception des leçons de mythologie dont les récits et les personnages énigmatiques stimulaient son imagination : « C’était beau. Il y avait des dieux et des déesses qui s’aimaient, se battaient, des gens comme dans la vie et les contes de fées » (Jacques Prévert).

     

     

    L’ACCENT GRAVE

    (Jacques Prévert. Paroles, Gallimard. 1949).

     

    Le professeur 

    Élève Hamlet !

    L’élève Hamlet (sursautant)

    … Hein… Quoi… Pardon…. Qu’est-ce qui se passe… Qu’est-ce qu’il y a… Qu’est-ce que c’est ?…

    Le professeur (mécontent)

    Vous ne pouvez pas répondre « présent » comme tout le monde ? Pas possible, vous êtes encore dans les nuages.

    L’élève Hamlet 

    Être ou ne pas être dans les nuages !

    Le professeur 

    Suffit. Pas tant de manières. Et conjuguez-moi le verbe être, comme tout le monde, c’est tout ce que je vous demande.

    L’élève Hamlet 

    To be…

    Le professeur 

    En Français, s’il vous plaît, comme tout le monde.

    L’élève Hamlet 

    Bien, monsieur. (Il conjugue :)
    Je suis ou je ne suis pas
    Tu es ou tu n’es pas
    Il est ou il n’est pas
    Nous sommes ou nous ne sommes pas…

    Le professeur (excessivement mécontent)
    Mais c’est vous qui n’y êtes pas, mon pauvre ami !

    L’élève Hamlet 

    C’est exact, monsieur le professeur,
    Je suis « où » je ne suis pas
    Et, dans le fond, hein, à la réflexion,
    Être « où » ne pas être
    C’est peut-être aussi la question.
     

     

     

     

    Bayer aux Corneilles

    30. Bayer aux Corneilles (proverbe populaire signifiant, au Moyen Âge, non pas bailler, mais rester bouche bée devant une chose sans intérêt). 

     

        « La théologie, c’est simple comme Dieu et Dieu font Trois » (Prévert). À défaut d’être un authentique écolier paresseux, Jacques Prévert connut deux autres loupés.

         - D’une part, il était un gouailleur anticlérical comme son père. Aussi n’hésitait-il pas à lancer des vannes lors des cours d’instruction religieuse en comparant pernicieusement la Bible à la mythologie. Ses réparties familières lui valurent d’être souvent mis à la porte, tout en suscitant l’attention de son père qui appréciait son parlé familier : « T’es pas poli mais écrit le mon petit, tu le dis si bien ».

     

     

    La meilleure des écoles, c'est l'école buissonnière

                             31. La meilleure des écoles (badge des années 2000).

     

     « J’étais un parfait petit voyou… premier à l’école buissonnière » (Œuvres complètes de Jacques Prévert, Tome II. La Pléiade. 1996).

      - D’autre part, s’ennuyant ferme à l’école, il devint un disciple assidu de l’école buissonnière. Comme il le raconte dans ses mémoires, dès sa première année à l’école André Hamon, il sécha la classe pour aller se promener et jouer le plus souvent au Jardin du Luxembourg, surnommé le luco*, dont il était tombé amoureux.

    *le nom Luco donné au Jardin du Luxembourg par les p’tits parigots et les étudiants du Quartier Latin a pour origine le mont Lucotitus, ancien nom de l’actuelle montagne Sainte Geneviève située à l’est du jardin du Luxembourg.

     

     

     

    Grand bassin du Jardin du Luxembourg. Photographie d’Henri Roger Viollet. Paris 1935

    32. « Maman les p’tits bateaux qui vont sur l’eau ont-ils des jambes ? » (Grand bassin du Jardin du Luxembourg. Photographie d’Henri Roger Viollet. Paris 1935). 

     

    « Le Luxembourg, pour moi, c’était tout de même plus grand que le Bois puisque je pouvais aller m’y promener tout seul, mais l’herbe, sauf les pigeons et les jardiniers, personne n’avait le droit d’y poser les pieds. Cela devait appartenir à quelqu’un puisque les gardiens la gardaient, cette herbe…. » (Jacques Prévert).

    « Déjà au fond du square on entend le clairon/le jardin va fermer/le tambour est voilé/vainement/vainement/le jardin reste ouvert pour ceux qui l’on aimé… » (Jacques Prévert, C’est toujours le Luxembourg. Paroles. Gallimard. 1949).

       

    Signe de Piste du Luco.  Vous découvrirez sur ce blog d’un universitaire retardé, non scuze (mot québécois, roumain et d’argot français signifiant excusez-moi), je voulais dire retraité (période plus ou moins longue de vieux profs’ consacrée à la paresse en images et cartes postales anciennes), plusieurs dizaines d’images d’autrefois du Jardin du Luxembourg (lien Au Quartier Latin). Pour y accéder, il suffit de taper les mots Jardin du Luxembourg dans la rubrique Rechercher.  

     

     

     

    Jacques Prévert et son père André Prévert

                    33. Jacques Prévert (en bas à droite) et son père André Prévert

     

     « Les enfants doivent être très indulgents envers les grandes personnes » (Antoine de Saint-Exupéry. Le Petit Prince). Lors de l’une de ses escapades scolaires, le jeune Jacques rencontra dans la rue son père, André Prévert. Celui-ci, s’étonnant de le trouver là au lieu d’être à école, Jacques répondit : « Je n’y vais pas très souvent actuellement ». Son père l’emmena boire une grenadine !   

     

     

     

     

    Jacques Prévert et Picasso, à Canne, en avril 1951 (photographie de Boris Lipnitzki. Galerie Roger Viollet)

    34. Jacques Prévert et Picasso, à Canne, en avril 1951 (photographie de Boris Lipnitzki. Galerie Roger Viollet). 

     

     

    PAGE D’ÉCRITURE* (Jacques Prévert).

    Deux et deux quatre
    quatre et quatre huit
    huit et huit font seize…
    Répétez ! dit le maitre
    Deux et deux quatre
    quatre et quatre huit
    huit et huit font seize.
    Mais voilà l’oiseau lyre
    qui passe dans le ciel
    l’enfant le voit
    l’enfant l’entend
    l’enfant l’appelle
    Sauve-moi
    joue avec moi
    oiseau !...

     

    * Vous trouverez facilement en ligne le texte complet de cette poésie grâce à votre moteur de recherche avec les mots : Page d'écriture, poésie de Jacques Prévert.

     

     

     

     

     

    Jacques Prévert discutant avec des petites filles, en 1953

    35. « Mesdemoiselles vous êtes les plus belles personnes que je connaisse » (Jacques Prévert, en 1953, tentant de trouver un truc pour amorcer une discussion avec ces très jeunes demoiselles. Il eut, en 1945, une fille Michèle, surnommée Minette). 

     

    « Il y a des adultes qui jamais n’ont été des enfants » (Prévert). Quittons Jacques Prévert qui, toujours une cigarette à la bouche, se disait « rêveur » plutôt que « poète », avec sa poésie « Le Cancre », offerte à tous ceux qui n’aiment pas aller à l’école :

     

    LE CANCRE

    (Jacques Prévert. Paroles, Gallimard. 1949).

     

    Il dit non au professeur, 

    Il est debout, 

    On le questionne 

    Et tous les problèmes sont posés 

    Soudain le fou rire le prend 

    Et il efface tout, 

    Les chiffres et les mots, 

    Les dates et les noms, 

    Les phrases et les pièges 

    Et malgré les menaces du maître, 

    Sous les huées des enfants prodiges, 

    Avec les craies de toutes les couleurs, 

    Sur le tableau noir du malheur, 

    Il dessine le visage du bonheur. 

     

    La suite, dans une semaine :

    Du droit des écoliers à la paresse 4/19 (François Truffaut)


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    François Truffaut en 1963

                               37. François Truffaut en 1963 (source Wikimedia)

     

      « Mais qu’est-ce qu’on va faire de ce gosse ! » (phrase répétée, à l’approche de chaque vacances, par la mère de François Truffaut). François Truffaut, l’un des plus grands cinéastes français, figure majeure de la Nouvelle vague des années 50-60, avec Les Quatre Cents Coups (1959), puis auteur de films à grand succès (Jules et Jim, La Sirène du Mississipi, L’Enfant Sauvage, L’Argent de Poche, Le Dernier Métro, Vivement Dimanche…), fut un enfant non désiré et mal aimé.  

     

      Né hors mariage. Il était né, le 6 février 1932, de père inconnu et d’une mère qui, pour cacher sa position de fille-mère, le laissa à une nourrice, puis à ses parents qui résidaient dans le Bas-Montmartre. En 1942, à la mort de sa grand-mère, François Truffaut, âgé d’une dizaine d’années, vint loger, rue de Navarin, chez sa mère alors remariée avec Roland Truffaut, lequel avait faussement reconnu être son père à l’État civil (François Truffaut retrouvera son père biologique en 1968). Faute de place, il dormait dans un couloir et sa mère, dit-il, aurait été froide et distante envers lui, tout comme son beau-père.  

       « Je haïssais maman en silence… comme ce matin où, étant resté deux heures à faire la queue pour ne ramener qu’un paquet de biscottes, jeté par terre, elle me donna des coups de pieds…Et toi je t’aimais bien tout en te méprisant… » (lettre de François Truffaut, âgé de vingt-sept ans, à son père adoptif).

     

     

    Collège/Lycée Rollin, rebaptisé Jacques Decour en 1944 (carte postale ancienne. Établissement situé à Paris, 12 avenue Trudaine, dans le 9ème arrondissement).

    38. Collège/Lycée Rollin, rebaptisé Jacques Decour en 1944 (carte postale ancienne. Établissement situé à Paris, 12 avenue Trudaine, dans le 9ème arrondissement).

     

        «… Moyen à l’école, juste ce qu’il faut… ». Quant à ses études, le jeune François Truffaut ne fut pas un élève à proprement parler paresseux ou chahuteur. Ni trop haut (premier de classe, surnommé fayot), ni trop bas (dernier dit cancre), il faisait partie de la vaste catégorie intermédiaire (moyen, peut mieux faire). Il aurait ainsi obtenu d’assez bonnes notes à l’école élémentaire du lycée Rollin, mais, non admis en classe de sixième, il dut s’inscrire à l’examen de rattrapage.

          Inscrit aux cours complémentaires de l’école communale, 5 rue Milton, puis, en septembre 1945, à l’école privée Notre Dame de Lorette, 8 rue Choron, il y devint l’ami des meilleurs cancres, dont le futur cinéaste Robert Lachenay, et il cessa d’être appliqué. Le12 juin 1946, il obtint quand même, en classe de quatrième, son certificat d’études primaires, et il arrêta aussitôt ses études.  

     

     

    Robert Lachenay et François Truffaut en 1948.

    39. Robert Lachenay et François Truffaut en 1948 (source : https://twitter.com/lecinema_/status/735505950719774721).

     

     «… Buissonnier, Fugueur, Cinéphile…  ». Privilégiant alors l’école buissonnière et les fugues à répétition (ses parents le laissaient tout seul les week-ends), il fréquenta, avec son copain Robert Lachenay, les salles de cinéma de Pigalle, de la Nouvelle Athènes et du Quartier Latin (en 1945 et 1946, il aurait vu douze fois au Cinéma Champollion, surnommé Le Champo, le film de Sacha Guitry : Le roman d’un tricheur).

         Il profitait, dit-il, de ses incursions dans les cinémas, en général sans payer, pour collectionner les photographies de cinéastes (Renoir, Gance, Cocteau, Vigo, Clair, Clouzot, Autant Lara), des actrices et des acteurs qu’il y fauchait.

     

     

     

    Poil de carotte de Julien Duvivier (André Heuzé dans le rôle de Poil de carotte. Image du film muet de 1925).

    40. Le Cercle Cinémane. Prochain film : Poil de carotte de Julien Duvivier (André Heuzé dans le rôle de Poil de carotte. Image du film muet de 1925). 

     

      Passionné de films, en octobre 1948, âgé de seize ans, François Truffaut créa, avec son ami Robert Lachenay, un ciné-club Le Cercle Cinémane, pour lequel il loua, à la séance, la salle du Cluny-Palace, boulevard Saint-Germain.

    « … et Primo-délinquant ». Malheureusement, il dut payer les dettes du cinéclub pour le maintenir en activité (les recettes des séances étaient insuffisantes pour régler la location des films et de la salle). Pour y parvenir, il vola une machine à écrire dans le bureau de son beau-père afin de la revendre. Dénoncé par celui-ci, il sera détenu, plusieurs jours durant, au poste de police. Puis, un juge des enfants le placera, à la demande de son tuteur légal (son beau-père), en vertu d’une loi du 24 juillet 1889, d’abord au Centre d’observation des mineurs délinquants de Villejuif, ensuite, jusqu‘à sa majorité, dans un foyer d’enfants dont il tentera de s’évader.

     

     

     

    Les Quatre Cent Coups, un film de François Truffaut avec Jean-Pierre Léaud dans le rôle d’Antoine Doinel (affiche ancienne)

    41. Les Quatre Cents Coups, un film de François Truffaut avec Jean-Pierre Léaud dans le rôle d’Antoine Doinel (affiche ancienne).  

     

      « Ici souffrit injustement Antoine Doinel, puni injustement par Petite Feuille pour une pin-up tombée du ciel. Entre nous ce sera dent pour dent, œil pour œil » (réplique du film). Francois Truffaut a décrit son enfance difficile dans le premier long métrage qu’il tourna en 1959 : Les Quatre Cents Coups, sous le personnage du jeune Antoine Doinel, interprété par Jean-Pierre Léaud (âgé de quatorze ans).

     

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    42. Petite Feuille et Antoine Doinel (image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut).

     

         Souvenez-vous : Antoine Doinel, vivant avec sa mère et son beau-père, froids et distants à son égard, est la tête de Turc de son instituteur Petite Feuille :

    Petite Feuille : - Ah, j’en ai connu, des crétins. Mais au moins ils étaient discrets. Ils se cachaient, ils restaient dans leur coin.

     

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    43. René Bigey et Antoine Doinel en train de faucher des affiches de films (image du film Les Quatre Cents Coups)

     

      Faisant l’école buissonnière avec son copain de classe René Bigey, il passe son temps dans les salles de cinéma. Il en profite pour y piquer les affiches des films et des acteurs ou actrices qu’il collectionne.

     

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    44. René Bigey et Antoine Doinel adeptes de l’école buissonnière et des mots d’excuses bidons (image du film Les Quatre Cents Coups).

     

      Au cours de ses écoles buissonnières, Antoine Doinel aperçoit sa mère embrasser un homme inconnu.  Puis, ayant oublié de recopier le mot d’excuse que lui avait préparé son copain René Rigey, il justifie son absence en disant à Petite Feuille que sa mère venait de mourir !

     

    Petite Feuille : - Ah, te voilà toi ! Alors, il suffit d’un devoir supplémentaire pour te rendre malade ! Et tes parents tombent dans le panneau ! J’serai curieux de savoir ce que tu leur as soutirés comme excuse, moi. Fais voir ton mot.

    Antoine Doinel : - J’en ai pas, m’sieur.

    Petite Feuille : - Ah, t’en a pas ! Et tu crois que ça va se passer comme ça ? Ce serait trop facile, mon ami !

    Antoine Doinel : - M’sieur, c’était… ma mère, elle…

    Petite Feuille : - Hé ben ta mère, ta mère, qu’est-ce qu’elle a ta mère.

    Antoine Doinel : - Elle est morte !

    Petite Feuille : -Ah… fichtre. Excuse-moi, petit, j’pouvais pas savoir ! faut toujours se confier à ses maîtres. Allez, file !

      

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    45. Antoine Doinel en pleine inspiration pour son devoir (image du film Les Quatre Cents Coups).

     

       Antoine, après avoir été giflé par son beau-père devant toute la classe pour ce mensonge, fugue et dort dans les sous-sols d’une imprimerie. Revenu chez lui, sa mère, pour arranger les choses, lui promet une récompense s’il a une bonne note en français. Aussi dévore-t-il La Recherche de l’absolu de Balzac et il s’en inspire un peu, trop, beaucoup, pour un devoir de classe l’invitant à décrire la mort d’un être cher.

     

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    46. René Bigey et Antoine Doinel (image du film Les Quatre Cents Coups).

     

    Accusé par Petite Feuille d’avoir copié des passages entiers de ce livre de Balzac, il est aussitôt défendu par son voisin de table, René Bigey :

     

    Petite Feuille : - La Recherche de l'absolu vous a conduit droit au zéro, mon ami.

    René Bigey : - M'sieur, il a pas copié. J'étais assis à côté de lui, j'l'aurais vu.

    Petite Feuille : - Ah, vous voulez être exclu, vous aussi ?

    René Bigey : - Ça m'déplairait pas.

    Petite Feuille : - Encore une insolence ? Sortez !

    René Bigey : - J'veux bien être gentil, mais j'vais pas sortir : il fait froid, dehors.

    Petite Feuille : - Foutez-moi le camp !

    René Bigey : - Ça c'est pas légal.

    Petite Feuille : - C'est pas lé… ? J'vais vous montrer qui fait la loi ici ! C'est pas légal, hein, c'est pas légal !

     

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    47. Julien Doinel, Antoine Doinel et le commissaire de police (image du film Les Quatre Cents Coups).

     

      Antoine Doinel fugue de nouveau et vole une machine à écrire dans le bureau de son beau-père, Julien Doinel. Ne parvenant pas à la revendre, il la rapporte et se fait prendre par un gardien. Son beau-père l’emmène alors au commissariat de police.  Ses parents ne voulant plus de lui, il est placé par un juge des enfants dans un centre de détention, après avoir été interrogé par une psychologue :

    La psychologue : -Tes parents disent que tu mens tout le temps.

    Antoine Doinel : - Ben, je mens… je mens de temps en temps, quoi ! Des fois je leur dirais des choses qui seraient le vérité ils me croiraient pas, alors je préfère dire des mensonges.

     

     

    image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    48. Julien Doinel au centré de détention (image du film Les Quatre Cents Coups).

    Un jeune du centre : - Ici, c'est pas interdit de s'évader, c'est interdit de se faire prendre.

       Il profite alors d’une partie de football pour s’enfuir du centre et voir la mer pour la première fois de sa vie.

     

     

     

    Dernière image du film Les Quatre Cents Coups de François Truffaut

    49. Antoine Doinel regarde fixement la caméra (image de fin du film Les Quatre Cents Coups).

      Dernière scène du film : Antoine Doinel, après avoir regardé la mer, se retourne et fixe longuement la caméra en train de le filmer.

     

     

    Les Mistons, premier film de François Truffaut (image du film).

                 50. Les Mistons, premier film de François Truffaut (image du film).

      Plusieurs années après, c’est François Truffaut, alias Antoine Doinel, qui, cette fois, derrière la caméra, filmera les enfants.    

         D’abord, dans son court métrage réalisé en 1957 : Les Mistons, avec Bernadette Lafont et Gérard Blain jouant deux jeunes amoureux harcelés par plusieurs mômes. Dans la scène représentée par cette image (n°50), les enfants, après avoir quitté la salle de cinéma où ils avaient suivi les deux amoureux, déchirent l’affiche du film de Jean Delannoy Chiens perdus sans colliers, dans lequel Jean Gabin jouait un juge des enfants.

      Puis avec plusieurs longs métrages comme : Les Quatre Cents Coups, en 1959 ; L’Enfant Sauvage, en 1970 ; L’Argent de Poche, en 1976).

    « La compagnie des enfants me plaît énormément, je m'amuse toujours avec eux et je fais en sorte qu'ils s'amusent avec moi. En tant que cinéaste, les filmer est une chose qui ne me lasse pas. On ne s'ennuie jamais quand on tourne avec des enfants. Leur sensibilité, leur pudeur vous interdit d'en abuser pour les besoins d'un tournage… Je suis beaucoup plus sensible au malheur des enfants qu'à celui des adultes. Parce que les gosses ne peuvent pas se défendre. Mes films qui traitent de l'enfance et de l'adolescence ont un aspect autobiographique dont je peux vérifier la vérité dans mes propres expériences d'enfant mal aimé » (François Truffaut). 

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 4/11 (François Truffaut)

    51. François Truffaut au lycée Rollin (photographie de classe non datée du Studio Pierre Petit. Source : Wikimedia Common).

     

     « De deux choses lune, l’autre c’est le soleil » (Jacques Prévert. Paroles).

    - Élève Truffaut, vous avez encore la tête dans les nuages ! Réveillez-vous, mon jeune ami, et donnez-moi le nom de cinq étoiles les plus brillantes du ciel.

    - Euh, Jeanne Moreau ; Isabelle Adjani ; Brigitte Fossey ; Catherine Deneuve ; Fanny Ardent*. (réplique imaginaire). 

    * Toutes ces actrices ont joué dans des films de François Truffaut, surnommé « L’homme qui était aimé des femmes » (titre récurrent de ses biographies). Jeanne Moreau (Catherine dans son Jules et Jim. 1962 ; et Julie dans La mariée était en noir. 1968) ; Isabelle Adjani (Adèle dans L’histoire d’Adèle H. 1975) ; Brigitte Fossey (Geneviève Bigey dans L’Homme qui aimait les femmes. 1977) ; Catherine Deneuve (Marion dans Le dernier métro. 1980) ; Fanny Ardent (Barbara dans Vivement Dimanche. 1983).

     

    La suite, dans une semaine :

    Du droit des écoliers à la paresse 5/19 (peintures anciennes de Jean-Baptiste Greuze, Carl Waltzelhan, William Henry Hunt, Hanne Tartter, Jean Béraud, Harold Copping et Jean Geoffroy dit Géo).


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    Le Petit Paresseux (huile sur toile de Jean-Baptiste Greuze. 1755. Musée Fabre de Montpellier)

    52 Le Petit Paresseux (huile sur toile de Jean-Baptiste Greuze. 1755. Musée Fabre de Montpellier)

     

                   Dors, mon petit quinquin
                   Mon petit poussin
                   Mon gros raisin
                  Tu me feras du chagrin
                  Si tu ne dors point jusqu'à demain*
     

     

     *Refrain, en Français, de la berceuse L’Canchon Dormoire (La Berceuse), plus connue sous le titre L’Ptit Quinquin (Petit enfant), écrite en patois de Lille, par Alexandre Desrousseaux, en novembre 1853.

     

     

                  Refrain en patois :

                  Dors, min p'tit quinquin
                  Min p'tit pouchin
                  Min gros rojin !
                  Te m'feras du chagrin
                  Si te n'dors point j'qu'à d'main.

     

      Le succès de cette berceuse fut général au point qu’elle devint l’hymne officieux des gens du Nord et que, à son centenaire, elle fut célébrée à l’Élysée sous l’égide du président de la République Vincent Auriol, interprétée par Line Renaud et la Société carnavalesque des Sans-Soucis.

     

    Vous en trouverez les paroles complètes sur Wikipedia :   https://fr.wikipedia.org/wiki/P%27tit_Quinquin_(chanson)

     

     

     … et de multiples interprétations sur Youtube dont celle des Petits Chanteurs à la Croix de Bois, en 2010, avec en solistes les jeunes Baudoin Aube et Adrien Bragagnolo (chef de chœur : Brigitte Thomassin) :

    L'Petit Quinquin. Petits Chanteurs à la Croix de Bois. 2010

     

     

     

    Den Hausaufgaben-Les devoirs (huile sur toile de Carl Watzelhan

    53. Den Hausaufgaben-Les devoirs (huile sur toile de Carl Watzelhan [Mainz 1867-Wiesbaden 1942]).

     

    Alors serr' tes yeux, dors min bonhomme,
    J'vas dire eun'prière à p'tit Jésus,
    Pou qu'i vienne ichi, pindint tin somme…

    (Cinquième couplet de la berceuse L’Ptit Quinquin).

     

     

     

     Shouldn’t you be learning your lessons ? (aquarelle de William Henry Hunt

    54. Shouldn’t you be learning your lessons ? (aquarelle de William Henry Hunt [Londres 28 mars1790-10 février1864]).

     

     J’apprends,

    C’est fatigant sans « u » ou c’est fatiguant avec un « u » ?

     

     

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 5/11 (peintures anciennes)

    55. L’écolier pensif (huile sur toile, datée 1937, de Hanne Tartter 1937. Source : PROANTIC).

     

                      …Dessus le tableau noir, le maître écrit des mots
                         Et puis il interroge au hasard un marmot.
                        Toujours il faut savoir et par cœur ses leçons
                        Sinon l'on est privé de récréation.

                        Le cancre est installé dans le fond de la classe,
                        Les yeux souvent fixés sur dehors, la fenêtre ;
                        Les élèves modèles près du tableau se placent
                        Et mettent un point d'honneur à bien écouter le maître…

                    (Deux des strophes d’un poème d’Olivier Briat : L’écolier).

     

     

     

    L’écolier puni (tableau de Jean Béraud)

    56. L’écolier puni (tableau de Jean Béraud [Saint-Pétersbourg 12 janvier 1849- Paris 4 octobre 1935]). 

     

    Sur soixante millions de Français, on doit compter environ cinquante-neuf millions de cancres, cinq cent mille professeurs et cinq cent mille bons élèves, qui écoutent avidement des cours qui ne servent à rien.

    Jean Dutourd - Les pensées et réflexions (1990)

     

     

     

     

    Le paresseux au bonnet d’âne (dessin fin du XXème siècle début du XXème siècle)

    57. Le paresseux au bonnet d’âne (dessin fin du XXème siècle début du XXème siècle).

     

       E : Endroits

       C : Cruels

       O : Ou

       L : Les

       E : Elèves

       S : Souffrent

     

     

     

    Écriture d’une rédaction (peinture, datée 1908, du Suisse Albert Anker)

    58. Écriture d’une rédaction (peinture, datée 1908, du Suisse Albert Anker [1831-1910]. Source : commons wikimedia).

     

     

                   « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien » (Socrate).

     

                   « L’imagination est plus importante que le savoir » (Albert Einstein).

     

     

     

    The Dunce. Peinture d’Harold Copping datée 1886 (Russel-Cotes Art Gallery & Museum. Bournemouth. Angleterre)

    59. The Dunce (en français : le cancre). Peinture d’Harold Copping datée 1886 (Russel-Cotes Art Gallery & Museum. Bournemouth. Angleterre). 

     

         Jusqu’à la fin du XIXème siècle, le rejet de l’écolier en difficulté n’était pas l’apanage des pédagogues français, comme le montre ce tableau d’Harold Copping, un peintre et illustrateur britannique (25 août 1863-1er juillet 1932). Il se manifestait dans la plupart des pays de l’Europe comme la Grande-Bretagne et l’Allemagne (Der Dummkopf, en français : l’imbécile), ainsi qu’aux États-Unis.

     

     

    Du droit des écoliers à la paresse 5/12 (peintures anciennes)

    60. Boy with Dunce Cap (en français : l’enfant affublé du bonnet de cancre). Tableau d’un peintre anonyme, fin du XIXème siècle.

     

      Dans les pays anglo-saxons, l’écolier lent à apprendre, qualifié de paresseux ou de cancre, était alors puni par son maître qui lui faisait porter un bonnet, dit Dunce Cap (de dunce, « cancre », et cap, « bonnet »). Ce bonnet était muni tantôt d’un seul appendice censé représenter une oreille d’un âne, tantôt de deux appendices pour évoquer les deux longues oreilles de l’âne.

     

     

     

    L’Écolier embarrassé (Jean Geoffroy, dit Geo).

                                61. L’Écolier embarrassé (Jean Geoffroy, dit Geo).

     

       Voici pour « boucler » cette page, plusieurs peintures de Henri Jules Jean Geoffroy, également connu sous le pseudonyme de Geo (Marennes 1er mars 1853-Paris 15 décembre 1924). Vers 1876, il rencontra l’éditeur Hetzel pour qui il illustra de nombreux livres d’enfance. En 1900, il fut médaille d’or à l’Exposition universelle de Paris.

        Au début de sa carrière, il habitait chez un couple d’instituteurs, juste au dessus d’une école. Il a su traduire avec finesse, dans ses premières peintures, le charme naïf des écoliers paresseux et/ou en difficultés qu'il côtoyait.

      J’accompagne ces peintures d’une poésie trouvée sur Facebook, sans référence à un auteur précis, qui accompagnait cette image de « L’Écolier embarrassé » de Geo. 

     

                       « L'Écolier embarrassé » (1908).

                       Geoffroy dit Geo (1853-1924)

     

                        Le petit écolier

                        Se tripotait l’oreille,

                        Il avait oublié

                        Sa leçon de la veille

                        Et ce grand tableau noir

                        Le remplissait d’effroi,

                        L’accord du verbe avoir

                        Pour lui si maladroit,

                        C’était toute une histoire

                        Que son esprit rêveur

                        Malgré sa bonne mémoire

                        N’emmagasinait pas,

     

     

     

    L’Écolier rêveur (Jean Geoffroy, dit Geo).

                                      62. L’Écolier rêveur (Jean Geoffroy, dit Geo).

     

                        Il y’avait dans son cœur

                        D’autres choses que ça,

                        Il y’avait le bonheur

                       De courir dans les bois.

                       Le petit écolier

                       Aimait les herbes folles

                      Et les bougainvilliers,

                      Il n’aimait pas l’école,

                      Il préférait jouer

                      Dans l’eau pure du ruisseau

                      Au lieu d’être cloué

                      Devant ce grand tableau.

     

     

    Un futur savant. Le bonnet d’âne (Jean Geoffroy, dit Geo. Huile sur toile. 1880. Musée national de l’Éducation. Rouen).

    63. Un futur savant. Le bonnet d’âne (Jean Geoffroy, dit Geo. Huile sur toile. 1880. Musée national de l’Éducation. Rouen). 

     

                     Il faisait de son mieux

                     Mais n’y arrivait pas,

                     Sans doute que le bon dieu

                     En lui tendant les bras

                     Lui avait réservé

                     Ce bien joli métier,

                     L’enfant embarrassé

                     Serait garde forestier.

     

    La suite, dans une semaine :

    Du droit des écoliers à la paresse 6/19 (photographies anciennes 1/2).





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