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    Introduction au droit. Jérôme Bonnard

                                          1  Il fera son droit (dessin de Plantu)

     

     

    À l’Ecole de Droit : l’examen (dessin de Starling)

                           2. À l’Ecole de Droit : l’examen (dessin de Starling)

                                  - Pourquoi avez-vous choisi de faire droit ?

                            - Pour la robe (de docteur, de professeur d'université, d'avocat, de juge, d'huissier, de notaire...)

     

       « Faire son droit ». Voila une expression connue de tous, imagée et bien moins triste que sa voisine « faire son deuil ». Toutefois, contrairement à l’expression  « faire son deuil »  dont l’origine est connue de tous (le deuil, du latin dolus, signifie la douleur et s’appliquait au XIXème siècle à une chose qui disparaissait, avant d’être étendue aux personnes défuntes), nos dictionnaires et encyclopédies sont quasiment aux abonnés absents pour éclairer les visiteurs de ce blog, futurs ou actuels « diseurs de droit » (à ne pas confondre avec les « diseurs de bonne aventure »).

     

      L’expression « faire son droit » est tout au plus mentionnée dans le dictionnaire d’Emile Littré, reproduit par le site Internet du Centre National de Ressources textuelles et Lexicales du CNRS, en ces termes : 

    « Connaissance, science des lois. Étudier le droit. École de droit. Professeur en droit. Les étudiants, les élèves en droit. Étudier en droit, faire son droit, fréquenter les écoles où l'on enseigne le droit ». 

     

        Du côté des dictionnaires, vocabulaires et lexiques juridiques de Gérard Cornu et Cie  (PUF), ou de Serge Guinchard, Gabriel Montagnier et Cie (Dalloz), ce n'est guère plus brillant ! Pas un mot sur cette belle expression, alors même que ces ouvrages consacrent plusieurs pages à définir le mot Droit, et à citer d'innombrables groupes de mots commençant par Droit (droit des gens, droit civil, droit de garde, droits de l'homme, etc.), de manière, il est vrai, bien aléatoire (aucune référence au droit de cuissage ou de jambage des Seigneurs du Moyen Âge, ni aux droits de présence versés aux professeurs des Facultés de droit par les étudiants au XIXème siècle pour passer leurs examens !).  

     

          Aussi irai-je droit au but (métaphore juridico-footballistique). Faire son droit ou faire droit, à l’instar des expressions faire sa médecine ou faire médecine, veut dire faire ou suivre des études de droit ou de médecine. 

     

    Un exemple en est donné avec le jeune Gustave Flaubert qui, après avoir été reçu bachelier, prit ses inscriptions à la Faculté de Droit de Paris, sans grande conviction. 

      

    Dans une lettre à son ami Ernest Chevalier, il écrivait : «  En tout cas je ferai mon droit, je me ferai recevoir avocat, même docteur, pour fainéantiser un an de plus ». 

      

     

     

     

    « Faire son droit » : de l’origine d’une expression française

    3. Le jeune étudiant en droit de L'Education sentimentale de Gustave Flaubert

      

     

      Frédéric Moreau fait son droit à Paris. Gustave Flaubert récidiva (du latin recidivare : commettre de nouveau une infraction, après une première condamnation définitive), dans l’un de ses romans, en ces termes : « M. Frédéric Moreau, nouvellement reçu bachelier, s’en retournait à Nogent-sur-Seine, où il devait languir pendant deux mois, avant d’aller faire son droit » (G. Flaubert, L’éducation sentimentale, 1869).

     

         Mais alors qu'elle est l'origine de cette expression admise par nos plus grands écrivains et l'ensemble de nos étudiants du Quartier latin ? Je n'irai pas par trois ou quatre chemins, car, en vérité, en vérité, je vous le dis (amne amen dico vobis), je l'ignore (du latin ignorare: ne pas connaître, être dans l'ignorance. Par exemple: Nul n'est censé ignoré la loi).

     

         Toutefois, je vous reproduis une hypothèse bien séduisante que j'ai dénichée (enlever un oiseau de non nid) sur un site Internet en accès libre:

     

    WordReference.com : Faire son droit

     

       "Il me semble que c'est lié à une tradition familiale qui veut (ou voulait) que le fils (aîné) - mais aujourd'hui aussi la fille - prenne automatiquement la succession de son père comme avocat, magistrat, notaire... Pour moi, "il/elle fait son droit" implique cette vision d'une étape obligée (il faut bien passer par là) dans un parcours tracé d'avance. Je ne sais pas si j'utiliserais cette expression pour un jeune issu d'un milieu plus populaire et qui se serait orienté vers de études de droit.

           C'est ce qui expliquerait aussi pourquoi on peut parfois entendre "il fait sa médecine", pour les mêmes raisons, mais qu'on n'utilise pas cette expression pour des études plus récentes ou des carrières qui ont moins cette image de "succession de père en fils/fille". "Il fait son informatique", "elle fait son histoire", "il fait son ingénieur"... seraient curieux ou prêteraient carrément à sourire". 

     

         À très bientôt pour le prochain post de ce blog de désinformation juridique : Eugène de Rastignac fait son droit (Balzac. Le père Goriot).

     


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    VICTOIRE ! 11 novembre 1918 : « Le Droit fait la Force » (devise de Guerre. 1914-1918)

    1. VICTOIRE ! 11 novembre 1918 : « Le Droit fait la Force » (devise de Guerre. 1914-1918).

     

        Droit et Force. Lors de la Première Guerre mondiale, les cartes postales, les discours et les ouvrages multipliaient les expressions assimilant le Droit à la Force rédemptrice (par exemple : Victor Basch, La guerre de 1914 et le Droit, édité en 1915 par la Ligue des Droit de l’Homme ; Émile Hinzelin, 1914, La Guerre du Droit illustrée. Paris, Librairie Aristide Quillet, 1915, 3 volumes).

     

     

     

     

     

     

     

    Le Triomphe du Droit (carte postale de Bonne Année entre 1914 et 1918).

                    2. Le Triomphe du Droit (carte postale entre 1914 et 1918).

     

     

        Le mot Droit, rehaussé d’un « D » majuscule, était alors assimilé à une valeur fondamentale, distincte du droit au sens des lois et des règlements. Sur cette carte postale ancienne de Bonne Année, éditée pendant la Grande Guerre, le Triomphe du Droit était illustré avec la Déesse de la Victoire portant le drapeau tricolore, et, à ses pieds, l'aigle, symbole de l'Empire allemand, et le casque à pointe (Pickelhaube), adopté par l'armée allemande.

     

       Je vous présenterai, dans quelques jours, dans la même rubrique « Maximes, dictons et mots bizarres » de ce blog, plusieurs chromos enfantins, édités à la Belle Epoque, illustrant des proverbes et des dictons populaires construits autour des deux mots droit et force : « La force prime le droit » « Force fait loi » ; « Force passe droit » : « La force reste au bon droit » ; « Force n’est pas droit »…

     

     

     

     

     

     

    Cinquantenaire de la République. Anniversaire de l’Armistice.  Cérémonie du 11 Novembre 1920 (photographie de presse. Agence Rol, BnF).

    3. Cinquantenaire de la République. Anniversaire de l’Armistice.  Cérémonie du 11 Novembre 1920 devant la Faculté de Droit (photographie de presse. Agence Rol, BnF).

     

     

        Le Char du cercueil du corps du Soldat Inconnu posé sur un affût de canon, recouvert d’un drapeau tricolore, et le Char portant une urne contenant le cœur de Léon Gambetta (1838-1882), homme-politique, membre du gouvernement de la Défense nationale (1870-1871), place du Panthéon, devant l’entrée principale de la Faculté de Droit (aujourd’hui, sièges des Universités Paris1 Panthéon-Sorbonne et Paris 2 Panthéon-Assas). 

     

      Les 8 et 9 novembre 1920, les députés et les sénateurs avaient en effet adopté les deux articles suivants :

    « Article 1er : « Les honneurs du Panthéon seront rendus aux restes d’un soldat non identifiés mort au Champ d’Honneur au cours de la guerre 1914-1918. La translation des restes de ce soldat sera faite solennellement le 11 novembre 1920 ».

    Article 2 : « Le même jour, les restes du Soldat inconnu seront inhumés sous l’Arc de triomphe ».

     

     


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    Boîte du jeu Loto des Proverbes de la maison d’édition parisienne Saussine

    1 Qui aime bien châtie bien ; Qui casse les verres les paie ; L’occasion fait le larron ; À l’impossible nul n’est tenu…(Boîte du jeu Loto des Proverbes de la maison d’édition parisienne Saussine qui exerça ses activités de 1860 à 1960).

        

     

    « Si le mot « apophtegme » est difficile à prononcer ou à écrire, il devient un plaisir quand on en lit un ! » (Pierre Desproges).  Chers visiteurs, je vous ferai grâce des définitions savantes des mots comme maxime, adage, sentence, dicton, citation, locution, axiome, aphorisme, proverbe, précepte, et, plus encore, apophtegme (du grec ancien ἀπόφθεγμα), inconnu de mon correcteur d’orthographe Microsoft Word 2007 qui met toujours dessous un trait ondulé en rouge. Car, en effet, le sens de ces mots étant souvent analogue, il m’est fort difficile de les distinguer.

     

     

     

     

    Station Omnibus : L’Ecole de Droit de Paris, place du Panthéon (chromo de la Maison d’édition Saussine)

    2 Station Omnibus : L’Ecole de Droit de Paris, place du Panthéon (chromo de la Maison d’édition Saussine).

     

     

     « Une erreur judiciaire est toujours un chef-d’œuvre de cohérence » (Daniel Pennac. Monsieur Malaussène. 1995). Je ne retiendrai donc, pour cette page et les deux suivantes, que quelques expressions populaires évoquant, de près ou de loin, le droit et la justice.

     

      Ces expressions juridico-judiciaires ont parfois été illustrées, à la Belle Epoque (1871-1914), en chromos (diminutif du mot chromolithographie), par des éditeurs et imprimeurs lithographes, à destination d’enfants gourmands (chromos publicitaires remis en caisse ou glissés dans les tablettes de chocolat), ou premiers de classe (chromos didactiques Bon Point…).

     

        Parfois encore, ces chromos ont été édités [ées] (le mot chromo étant, au choix de chacun, masculin ou féminin, aujourd’hui j’adopte le plus viril des deux), pour les grandes personnes. Un exemple en est donné avec les chromos polissons évoquant le p’tit besoin urgent de faire pipi avec le dicton « Nécessité fait loi », que je présenterai dans la troisième page.

     

     

     

    LA LOI EST DURE MAIS C’EST LA LOI. DURA LEX, SED LEX

    3 « LA LOI EST DURE MAIS C’EST LA LOI. DURA LEX, SED LEX » (panneau de limitation de vitesse à 50 km/h, sur la route départementale 683 du Doubs).

     

     « L’Université développe tous les dons de l’homme, entre autres la bêtise » (Anton Tchekhov. Calepin).Toutefois, ces pages sont loin d’être exhaustives, car je n’ai pu trouver sur la toile de chromos illustrant certaines maximes juridiques anciennes, aujourd’hui récupérées par nos gouvernants ultra diplômés (Master de Droit des gens + Sciences-Po + l’ENA), pour justifier certaines contraintes réglementaires. Un exemple en est donné avec les panneaux de limitations de vitesse de routes départementales, sur lesquels figure en langue romane française l’expression « La loi est dure mais c’est la loi », suivie de sa traduction en langue latine « Dura lex, sed lex ». C’est ainsi que leurs initiateurs peuvent être à l’origine d’accidents en retenant, par surprise, l’attention du conducteur qui, subitement plongé dans les souvenirs de ses études de latin en classe de sixième, et de droit dans le supérieur, en oublie certaines tâches nécessaires à la bonne conduite !

     

        Pour tout savoir sur l’origine latine et le sens de cette expression juridique d’infrastructure routière, je vous invite à lire la page que je lui ai consacrée dans la rubrique « Maximes, dictons et mots bizarres », le 22 août 2017 dernier.

    http://droiticpa.eklablog.com/la-loi-est-dure-mais-c-est-la-loi-dura-lex-sed-lex-a130747578 

     

        Au cas où vous seriez au volant de votre voiture, garez-vous pour la consulter sur votre Smartphone, afin d’éviter les risques d’accidents et de sanctions (amende de 135 euros et retrait de 3 points sur le permis de conduire). 

     

     

     

     

    Sot et entêté rendront riche un homme de loi (chromo)

    4 « Sot et entêté rendront riche un homme de loi » (légende d’un chromo sous forme de rébus. Circa 1900). 

     

       Parfois encore, on découvre sur la toile des chromos de la Belle Epoque illustrant une citation claire et amusante teintée d’allusions au droit et aux gens de justice, sans que l’on sache si elle a été imaginée par l’illustrateur à l’origine du chromo ou s’il s’agit d’un ancien proverbe populaire français national, provincial ou rural, aujourd’hui tombé dans l’oubli et méconnu des dictionnaires de citations. C’est le cas, par exemple, de la légende de ce chromo : « Sot et entêté rendront riche un homme de loi », dont je n’ai trouvé aucune trace dans les recueils de proverbes accessibles en ligne. Tout au plus, cette légende fait elle penser à cet authentique proverbe français du XVIème siècle : « L'argent tremble devant la porte du juge et de l'avocat. »

     

     

     

     

    À Cheval sur la loi (chromo Chocolat Devinck)

    5 À Cheval sur la loi (chromo Chocolat Devinck. François Jules Devinck était un chocolatier installé à Paris depuis 1830. Il fut également président du Tribunal de commerce de Paris en 1848, plusieurs fois député de 1851 à 1863, et président du Cercle des Echecs de Paris en 1845).

     

        L’expression « À Cheval sur la loi » vient de l'équitation où les sauts et les pas appris aux chevaux sont très stricts. Être à cheval sur la loi signifie donc être exigeant et pointilleux sur les moindres détails.

     

     

     

     

    Gare la loi contre l’ivresse (chromo Lait concentré Anglo-Suisse. C. 1880

    6 Gare la loi contre l’ivresse (chromo Lait concentré Anglo-Suisse. C. 1880. L’Anglo-Swiss Condensed Milk Company était une société suisse fondée en 1866. Elle fusionna avec Nestlé en 1905).

     

               L’expression « Gare.. [la loi] contre » est employée pour avertir une personne d’un danger et l’inviter à prendre garde :

        - Il faut que je voie, que je m'informe, que je coure chez le notaire ; gare que je passe, Louis-Benoît Picard, Les Marionnettes. 1806. Dans ce roman, Picard, fils d’un avocat, décrit un notaire tout joyeux d’avoir à rédiger un acte).

        - Vous devez marcher droit pour n'être pas berné ; Et, s'il faut que sur vous on ait la moindre prise, Gare qu'aux carrefours on ne vous tympanise (Molière. L’Ecole des femmes. I, 1). 

     

     

     

    Un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès » (Chromo rébus).

                     7 « Un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès » (Chromo rébus). 

     

        Ce proverbe ancien signifie qu’un procès entraîne souvent, pour les plaideurs, des années d’angoisse, sans aucune certitude de le gagner, et d’importants frais de justice dont les honoraires d’avocats forfaitaires ou au temps passé, librement fixés par ceux-ci. Aussi peut-il être sage aux personnes en litige d’éviter le procès en concluant un accord à l’amiable, quitte à y laisser des plumes et quelques sous.

     

        Honoré de Balzac, qui fut étudiant à l’Ecole de Droit du Panthéon de Paris, de 1816 à 1819, s’était d’ailleurs approprié ce proverbe dans son roman Illusions perdues, publié entre 1837 et 1843, sous ces mots :

       -       La plus mauvaise transaction [...] est meilleure que le meilleur procès (La Pléiade, t. IV, p. 1054).

     

        Il est vrai que cet auteur adorait enrichir ses écrits de jolies formules plus ou moins ironiques à l’égard du droit et, plus encore, des avocats, qu’il abhorrait (son père voulait qu’il devienne notaire). Parmi celles-ci :

        -      Je ne me suis point sali les pieds dans ce bouge à commentaires, un grenier à bavardages, appelé École de Droit (Le contrat de mariage, 1835). 

       -   Je me défie moins des Chouans que de ces avocats dont les figures ressemblent à des carafes de limonade.

        -   Les lois sont des toiles d'araignées à travers lesquelles passent les grosses mouches et où restent les petites.

         -   La gloire d'un bon avocat consiste à gagner de mauvais procès.

     

     

     

    Proverbes et dictons juridiques en chromos (1/3)

             8-1 – Oh ! les belles galettes (Chromo Chicorée Courtin. Série complète de 6 chromos Decoupis publicitaires. Circa 1900).

     

      Justice est faite est une expression courante, inconnue de mes dictionnaires juridiques. Elle s’emploie à propos d’une situation qui permet à une victime d’obtenir ce qu’elle considère juste d’obtenir pour elle à titre de réparation.

     

        Parfois, elle est prononcée après un procès : On a fait justice de ces voleurs, c’est-à-dire on les a bien condamnés.

     

        Elle évoque également la punition, par la victime elle-même, du coupable présumé, et ce en dehors de toute intervention judiciaire : Se faire justice. Cette dernière expression signifie encore mettre fin à ses jours pour se punir soi-même d’un acte répréhensible.

     

     

     

    Proverbes et dictons juridiques en chromos (1/3)

               8-2 – Si j’en prenais une…

     

       L’expression Justice est faite a été reprise par André Cayatte comme titre d’un de ses films sorti en 1950. Ce film illustre la faillibilité des jurés d’une cour d’assises (et donc de la justice elle-même) à l’occasion du procès d’une jeune femme qui avait pratiqué l’euthanasie sur son amant,  

     

     

     

    Proverbes et dictons juridiques en chromos (1/3)

                8-3 – Je t’y prends, misérable !

     

       D’autres expressions populaires incluent le mot justice comme : Il faut que justice passe ; Il n’y a plus de justice ; Justice pour tous ; C’est justice, ce n’est que justice ; Faire justice ; Rendre justice à ; Se rendre justice à soi-même...

     

     

     

    Proverbes et dictons juridiques en chromos (1/3)

                8-4 – D’abord, donne-moi cette galette 

         

    Des citations de grands auteurs intègrent également le mot justice : 

        - Rendez le bien pour le bien et la justice pour le mal (Confucius).

      - Droit extrême, suprême injustice (Summum jus, summa injuria). Cette parole, attribuée à Cicéron, signifie que l’application excessive du droit ou de la justice mène à l’injustice.  

       - Une extrême justice est souvent une injure (Jean Racine. La Thébaïde).

       - La justice consiste à mesurer la peine et la faute, et l’extrême justice est une injure (Montesquieu). 

        - Un jugement trop prompt est souvent sans justice (Voltaire. Catalina).

       - La justice est entre l’excès de la clémence et la cruauté (Diderot. Pensées philos. n° 10). 

        - La clémence vaut mieux que la justice (Vauvenargues).

        - Ne pouvant fortifier la justice, on a justifié la force (Blaise Pascal).

       - Il se passera du temps encore avant que la justice des hommes ait fait sa jonction avec la justice (Victor Hugo. L’homme qui rit). 

        - La justice est l’administration de la force (Anatole France. Crainquebille). 

        - Un juge habitué est un juge mort pour la justice (Charles Péguy).

      - La justice est gratuite. Heureusement elle n’est pas obligatoire (Jules Renard).

     

     

     

    Proverbes et dictons juridiques en chromos (1/3)

                8-5 – Pour te punir, je la mange.

             -   La justice est comme la cuisine, il ne faut pas la voir de trop près (proverbe tourangeau).

     

     

     

    Proverbes et dictons juridiques en chromos (1/3)

              8-6 – Justice est faite !

           -    Ne crains pas la justice, mais crains le juge (proverbe russe).

           -    La justice, cette forme endimanchée de la vengeance (Stephen Hecquet. 1919-1960, avocat et écrivain). 


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    chromo Les étudiants au bal Bullier

    1 « Je fais mon droit. Une fois licencié, je me ferai recevoir avocat, même docteur, pour fainéantiser un an de plus » (chromo Les étudiants au bal Bullier*, complété de l’extrait d’une lettre du jeune Gustave Flaubert** à son ami Ernest Chevalier).

     

    Sur l’origine de l’expression Faire son droit ou Faire droit :

    http://droiticpa.eklablog.com/faire-son-droit-de-l-origine-d-une-expression-francaise-a185534806

     

     * Le bal Bullier était une salle de bal ouverte, depuis 1847, sous le nom de Closerie des Lilas, au 31 avenue de l’Observatoire (ancienne « avenue de la Pépinière », puis « avenue du Luxembourg »), à l’intersection avec le boulevard Saint Michel. Dès son origine, Le Bullier était le rendez-vous préféré des étudiants des Ecoles et des Facultés du Quartier latin (Vème et VIème arrondissements). Ceux-ci participaient entre autres au Carnaval de Paris et aux fêtes de la Mi-Carême dont Le Bullier était l’un des principaux acteurs (il était le siège social du Comité des fêtes de la Rive gauche).

    Le Bullier a fermé des portes en 1940, et, à son emplacement, a été construit le Centre Universitaire Jean Sarail du Crous de Paris (31, avenue Georges Bernanos, nouveau nom de l’ancienne partie de l’avenue de l’Observatoire, reçu en 1967). 

     

    ** Après avoir été reçu bachelier, en 1841, Gustave Flaubert avait pris ses inscriptions à la Faculté de Droit de Paris. En 1844, il quitta le Quartier latin et sa légendaire Fac’ de Droit de la place du Panthéon, sans avoir obtenu sa licence.

     

     

     

     

     

    Faire grève (chromo La Phosphatine Falières

    2 Faire grève (chromo La Phosphatine Falières. Maison de bouillie à base de céréales pour nourrissons, créée à Asnières, en 1866, par MM. Chassaing, docteur en médecine, et Le Coq, pharmacien et docteur en droit, puisque, selon une expression populaire, « Le droit mène à tout »). 

     

      Faire grève ; Être en grève ; Se mettre en grève… Ces locutions proverbiales signifient cesser de travailler de manière collective à l’initiative de tout ou partie du personnel d’une entreprise afin de faire entendre des revendications, comme une augmentation de salaire ou une amélioration des conditions de travail.

     

     

     

     

     

    Le Pilori en place de Grève. 1530 (chromo publicitaire)

                                  3 Le Pilori en place de Grève. 1530 (chromo publicitaire).

           

    Ces diverses expressions autour du mot grève ont toutes pour origine la place de Grève, qui se trouvait, à Paris, à côté de l’hôtel de ville (elle a été rebaptisée, en 1806, place de l’Hôtel-de-Ville). Cette place était ainsi dénommée en raison de sa situation au bord de la Seine où se trouvait une grève (quai en pente douce constitué de sable et de graviers). Elle a eu longtemps mauvaise réputation car, depuis le XIVème siècle et jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, y était installé un pilori sur lequel furent suppliciés, pendus ou décapités des centaines de condamnés devant une foule nombreuse.

     

     

     

     

     

     

    La grève des cochers de Paris (chromo publicitaire

    4 La grève des cochers de Paris (chromo publicitaire. Les cochers parisiens de fiacre se mirent en grève en 1855, 1867, ainsi qu’à chaque Exposition Universelle entre 1878 et 1889).

     

     

         Toujours est-il que, sous l’Ancien régime, l’expression « être en grève », voulait dire être sans travail. Dans ce cas, les ouvriers et d’autres travailleurs au chômage se réunissaient sur la place de Grève où les patrons venaient les chercher selon leurs besoins journaliers.


       Puis, au tout début du XIXe siècle, le sens de cette expression a évolué lorsque des ouvriers, voire des cochers de fiacres et d’omnibus, se lassèrent d’être exploités par des patrons déshonnêtes et des compagnies avides de revenus d’autant plus élevés que les rémunérations qu’elles leur versaient étaient misérables. Ils  décidèrent alors d'abandonner le travail et de « se mettre en grève », le plus souvent, sur la place de Grève.

     

         Quant au « Droit de grève », le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère le préambule de notre Constitution du 4 octobre 1958, l’a consacré en ces termes : « Le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent » (art. 7). Le 7 décembre 2000, ce droit a été inscrit dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (art. 28).

     

     

     

     

     

     

    Mettre la lumière sous le boisseau ! (chromo Chicorée à la Française).

                        5 Mettre la lumière sous le boisseau ! (chromo Chicorée à la Française). 

     

     

    « Mettre la lumière sous le boisseau » ou « Mettre sous le boisseau » est une expression qui signifie mettre en un lieu une vérité afin que personne ne puisse en prendre connaissance. En l’espèce, ce lieu est un boisseau (récipient cylindrique), qui est retourné pour cacher la vérité ; cette dernière étant représentée par la lumière de la bougie du chandelier qui éclaire tout le monde.

     

    « Il n'est bon avocat qui ne mente en plaidant » (Le dictionnaire des proverbes français. 1757). Lors d’un procès, il va de soi que l’avocat qui connaît un secret fort défavorable à son client va tout faire pour le cacher aux juges et à la partie adverse. Il va donc cacher la vérité sous le boisseau (ou sous sa robe selon des dessins d’Honoré Daumier).  

     

     « Tout le monde ment, même les honnêtes gens » (Eric Dupont-Moretti, Bête noire. 2012). Notre actuel Ministre de la Justice, Gardes des Sceaux, Eric Dupont-Moretti, avait d’ailleurs, dans l’un de ses recueils de pensées, dénoncé cette image populaire de l’avocat menteur en postillonnant contre les magistrats, ce qui plaît beaucoup aux avocats qui ont raté le concours de la magistrature :

     

      « L’avocat est rarement le bienvenu dans le débat judiciaire. Trop peu nombreux sont les magistrats qui considèrent qu’une défense vigoureuse est nécessaire à l’élaboration d’une décision juste. Pour la plupart des juges et des procureurs, nous sommes des trublions, des voyous diplômés en droit, des menteurs professionnels » (Eric Dupont-Moretti, Direct du droit. 2007).

     

     

     

     

     

     

     

    Mettre la lumière sous le boisseau ! (chromo Chicorée à la Française).

    6 « Le bon abbé, qui va droit au fait, crut que nous étions riches à jamais. » Madame de Sévigné, Lettres, éd. Monmerqué. 1862, tome 14-2.434 (chromo La Kabiline).

      

     

      « Aller droit au fait », est une expression qui signifie venir tout de suite à l’essentiel sans détours ni circonlocutions pour masquer ou adoucir ce que l’on veut dire. Elle peut être rapprochée des expressions « Ne pas y aller par quatre chemins », qui date du XVIIème siècle, et « Aller droit au but », dont les premières traces remontent à la fin du XIXème siècle en même temps que la codification britannique du football moderne (désolé, cher visiteur de ce blog, mais je n’ai pu résister à caser cette blague non scientifique !).

     

     

     

     

    « À Bon Droit » (chromo ou image. Devise de Bonne de Savoie. Source : Paris, BNF

    7 « À Bon Droit » (chromo ou image. Devise de Bonne de Savoie. Source : Paris, BNF, lat. 4589,f.1. Bibale-IRHT/CNRS. Permalink : https://bibale.irht.cnrs.fr/23292).

     

       -   « T’as pas le droit », t’as triché, c’est même pas un chromo !   

       -  Peut-être, mais je bénéficie, du « droit à l’erreur » comme tout citoyen et ministre de bonne foi ayant omis de déclarer aux impôts leurs « droits d’auteur ».

     

        Cela dit, l’expression « à bon droit », que l’on trouve sur cette illustration ancienne de la famille des lithographies, des gravures ou des dessins, sans doute non chromolihtographiés, se retrouve dans une des multiples traductions en vers réguliers réalisées au XIXème siècle par des traducteurs passionnés, des Odes, Épodes et Chants séculaires d’Horace (65-8 av. J.-C.), dont celui « A Jules Antoine » :

     

               Digne à bon droit* du rameau d’Apollon,
               Soit qu’il émaille un large dithyrambe
               De termes neufs, et se soustraie ingambe
               Aux jougs du saint vallon
     ; 

     

    (Horace - Odes, Épodes et Chants séculaires. Traduction par M. le Comte de Séguier. A. Quantin. 1883. *Les mots à bon droit sont sans doute de la plume du traducteur et non de celle d’Horace).

     

        De nos jours, les mots « À bon droit » signifient exprimer une demande légitime afin de faire reconnaître ou respecter son droit. Partant de là, dans le langage courant, ils signifient entre autres : être dans son droit ; à juste titre ; avec juste raison, justement, etc.

     

     

     

     

    Juges au XVème siècle (chromo)

                                     8 Juges au XVème siècle (chromo publicitaire ou didactique).   

          

        Plus encore, les magistrats des cours d’appel et ceux de la Cour de cassation utilisent les termes « à bon droit » dans leurs arrêts lorsqu’ils sont chargés d’apprécier la légalité d’un motif litigieux de la décision de la juridiction dont ils sont saisis (jugement d’un tribunal ou arrêt d’une cour d’appel). S’ils énoncent que ladite juridiction a statué « à bon droit », c’est qu’ils approuvent la manière dont elle à jugé en droit. Ladite décision ne sera donc ni infirmée par l’arrêt de la Cour d’appel (… que dès lors c’est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande…), ni cassée par celui de la Cour de cassation (… que dès lors c’est à bon droit que la cour d’appel a statué comme elle l’a fait…).

      

     


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    Les paroles s’envolent et les écrits restent (en latin : Verba volant scripta manent. Pensée attribuée à Horace)

    « Les paroles s’envolent et les écrits restent » (en latin : Verba volant scripta manent. Pensée attribuée à Horace).

     

       Qui a dit : « J’ai davantage confiance dans la cuisine de mon pays que dans sa justice ! ».

        Réponse : Éric Dupont-Moretti, un avocat pénaliste devenu Ministre de la Justice, père de la loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire », définitivement adoptée par le Parlement, après un ultime vote du Sénat, ce jeudi 18 Novembre 2021.  Il avait exprimé cette pensée dans son ouvrage : « Le dictionnaire de ma vie », paru en 2018, chez Kero, en exergue du chapitre consacré à la lettre « C » (p. 31)

     

     Cette pensée, qui associe la justice et la cuisine, n’est pas inédite. En effet, elle rappelle diverses citations juridico-culinaires bien plus anciennes et tombées dans l’oubli :

    « Un avocat est dans un procès ce qu’est un cuisinier dans un repas » (Aristippe. Philosophe grec. Né en 435 av. J-C.).

    « La justice est comme la cuisine, il ne faut pas la voir de trop près » (proverbe tourangeau).

    « Il est plus facile d’ouvrir une huitre sans couteau que la bouche d’un avocat sans avance » (Barten Holyday. Poète anglais. 1593-1661).

    « On dit d’un accusé qu’il est cuit quand son avocat n’est pas cru » (Pierre Dac. Humoriste français. 1893-1975).





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